Les deux partis, dont la position sur les réformes économiques est aux antipodes de la politique présidentielle en la matière, se replacent déjà sur la scène de la compétition électorale. À moins d'une année et demie de sa tenue, l'élection présidentielle d'avril 2004 emballe déjà la scène politique. Longtemps restés en marge des soubresauts que connaît le pays en adoptant une position de réserve sur la gestion des affaires publiques, les deux partis, qui se sont relayés durant la dernière moitié de la décennie 1990, sortent de leur silence pour afficher les ambitions présidentielles de leurs responsables. Le FLN et le RND, qui se préparent activement à l'organisation de leurs congrès respectifs prévus au printemps prochain, comptent bien recharger leurs batteries organiques pour ne pas être pris de court par une échéance qui s'annonce d'ores et déjà aussi palpitante que riche en surprises. La formation de Ahmed Ouyahia, qui auparavant a critiqué la politique présidentielle de concorde civile devant être promue en concorde nationale, revient à la charge à la lumière des réformes économiques telles que proposées par la démarche de Abdelaziz Bouteflika. Le responsable du RND, dont la vision sur les privatisations est connue de tous, rejoint ainsi la position de l'UGTA qui rejette le programme de Abdelhamid Temmar. Ahmed Ouyahia ne mâche pas, en effet, ses mots pour soutenir l'organisation syndicale de Madjid Sidi-Saïd en lui témoignant, par expérience, dit-il, “une profondeur de vue et d'analyse de la chose économique”. Le champion des réformes et partisan acharné de la privatisation s'oppose de manière catégorique à la politique de Abdelaziz Bouteflika. On ne doit toucher, tenait-il à affirmer ce week-end, qu'aux “entreprises déstructurées ou à l'arrêt”. Ouyahia, qui depuis maintenant plusieurs mois observe, par courtoisie, disent certains, et par tactique, selon d'autres, se replace sur la scène politique après avoir soutenu pendant longtemps le Président. Mais si tout porte à croire que le prochain congrès de son parti sera un tournant décisif dans cette optique, des sources proches de sa formation révèlent que l'ancien Chef du gouvernement est mis, ces derniers temps, face à la pression de sa base militante qui voudrait avoir son propre candidat à l'élection présidentielle de 2004. Va-t-il alors céder à la volonté de ses militants, qui semblent ne plus vouloir d'une candidature hors parti, ou s'accrochera-t-il à son statut de commis de l'Etat dont il s'est toujours revendiqué ? Peut-on dire cependant que le président de la République est en train de perdre ses soutiens politiques l'un après l'autre d'autant plus que le FLN lui-même exprime des réserves concernant le programme de privatisation conçu par l'un des hommes de main de Abdelaziz Bouteflika ? Le Chef du gouvernement et secrétaire général du parti, Ali Benflis, qui est intervenu la semaine dernière devant les membres du Conseil économique et social, n'a pas caché sa désapprobation concernant la politique des réformes telle qu'on veut l'imposer. Non seulement il déclare que celle-ci n'est pas l'apanage d'une seule personne, mais il renvoie aussi l'ascenseur à l'UGTA qui avait affirmé que ses attaques n'étaient pas dirigées contre le Chef du gouvernement, mais contre le programme de Abdelaziz Bouteflika, en lui proposant un pacte social. Le responsable de l'Exécutif, à qui on prête l'ambition de briguer un mandat présidentiel, semble, en effet, être à la recherche d'un consensus au niveau des partenaires sociaux, un passage obligé pour une candidature à la magistrature suprême. Seulement, celle-ci doit passer également par le congrès du FLN et, notamment, l'évolution de la situation politique du pays. S. R.