L'écrivaine, professeure de mathématiques, a recueilli les multiples versions évoquant ce que l'on a souvent décrit comme un mythe et une légende. L'ouvrage de 140 pages, publié aux éditions Casbah, est exclusivement consacré à l'histoire de la reine des Touareg, Tin Hinan. Consciente de la lourde tâche qui l'attendait, l'auteure du livre, Amèle El Mahdi, s'est engagée dans une incroyable aventure à la recherche de cette fascinante personnalité afin de "lui attribuer la place qui lui est due parmi les grandes reines et héroïnes qui ont marqué l'histoire de l'Algérie". Pour ce faire, l'écrivaine, professeure de mathématiques, a recueilli les multiples versions évoquant ce qu'on a souvent décrit comme un mythe et une légende. La première version, explique-t-elle, s'est basée sur un ancien manuscrit en langue arabe retrouvé à In Salah, lequel présente Tin Hinan comme étant de confession musulmane et qu'elle serait venue en compagnie de son père, un certain Sayyid Malek, en l'an 1020 de l'hégire, correspondant à l'an 1621 de l'ère chrétienne. "Or une datation au carbone des débris du lit de bois de Tin Hinan obtenue à l'Institut d'études nucléaires d'Alger en 1967, la situe à 470 ans après J-C", précise-t-elle. La deuxième version rapportée par Ibn Khaldoun dans son ouvrage Histoire des berbères et des dynasties musulmanes, affirme que les "Houara" –les Touareg autrement dit– sont les enfants d'une certaine Tiski (la boiteuse littéralement), une femme mariée à un musulman du nom El-Missour. Quant à la troisième version et qui est la plus répandue, elle affirme que Tin Hinan est l'ancêtre de toutes les tribus terguies nobles. Elle est décrite comme une femme d'une rare beauté qui serait venue du Tafilelt dans le sud marocain et se serait établie à Abalessa, à 80 km de Tamanrasset. Le père Charles de Foucauld la dépeint comme étant une femme "irrésistiblement belle, grande au visage sans défaut, au teint clair, au yeux immenses et ardents, au nez fin, l'ensemble évoquant à la fois la beauté et l'autorité". "Laide et boiteuse pour certains, extraordinairement belle pour d'autres, certains soutiennent qu'elle était musulmane, d'autres qu'elle était juive et d'autres encore qu'elle était plutôt chrétienne. Trois versions différentes, trois personnages distincts qui démontrent la complexité et l'importance socioculturelle du phénomène Tin-Hinan", renchérit l'auteure. Le nom de la reine, dans son sens étymologique, est sujet à controverse. Pour certains, Tin Hinan veut dire "celle des tentes". Pour d'autres il signifie "celle qui vient de loin". "J'ai adopté cette dernière interprétation en me basant sur les recherches scientifiques qui s'étaient penchées sur la question", confie Mme El Mahdi, selon laquelle le mausolée et le squelette de Tin Hinan restent toutefois l'énigme qui divise le plus les historiens et les archéologues. Certains chercheurs affirment que "le monument d'Abalessa n'est point un tombeau, mais un fortin construit par un certain roumi du nom de Jolouta qui fut chassé du Hoggar par les musulmans avant d'aller se réfugier dans l'Adrar des Ifoghas". D'autres, comme Maurice Reygasse et Emile-Félix Gautier ainsi que Henri Lhote, cités par l'écrivaine, ont considéré qu'il agissait "d'une sorte de caravansérail fortifié où se rejoignaient les influences du Nord et du Sud". En revanche Gabriel Camps avait totalement réfuté les théories de Reygasse en affirmant que le monument d'Abalessa était "un tombeau et non un bâtiment à usage militaire et défensif". Quant aux ossements qui y ont été découverts en 1925, l'auteure a tenu à rappeler que "la communauté scientifique est encore aujourd'hui incapable d'affirmer s'il s'agit du squelette d'un homme ou celui d'une femme. N'étant ni archéologue, ni historienne, je n'ai nullement la prétention de résoudre l'énigme Tin Hinan. Qu'elle soit mythe ou réalité, son histoire mérite toutefois d'être connue non seulement de chercheurs et de scientifiques, mais aussi du grand public". R.K.