Dangereuses tendances Jamais la fuite des capitaux n'a atteint de telles proportions qu'au cours de ces dix dernières années. L'aisance financière, la série d'excédents financiers ont permis, via une augmentation sans précédent, des importations et des programmes colossaux d'infrastructures de transférer illicitement des montants se chiffrant à une dizaine de milliards de dollars au moins en une décennie. Cette saignée de l'économie nationale a été de nouveau mise à nu avec les récentes révélations douanières et des milieux bancaires chiffrant à, respectivement, 400 millions de dollars en 2013 et 2014 et 1 milliard d'euros ces fuites illicites de devises l'an dernier. La réaction à ces mouvements frauduleux reste molle. La dernière note de la Banque d'Algérie illustre cette absence de véritable détermination à lutter contre un tel phénomène. Elle rappelle la nécessité de respecter la réglementation en vigueur, notamment celle relative au blanchiment d'argent. Elle somme les banques d'effectuer le contrôle de la régularité de l'opération avant toute domiciliation bancaire et de vérifier la surface financière de l'importateur en exigeant le bilan et le tableau de compte de résultat. La Banque d'Algérie invite également les banques commerciales à la vigilance à l'endroit des pays qui ne sont pas transparents sur le plan fiscal. Allusion aux paradis fiscaux ou aux pays à risque. Mais ne liste ni ces paradis fiscaux ni ces pays à risque. Ce qui ajoute à la confusion générale. Dans la même veine, la Banque d'Algérie n'a pas communiqué la liste des importateurs fraudeurs aux banques commerciales ni procédé à la suspension des importateurs qui ont payé sans dédouaner leurs marchandises dans les délais réglementaires. Mais l'institut d'émission n'est pas le seul concerné par cette ampleur de la fuite illicite de devises. Les failles dans les dispositifs de contrôle et réglementaires sont pourtant facilement identifiables : pas de transparence dans les opérations d'importations et les transactions commerciales à travers particulièrement l'obligation de chèque, pas d'échanges d'informations instantanées entre la Banque d'Algérie, les banques commerciales, la Douane, les impôts et les services du registre du commerce, pas de système de veille sur les prix des biens et services sur les marchés internationaux pour éviter les surfacturations. Autant de brèches qui favorisent la circulation de l'argent issu de l'informel et un transfert illégal de montants importants en devises. Mais tout cela n'a été permis qu'avec la déliquescence de certaines institutions de contrôle, l'impunité qui caractérise la corruption en Algérie et l'absence de véritables signaux politiques pour endiguer ces phénomènes. À cela s'ajoute l'absence de coopération financières ou douanière avec les pays destinaires de ces masses d'argent frauduleux, laquelle empêche la récupération de ces fonds. D'ailleurs, l'Etat ne s'est pas efforcé de les rapatrier par manque évident de volonté politique. Tout semble obéir à un système mafieux qui multiplie ou encourage les failles dans les dispositifs réglementaires et de contrôle pour empêcher toute traçabilité. Il est à craindre que l'ampleur qu'ont prise ces phénomènes puissent se traduire par la généralisation plus accentuée de la consommation de la drogue chez les jeunes et l'usage de cet argent pour financer le terrorisme en Algérie ou ailleurs.