Le FLN renoue avec la crise, malgré l'activisme débordant du patron imposé à sa tête. La manœuvre visant à imposer des mouhafedhs qui lui seraient proches, en prévision du congrès du parti, aurait, visiblement, été l'événement déclencheur de cette énième crise. Mais, ce n'est que la partie visible de l'iceberg. Il est clair que la tenue du congrès du parti constitue une étape déterminante dans la vie de ce parti confronté à des crises récurrentes depuis plus d'une décennie. Mais si, jusque-là, Abdelaziz Belkhadem puis Amar Saâdani ont su résister aux mouvements de redressement et autres opposants déclarés au sein du parti, c'est que, depuis toujours, le FLN a été perçu comme un appareil du pouvoir, et que c'est ce dernier qui décidait, en définitive, du début des hostilités, et c'est lui qui sifflait la fin de la récréation. La seule exception fut durant le passage du défunt Abdelhamid Mehri à la tête du parti, période durant laquelle le FLN a osé sortir du giron du pouvoir et se placer franchement dans l'opposition. La création de son clone, le RND, s'était imposée au pouvoir qui, depuis, ne veut plus prendre le risque d'avoir de pareilles surprises. La désignation forcée de Saâdani à la tête du parti, après l'éviction de Belkhadem, qui avait, tout de même, résisté à tous les assauts durant plus de trois années, était dictée par un seul souci : forcer la main aux hésitants quant à la pertinence d'un quatrième mandat pour le président Bouteflika. Saâdani s'est adjugé de sa mission et ses adversaires n'avaient rien pu faire. Au contraire, son principal concurrent, Abdelaziz Belkhadem, qui était rappelé par le président Bouteflika pour les besoins de la campagne, a été brutalement congédié du parti et de la présidence de la République, payant ainsi le prix de ses ambitions personnelles. La route paraissait, donc, libre pour Saâdani, qui s'est mis à placer ses hommes au sein des structures du parti. Mal lui en prit. Cette fois-ci, ce ne sont pas les figures traditionnelles de la contestation qui sont montées au créneau, mais des militants de base qui manifestent devant le siège du parti à Hydra. Pris de panique, Saâdani tire à boulets rouges sur Belkhadem, l'accusant de tous les maux. Or, en désignant un faux coupable, Saâdani laisse transparaître une peur justifiée de se faire doubler avant la tenue du congrès du parti. Car tout le monde sait que Belkhadem est banni du parti et de toute autre responsabilité, du moins pour le moment, et au FLN, on roule pour "ceux qui sont debout, appuyés d'en haut". Alors, qu'est-ce qui agite le patron imposé à la tête du FLN ? Ce ne sont certainement pas ses opposants traditionnels et déclarés qui n'ont, d'ailleurs, jamais réussi à faire pencher la balance en leur faveur. Les Bouteflika avaient choisi Saâdani pour une mission bien précise et c'est vers eux que les regards se tournent présentement. L'on murmure le nom de Tayeb Louh, l'actuel ministre de la Justice, et fidèle parmi les fidèles des Bouteflika, comme futur patron du FLN. Une rumeur qui fait trembler "l'appareil", le siège du parti où une telle éventualité signifierait une "fin de mission" pour Saâdani et son clan. Même si le ministre de la Justice n'a rien dit et rien fait, en apparence, dans ce sens, le fait que son nom circule chez les cadres du parti laisse penser que le processus de succession de Saâdani est bien lancé. Mais, attention, au FLN, on est rompu à l'art de la manœuvre et il se pourrait que le nom de Tayeb Louh soit cité uniquement pour le pousser à se démarquer, ou pour le griller avant l'heure. D'ici le congrès du parti, les choses devraient encore bouger au sein du vieux parti. Attendons pour voir. A. B.