Et si le mouvement de protestation contre le gaz de schiste est parti pour durer autant de temps que nécessiteraient les travaux du chantier d'exploration lancé à In-Salah ? De toute façon, ce ne sont pas les déclarations des officiels, encore moins les "assurances" des responsables de la Sonatrach, qui peuvent, à présent, convaincre les "résistants" de cette ville du Sud, déterminés à ne pas baisser les bras avant que l'Etat ne décide de renoncer à ce projet et fermer les puits déjà forés à quelques dizaines de kilomètres de leurs domiciles. Pis encore, la dernière sortie du P-dg intérimaire de la Sonatrach, Saïd Sahnoun, soutenant que le projet d'exploration du gaz de schiste sera mené jusqu'au bout, a davantage attisé la colère des citoyens d'In-Salah. Désormais, l'escalade de leur mouvement, jusque-là pacifique, n'est plus écartée. Et pour cause, les militants antigaz de schiste sont passés, depuis l'après-midi d'avant-hier, à une nouvelle forme de protestation pour le moins audacieuse : ils ont tout simplement décidé de fermer la piste menant de la RN1 vers le chantier "non conventionnel" de Sonatrach. Et depuis hier, ils ont carrément installé un campement au PK 35 (point kilométrique, au sud de la ville d'In-Salah, d'où bifurque justement cette piste. Il y a trois tentes qui y sont plantées pour accueillir les manifestants résolument décidés d'empêcher, notamment, les camions qui transporteraient des produits chimiques utilisés dans la technique de fracturation hydraulique. Ils sont au moins une centaine de jeunes à occuper les lieux du matin jusqu'au soir, alors qu'une garde est assurée la nuit. L'objectif de cette action, explique Abdelkader Bouhafs, membre du collectif citoyen, dit "groupe des 22", est de "veiller à ce que l'opération du fracking (fracturation hydraulique) ne se produise pas dans le deuxième puits prévu par Sonatrach". Notre interlocuteur insiste là-dessus : "Pour nous, il n'est pas question que cette opération se poursuive sur ce site. On fera tout pour empêcher la fracturation dans le deuxième puits", jure-t-il, non sans souligner, au passage, que des conseils sont constamment donnés aux manifestants pour éviter que des incidents ou autres accrochages avec les éléments des forces de l'ordre surviennent. Selon le même membre du "groupe des 22", les camions transportant les produits chimiques appartiendraient à la multinationale Halliburton et seraient aisément identifiables par les manifestants. Parallèlement à cette action, et comme pour exercer davantage de pression sur les pouvoirs publics, un autre groupe de jeunes manifestants a décidé de fermer, dans la matinée d'hier, l'accès d'un autre site d'exploitation du gaz conventionnel de Hassi-Moumen, à 35 km au nord de la ville d'In-Sallah. Dans le même temps, le rassemblement se maintient toujours à la place de la Résistance (face au siège de la daïra) où les habitants d'In-Salah ont élu domicile depuis déjà le 1er janvier dernier ! Pour le même combat, Abdelkader Bouhafs regrette, par ailleurs, qu'aucune réponse n'ait été jusqu'à présent donnée par le ministère de l'Energie concernant la demande du collectif citoyen d'In-Salah pour la mise en place d'une commission locale technique de suivi et du contrôle du processus de l'arrêt des forages et le nettoyage des lieux. "Nous avons tenu une réunion avec le chef de daïra et la commission sécuritaire, jeudi dernier, et avons formulé une demande officielle pour la mise en place d'une commission technique de suivi et de contrôle que nous proposons avec 7 membres, des spécialistes en forages et en environnement. Selon la commission sécuritaire, notre demande serait, depuis, parvenue aux services du ministère de l'Energie, mais malheureusement, ce dernier tarde à nous donner sa réponse", déplore M. Bouhafs, qui n'écarte pas l'éventualité de voir le mouvement de protestation se durcir davantage dans les jours à venir. Le collectif citoyen antigaz de schiste, indique notre interlocuteur, prépare, par ailleurs, une nouvelle lettre pour demander au président Bouteflika de "décréter un moratoire" sur le projet d'exploration du gaz de schiste. La relance du projet du gaz de schiste, exigent les contestataires, doit attendre les résultats du débat national préconisé. Pour les militants antigaz de schiste, c'est même une condition sine qua non... F.A.