Les dirigeants du royaume alaouite font preuve d'une escalade verbale, sans précédent, vis-à-vis de l'Algérie. Mohamed Bennouna en a donné le ton, vendredi dernier, à l'ONU. Ne s'avouant pas vaincus du récent camouflet diplomatique induit par la reconnaissance par l'Afrique du Sud de la RASD, les Marocains font monter la pression à coup de déclarations incendiaires voire de guerre en direction d'Alger. En l'occurrence, le représentant de Sa Majesté à l'ONU s'est distingué vendredi dernier par un propos, le moins que l'on puisse dire, comminatoire qui cache mal le désarroi de la monarchie face à la prise de conscience sans cesse grandissante de l'opinion publique internationale sur l'affaire du Sahara occidental. Mohamed Bennouna a accusé en effet ouvertement l'Algérie d'être responsable du “blocage” de toute solution politique dans le conflit du Sahara devant la commission de décolonisation des Nations unies. Pis, le délégué du royaume chérifien croit déceler les prémices d'un affrontement armé entre l'Algérie et le Maroc si Alger se refusait à ce fameux “débat” en bilatéral auquel il appelle. “…Il faut ouvrir un débat pour empêcher l'embrasement de la région”, soutient, alarmiste, Bennouna dont le speech a été largement relayé par l'agence royale MAP et la presse de Sa Majesté. Dans son violent réquisitoire, qui intervient juste après le fameux mémorandum adressé par Mohammed VI au Conseil de sécurité, le diplomate marocain impute la responsabilité du blocage du conflit et de la recherche d'une solution politique concernant le Sahara “marocain”, à l'Algérie. De même que notre pays serait à l'origine du gel de la construction maghrébine aux yeux de serviteur du roi. Par son attachement indéfectible au droit des Sahraouis de disposer d'eux-mêmes via le plan Baker, Alger se trouve dans la peau d'un fauteur de troubles d'après la littérature diplomatique de nos voisins de l'Ouest. Et à défaut d'une “solution politique” telle que le souhaitent les Marocains, Mohamed Bennouna suggère une solution armée. Quand ce responsable parle d'éviter “l'embrasement de la région”, cela sous-entend que Rabat prévoit une autre “guerre des sables”. Le ton est particulièrement dur pour un diplomate censé peser ses mots. Il prétend mettre l'Algérie dans une espèce de fait accompli qui consisterait, soit à accepter l'invitation au débat, soit à subir les conséquences d'un plan de guerre dont seuls les responsables de Sa Majesté connaissent la faisabilité. Ce débat vise selon Bennouna à éviter “l'embrasement à la faveur de conflits fratricides”. Mais de quels conflits fratricides parle-t-il donc ? Le délégué marocain évoque ensuite la possibilité de construire une coopération où “le Sahara, qu'il soit oriental, central ou occidental, serve de lien sécurisé entre le nord et le sud du continent”. S'agissant du “Sahara central”, il fait bien sûr allusion au Sahara algérien où il suggère l'existence de problèmes voire menace allusivement d'en créer à l'avenir, d'où ces “conflits fratricides” et cet “embrasement” faussement redouté du représentant du roi. Dans sa vaine tentative de faire peur à ses voisins algériens, le diplomate marocain a tenté maladroitement de vendre de l'Algérie l'image d'un pays ou le Sahara serait une espace de repli pour la nébuleuse terroriste internationale et que, à ce titre, ses dirigeants devraient céder aux desiderata de Sa Majesté faute de quoi Alger sera dans la cible de l'ONU. En soutenant implicitement que le Sahara algérien est infesté de “nombreuses mouvances terroristes et criminelles”, Mohamed Bennouna aurait sans doute souhaité signaler la présence de Ben Laden en Algérie. Dans sa volonté désespérée de rallier l'opinion publique internationale à sa cause perdue, le Maroc use de procédés les plus invraisemblables voire les plus risibles pour capter l'intérêt des capitales occidentales. Et pour se faire, Mohamed Bennouna lance cette offre de service à Paris, Londres et Madrid : “Nous devons assumer nos responsabilités vis-à-vis de nos voisins du Nord, les Européens…” comprendre qu'il faut nettoyer le Sahara algérien de ses… fantomatiques mouvances terroristes que seuls les yeux le roi semblent avoir détectées. H. M.