S'il doit aller au bout de son engagement, le gouvernement devra le faire sans le consensus recherché qui, depuis cette semaine, s'est éloigné encore un peu plus, dès lors que l'opposition dit désormais ne pas vouloir entendre parler de révision constitutionnelle avant la tenue d'une élection présidentielle anticipée. D'engagement présidentiel ferme, la révision partielle de la Constitution s'est muée, au fil des mois, en perspective aléatoire. Le projet, le plus engageant politiquement que le président Bouteflika ait eu à imaginer et annoncer au beau milieu de la bourrasque du Printemps arabe alors menaçante, est, depuis juillet dernier, soustrait à l'actualité. En tout cas, il est totalement évacué du discours officiel, depuis la fin des consultations conduites par le directeur de cabinet de la présidence de la République, Ahmed Ouyahia. L'expression officielle publique n'en fait plus référence. Personne parmi l'équipe gouvernementale, à commencer par le Premier ministre Abdelmalek Sellal, ne l'y évoque. Pourtant, la révision partielle de la Constitution a été le projet politique phare qui structura le discours du staff du candidat Bouteflika durant la campagne électorale pour l'élection présidentielle d'avril 2014. Mieux encore, reconduit pour un 4e mandat de suite, Abdelaziz Bouteflika s'engagera solennellement au moment de son investiture à concrétiser le chantier... avant la fin de l'année 2014. Un engagement suivi de la mise en branle aussitôt d'un nouveau round de consultations autour de la mouture à laquelle une commission technique avait travaillé. Ahmed Ouyahia, entre-temps nommé directeur de cabinet de la présidence de la République, est chargé de reprendre, dès juin, un travail déjà effectué par Abdelkader Bensalah. La réussite, il faut le dire, n'a pas été du côté d'Ouyahia dont l'entreprise sera boudée par le segment le plus prépondérant de l'opposition politique. Dès lors, le projet ne pouvait se draper de consensus, au grand regret, assurément, de ses promoteurs qui ont énormément misé sur ce générique. Mais est-ce seulement le défaut de consensus autour du projet qui a décalé — à supposer que ce soit juste un décalage — la révision constitutionnelle devant parachever avant la fin de l'année les réformes politiques annoncées en avril 2011 ? Il y a eu chez de nombreux observateurs de la promptitude à le penser. Pour eux, l'attitude de l'opposition politique, qui a décliné l'invitation aux consultations, complique davantage une entreprise déjà pas du tout facile à conduire sans l'implication physique du président de la République, toujours convalescent après son AVC en avril 2013. Ne pouvant compter, cela dit, sur la disponibilité du chef de l'Etat pour la promotion du texte de la nouvelle Constitution, les maîtres d'œuvre du projet n'auraient eu d'autres choix que de tenter sinon le réunir, du moins simuler un consensus. C'est de cela que participe en partie l'initiative du FFS qui travaille depuis le début de l'automne à réunir "la conférence du consensus national". Rejetée par l'opposition, regroupée au sein de l'Icso, la tentative de consensus par l'entremise du FFS s'avère, à son tour, vaine. Aussi, s'il doit aller au bout de son engagement à amender la Constitution, le gouvernement devra le faire sans le consensus qu'il a tant recherché. Un consensus qui, depuis cette semaine, s'est éloigné encore un peu plus, dès lors que l'opposition dit désormais ne pas vouloir entendre parler de révision constitutionnelle avant la tenue d'une élection présidentielle anticipée. Il est vrai que le pouvoir peut toujours continuer à faire la sourde oreille et poursuivre son chantier. La loi lui confère, pour ce faire, la possibilité de valider le texte de la loi fondamentale par le Parlement réuni en conférence, comme ce fut le cas en novembre 2008. Même si le procédé n'est pas le mieux indiqué pour la consolidation politique du projet. La voie référendaire est assurément une option meilleure, mais difficilement concevable pour le gouvernement, du moment que la classe politique a refusé de s'impliquer dans le processus de consultations. Prenant conscience de conjonction politique défavorable, les artisans du projet de révision de la Constitution, le chef de l'Etat en tête, auraient jugé plus sage de mettre de côté la copie synthétisée par les bons soins d'Ahmed Ouyahia, espérant des recompositions politiques propices à d'éventuelles convergences. Mais en attendant, le gouvernement doit rassurer les voix qui montent, y compris au sein de l'Alliance présidentielle, pour réclamer le parachèvement du chantier. Les députés du FLN ont profité de la session parlementaire dédiée au vote de la loi de finances 2015 pour demander l'accélération du projet. Un ministre de la République pense que la mouture revue et corrigée par Bouteflika sera rendue publique dès janvier 2015. Beaucoup parmi ses collègues au gouvernement se retiennent, n'étant certainement pas dans le secret, de se risquer à avancer une échéance. S. A.- I.