Inauguré mercredi dernier, le Festival national du théâtre amazigh, qui en est à sa sixième édition, se poursuivra jusqu'au 18 décembre prochain au Théâtre régional de Batna. Le lendemain, le TR Béjaïa a inauguré la compétition avec Jelloul Lefhaïmi, un spectacle traduit vers tamazight à partir d'un volet de la célèbre trilogie de Abdelkader Alloula. Il y a de cela six ans, Batna a eu le mérite et le privilège d'organiser la première édition du Festival cultuel national du théâtre amazigh, dans sa première version titubante, hésitante. En ce mois de décembre 2014, nous en sommes à la sixième édition d'un festival où le quatrième art se dit dans la langue de Massinissa. A l'unanimité, participants, organisateurs, citoyens de la ville de Batna et des autres villages et villes limitrophes, qui ont fait le déplacement, s'accordent à dire que ce Festival qu'ils nomment "notre festival", fait partie des acquis des Aurès et qu'il est désormais un rendez-vous incontournable. Le Théâtre régional Malek-Bouguermouh de Béjaïa a donné le coup d'envoi de cette sixième édition, qui se veut celle de la jeunesse créatrice et innovante, à travers la représentation du spectacle Jelloul Lefhaïmi, traduit vers tamazight à partir d'un volet Lajwad (les Généreux), de la célèbre trilogie de Abdelkader Alloula. "C'est une partie, une balade, aucunement revisitée ou retouchée mais plutôt traduite en tamazight", nous explique Djamel Abdelli, le metteur en scène. Dans un lieu froid, hostile et inhospitalier, seules des tenues portées par les personnages rappellent qu'il s'agit d'un hôpital, et pas à l'accueil mais à la morgue comme pour rajouter au morbide. Un homme court à sa perte ou à la perte des autres (on ne sait pas) mais il court sans cesse, et à chaque arrêt des mots en alerte giclent : il fait des reproches, il ne comprend pas pourquoi ses concitoyens se plaisent dans une situation chaotique qu'ils ont créée eux-mêmes, qu'ils entretiennent. Quand bien même fatigué, essoufflé, éreinté, Jelloul Lefhaïmi reprend sa course et prêche la bonne parole mais ne semble intéresser personne. Dans le meilleur des cas, il fait pitié, or lui souhaite qu'on l'écoute. Et quand personne ne vous écoute, un jour ou l'autre vous abandonnez le combat, car un sentiment d'impuissance vous gagne et vous basculez, là où vous n'avez jamais voulu être. Une chaise comme décor installée au milieu de la scène : une sorte d'espace où se retrouve celui qui interroge et ceux qui s'interrogent mais ne se posent pas les même questions. Du coup, ils n'auront pas les mêmes réponses ; un vrai dialogue de sourds où le geste et le propos ont pu remplacer ou se passer de tout décor. Sur les planches les comédiens ont donné le meilleur d'eux-mêmes, Jelloul Lefhaïmi, campé par le talentueux Belkacem Kaouane était magistrale et au-dessus du lot, longtemps applaudi par le public, qui n'avait aucune difficulté à comprendre, l'œuvre de Alloula traduite en tamazight (variante kabyle). Pour rappel lors de cette journée, celle de jeudi dernier, l'habitude a été respectée : un public fidèle et nombreux en dépit du froid. Lors d'un point de presse, le commissaire du festival (également directeur du Théâtre national algérien), Mohamed Yahiaoui s'est félicité du bon déroulement des préparatifs mais également de la venue de participants des quatre coins du pays "pour donner un statut et cachet national à ce rendez-vous du quatrième art". R H