Résumé : Malgré les protestations gestuelles de sa femme, Samir tint à passer la nuit auprès d'elle. À son réveil, elle le trouve endormi, la tête reposant sur le bord de son lit. Emue par ce geste qui la renseignait sur son amour pour elle, elle repense alors à sa vie et à ses parents ignorants et irresponsables, qui ne s'étaient jamais préoccupés de leurs enfants. Ces derniers avaient souffert d'un manque affectif flagrant. Certes, elle avait tenté de colmater les brèches envers les derniers-nés de la famille. Mais malgré sa grande volonté et sa générosité affective, elle savait qu'elle ne pouvait remplacer l'amour d'une mère ou l'attention d'un père. Samir ouvrit les yeux. Il relève la tête et remarque que Mordjana le contemplait. Son visage lui parut plus serein et plus reposé. Il fut heureux de constater qu'elle allait beaucoup mieux que la veille, et il s'étire avant de lancer d'une voix taquine: -J'ai dormi comme un loir... Elle tente d'ébaucher un sourire, et lui caresse les cheveux : -Tu ne sais pas mentir Samir, prononce-t-elle du bout des lèvres, car la douleur de sa joue se réveillait et les pansements la gênaient. -Je te jure que si... -Ah ! Eu confirmes alors que tu viens de débiter un mensonge. Il lui donne une tape sur le bras : -Petite coquine... Tu sais prendre les gens au dépourvu... Je me suis installé confortablement dans mon lit et j'ai dormi une bonne partie de la nuit avant que tu ne me réveilles par tes gémissements... Elle fronce les sourcils : -Moi ? -Qui d'autre, hormis nous deux, se trouve dans cette chambre ? -Désolée Samir... Tu aurais dû rentrer à la maison. -Je rentrerai avec toi... Au fait, Chahine pense que tu pourras regagner le bercail dans l'après-midi, si toutefois on ne relève aucun signe alarmant chez toi. -J'ai encore mal à la joue, et ma tête menace d'exploser. Mais vu que Chahine t'a rassuré, je ne vois pas d'inconvénient à quitter la clinique aujourd'hui même. -Eh bien nous le saurons incessamment. -Je devrais appeler Maroua... -Bien sûr... mais (il jette un coup d'œil à sa montre) ne crois-tu pas qu'il est encore trop tôt ? -Maroua est matinale... Je pourrais toutefois l'appeler au milieu de la matinée... Pourquoi l'alarmer alors que tout se passe bien. -Grâce à Dieu, Mordjana... Tu me vois heureux de te savoir de meilleure humeur ce matin. En plus, tu arbores meilleure mine, et l'éclat de tes yeux me réchauffe le cœur. -Ne chante pas mes éloges trop tôt, tout pourra changer d'une minute à l'autre. Il rit : -Je te connais assez maintenant pour m'attendre à toute métamorphose de ta part... Désormais, tu pourras voir la vie sous un nouvel angle... Une fois remise de tes opérations, tu entameras ta formation... Ensuite, nous aviserons... Heu... si d'ici là, nous n'avons pas encore d'enfants. Elle rougit, et il se remet à rire : -Tu es toujours aussi timide qu'au début de notre mariage, Mordjana... Tu n'aimes pas les enfants ? -Si, bien sûr... Tu oublies que j'ai toujours vécu parmi eux ! -Ce n'est pas pareil... Tu as vécu parmi tes frères et sœurs... Ce sera autre chose lorsqu'il s'agira de tes propres enfants... -Inchallah... J'espère pouvoir être à la hauteur de toutes tes ambitions Samir... Ce sera ma manière de te remercier pour tout ce que tu fais pour moi. En fin de journée, Chahine l'autorisera à quitter la clinique. Samir la ramène à la maison, et elle se confine dans sa chambre afin d'éviter les regards malveillants de sa belle-mère. Cette dernière avait ouvertement reproché à Samir de dépenser ses économies pour soigner une "grenouille", qui ne pourra jamais changer d'aspect. Cependant, Malika, mise au courant par son frère, vint lui rendre visite dans la soirée et prépare un succulent dîner. Malgré ses protestations, elle tint à la faire manger elle-même dans sa chambre. Quelques jours passent. La cicatrisation s'étant bien faite, Chahine avait programmé une seconde opération afin de procéder à une greffe. Une fois le morceau de peau prélevé sur sa cuisse, le chirurgien procédera à la seconde intervention. Commencera alors une période d'angoisse. On craignait un rejet ou une éventuelle infection. Fort heureusement, et à la grande satisfaction de Mordjana, aucune anomalie de ce genre ne vint gâcher les efforts du médecin et les espérances de la jeune femme. (À suivre) Y. H.