Les marcheurs ont été "déçus" par le discours du président de la République. Contrairement aux autres villes du pays où les militants antigaz de schiste ont été empêchés par les forces de l'ordre de se rassembler et encore moins de marcher, à In-Salah, une imposante marche a été organisée, hier, à l'occasion de la date anniversaire de la nationalisation des hydrocarbures (24 Février 1971). Rodés à cet exercice depuis le début de l'année, les citoyens d'In-Salah n'ont rien perdu de leur élan pour faire, encore une fois, une véritable démonstration de force. Selon des témoignages, ils étaient quelque 30 000 personnes, femmes et hommes, à investir la rue dans cette ville du Sud pour réitérer leur refus au projet du gaz de schiste, cher au pouvoir. Les slogans n'ont pas changé : "La lil ghaz essakhri" (non au gaz de schiste) ; "Samidoun li taksir el-hidroliki rafidoun" (nous résistons et refusons la fracturation hydraulique) ; ou encore "Monsieur le Président, qu'attendez-vous pour décréter un moratoire sur ce projet ?". Des slogans qui reflètent parfaitement la détermination des militants antigaz de schiste à aller jusqu'au bout de leur combat. Autrement dit, les habitants d'In-Salah ne jurent que par l'arrêt du projet-pilote lancé à quelques encablures de leur cité. Si ce chantier dit d'Ahnet est pratiquement à l'arrêt depuis déjà quelques semaines et qu'il ne reste plus que l'évacuation des lieux, l'Etat ayant fini par fléchir devant la pression citoyenne, il n'en demeure pas moins que, pour le gouvernement et le président de la République, le projet d'exploration du gaz de schiste doit être poursuivi... Le discours du président Bouteflika, lu, hier à Oran, en son nom, par son conseiller, Mohamed Ali Boughazi, confirme clairement la détermination de l'Etat à ne pas renoncer au projet du gaz de schiste qu'il qualifie de "don de Dieu" dont, dit-il, "il faut tirer profit". Le message du chef de l'Etat est tombé tel un couperet à In-Salah où les militants antigaz de schiste souhaitaient plutôt entendre sa réponse par rapport à leur revendication d'un moratoire sur ce projet. Cela, quand bien même ils se disaient ne pas s'attendre à grand-chose de sa part. "On savait qu'il n'allait rien dire", confirme, désabusé, Abdelkader Bouhafs, membre du collectif citoyen menant le front antigaz de schiste d'In-Salah. M. Bouhafs alerte sur ce discours qu'il qualifie de "plutôt provocateur" et qui, selon lui, "risque d'accentuer davantage la rupture déjà consommée entre les citoyens d'In-Salah et le pouvoir central". "Notre mouvement de révéler la réalité que les citoyens d'In-Salah ne croient plus à l'Etat. Désormais, le pouvoir doit savoir qu'il ne doit plus compter sur les citoyens de notre ville lors des futures échéances électorales, à commencer par le référendum sur la Constitution que les habitants d'In-Salah jure d'ores et déjà de ne pas voter", explique le représentant des citoyens de cette ville plus que jamais livrée à l'incertitude. Cela, avant d'ajouter que le mouvement antigaz de schiste cache mal plusieurs autres maux sociaux susceptibles d'embraser, dans les jours à venir, la situation, aussi bien à In-Salah que dans l'ensemble des régions du sud du pays. F. A.