L'Algérie commémorera demain le 23e anniversaire de l'assassinat en direct à la télévision du président Mohamed Boudiaf. Ayant dirigé l'Algérie du 16 janvier 1992, date de son retour au pays à l'appel de la mère patrie, au 29 juin 1992, Mohamed Boudiaf, de son nom de guerre Tayeb El-Watani, restera à jamais celui qui a pu en un temps très court rendre espoir à une jeunesse algérienne avide de liberté, mais surtout de considération. Afin de ne pas oublier cette personnalité parmi les plus marquantes de la guerre de Libération nationale, un rassemblement est prévu aujourd'hui lundi au cimetière d'El-Alia à 11h35, heure de son assassinat à Annaba. 23 ans après la mort de Tayeb El-Watani, le mystère demeure entier sur les véritables commanditaires de ce crime politique, et ce n'est surtout pas ce procès expéditif du sous-lieutenant du groupe d'intervention spécial (GIS), Lambarek Boumaârafi, le tueur présumé, qui pouvait contribuer à faire éclater la vérité. Même la commission d'enquête gouvernementale instituée à l'époque pour faire la lumière sur cet assassinat politique avait, d'ailleurs, retenu la thèse de "l'acte isolé" motivé, avait-elle expliqué, par des considérations religieuses du garde. L'opinion publique n'en saura donc pas plus sur un crime qui a tant ému les Algériens, eux qui ont découvert en Mohamed Boudiaf une personnalité nationale attachante qui a su s'adresser à eux dans un langage direct, sincère, naturel et sans fioritures comme ils n'en ont jamais entendu par le passé. Le crime s'ajoutera donc à la longue liste des assassinats politiques que le régime algérien continuera de traîner comme un boulet et pour longtemps encore. Son livre Où va l'Algérie ? qu'il avait édité en 1964 déjà reste d'une brûlante actualité, aujourd'hui que le pays traverse une des phases les plus critiques de son histoire. Au-delà de tout, le nom de Mohamed Boudiaf demeurera à jamais lié à l'œuvre libératrice du peuple algérien. Militant de la première heure et figure historique de la Révolution algérienne, Tayeb El-Watani avait, en effet, participé à toutes les phases liées au déclenchement de l'action armée contre la France coloniale. Il avait d'ailleurs fait partie du fameux Groupe des 22 qui avait décidé du déclenchement de l'action armée quelques mois seulement avant le 1er Novembre 1954. Il faisait partie de la délégation de cinq responsables de la Révolution (avec Ben Bella, Khider, Lacheraf et Aït Ahmed), dont l'avion civil marocain qui devait rallier le Maroc au sol tunisien avait été détourné de sa trajectoire par l'aviation coloniale. Il avait été libéré, avec ses compagnons de lutte, le 18 mars 1962 après la signature des accords d'Evian. Condamné à mort en 1964 par le régime de Ben Bella, il quitta l'Algérie pour s'installer au Maroc, après un séjour en France. Et ce n'est qu'en 1992 qu'il regagna le pays après l'arrêt du processus électoral et la démission du président Chadli Bendjedid pour présider le Haut-Comité d'Etat. Et c'est en tant que tel qu'il fut assassiné alors qu'il prononçait un discours à Annaba, en direct à la télévision. H. S