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Spectaculaire opération du GIS à Belcourt
Lutte antiterroriste
Publié dans Liberté le 04 - 10 - 2004

Les forces spéciales ont débusqué, hier, un groupe terroriste retranché dans un local commercial à Laâqiba au cœur d'Alger.
17h20. Quatre éléments de la Protection civile dévalent la pente du fameux marché de Laâqiba transportant sur une civière un cadavre enveloppé dans du nylon noir. “C'est celui d'El-Bouti”, concède un officier en civil. Bouti Abdelgahani alias Khaled, chef de la Séria El-Horra activant à Alger. Il est l'un des deux terroristes qui s'est réfugié, hier, dans un local commercial situé à la rue Larbi-Tébessi de Laâqiba au cœur de Belcourt. Film d'un accrochage qui a replongé la capitale dans la peur.
13h20. Un coup de feu déchire brutalement le brouhaha ambiant de la rue commerçante Belouizdad. “Allah Ou Akbar” et boom ! Un terroriste, chaussé de training, ouvre le feu à bout portant sur un policier posté sur un trottoir qui longe la grande avenue. Il venait de répondre sauvagement à l'appel du muezzin. Cri et panique chez les passants qui n'en croient pas leurs yeux. Pendant que le malheureux policier s'affale sur le trottoir, le corps ensanglanté, le terroriste longe tranquillement, et à pied, la rue Belouizdad. Les passants affolés et apeurés par la scène vocifèrent et accourent vers la victime. Se sachant reconnu, l'individu armé d'un pistolet automatique d'après les témoignages prend la fuite et monte vers la rue Larbi-Tébessi, située au cœur du marché de Laâqiba. Alerté par le coup de feu, un groupe de policiers se lance sur les traces de l'assaillant et tire des coups de feu dans sa sa direction. Le terroriste et ses acolytes, postés juste en face de leur planque, ripostent. S'en suit un long accrochage qui aura duré jusqu'à 18h50. Bilan : deux terroristes abattus — trois selon d'autres sources — et 14 éléments de la police, dont un officier blessé, plus au moins grièvement. En une fraction de seconde, un carrousel incessant de véhicules de la police longe à vive allure l'axe 1er-Mai Belcourt. Beaucoup d'engins ont déjà pris position tout au long du périmètre de l'attentat. Par intermittence, des rafles retentissent à partir du lieu de retraite des terroristes. La panique s'empare à nouveau de la population qui accourt dans tous les sens. On a peur des balles perdues et des bombes. La cache située en plein quartier populaire incite à l'inquiétude. Tout le monde veut savoir si des proches ne sont pas touchés par ces salves ininterrompues de balles sifflantes. Pis encore, la proximité de l'école primaire sise à un jet de pierre de la position des terroristes fait circuler une folle rumeur de prise d'otages. La panique est indescriptible. Même les policiers ont du mal à faire respecter le périmètre de sécurité tant les gens, les riverains notamment, s'impatientent de connaître le bilan de l'accrochage. Il est vrai que la violence des échanges de coups de feu et de rafales est telle qu'elles rappellent tristement les folles nuits algéroises de la décennie rouge. Et en plein jour !
Et en l'absence des premiers éléments d'information, les rumeurs se démultiplient à la vitesse de l'éclair. On annonce d'abord que 6 policiers ont été blessés et 3 terroristes abattus. Quelques instants après le bilan est presque inversé : ce sont plutôt 6 policiers au moins qui ont péri et seulement deux terroristes alors que le troisième se serait retranché dans le local. D'autres déclarent même avoir aperçu des policiers transférés au CHU Mustapha sur des civières. Bref, chacun y est allé de sa propre version qu'il tient du premier venu. Les forces de sécurité, elles, ne veulent point communiquer tant que l'opération n'est pas achevée. Et le bataillon de reporters qui assiste en “live” à l'accrochage épie la moindre information en provenance des services mais aussi des habitants du quartier qui rapportent des versions aussi invraisemblables les unes que les autres. Pendant ce temps, la foule des forces de sécurité grossit démesurément et celle des badauds aussi. Le chef de sûreté de wilaya supervise lui-même l'opération au milieu d'un grésillement de talkies-walkies et un crépitement de balles. 14h30. Un mouvement de foule a créé une grosse panique suite à un échange violent entre les deux camps. À ce moment, on a eu vent qu'un ordre est donné aux parents d'élèves de récupérer leurs enfants à 15h30 de l'école pour permettre aux forces de sécurité d'éviter une éventuelle prise d'otages. 15h45.
Deux Toyota marron arrive à toute allure. Ce sont des éléments de groupe d'intervention spéciale (GIS), un corps d'élite armé jusqu'aux dents. Vêtus de tenues noires et équipés de toute sorte de munitions et de matériels de combat, ces jeunes à l'allure athlétique, montent directement vers le “foyer” de l'accrochage. “Ça devient sérieux !”, lance un confrère visiblement apeuré par tant de forces en présence. Les kalachnikov, les FMPK, et les pistolets mitrailleurs font craindre le pire à une population qui se réjouit de la paix retrouvée. Ce décor de guerre en plein cœur de Belcourt est tellement impressionnant qu'il inquiète les habitants du quartier.
18h. Les camions à projecteurs déchirent le silence d'une “trêve” de quelques minutes avec les sirènes assourdissantes. Un engin arrive, se fraye un chemin au milieu de la foule pour laisser passer les arrivants. Ce sont des éléments du GIS accompagnés de six gros chiens bergers allemands.
Les photographes mitraillent ces bêtes de leurs flashs. “Du jamais vu !” s'étonne un journaliste. Les éléments de ce corps d'élite enfilent leurs gilets parballes, tiennent leurs chiens d'une main et un kalachnikov de l'autre et s'en vont au charbon au repaire des terroristes. À présent, tout le monde parle d'un assaut imminent. On spécule que seul un terroriste demeure planqué dans le garage et qu'on ne pouvait recourir aux explosifs au milieu d'un pâté de maisons.
18h25. Deux policiers prennent du bras un homme d'un certain âge vêtu d'un qamis et le visage caché et l'engouffrent dans une R19 verte. “C'est un terro !”, s'écrie-t-on. D'autres pensent plutôt que c'est le type qui aurait loué son local aux terroristes qui a été appréhendé pour être interrogé. 18h50. Les chiens renifleurs foncent dans le fameux garage, suivis des éléments du GIS qui ont réussi à mettre le dangereux terroriste hors d'état de nuire. Ainsi, se termine une folle journée belcourtoise dont les rues ont vite repris leur ambiance grouillante. Mais la population a eu peur.
H. M.


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