L'attaque, qui a eu lieu vers les coups de 22h30, a visé la famille Merah qui s'est installée à Khraïssia, voilà 10 ans, pour fuir le terrorisme. L'information faisant état du carnage perpétré par un groupe terroriste s'est répandue telle une traînée de poudre aux alentours du douar Boukhris, situé entre Khraïssia et Birtouta. Entourée de vergers, la ferme où résident les Merah (5 couples et leurs enfants) est en réalité une exploitation agricole. Des maisons en dur sont érigées sur une plate-forme bien aérée, offrant une belle vue dégagée sur l'Atlas blidéen. Pourtant, dans ces lieux champêtres et paisibles, les terroristes ont décimé toute une famille. Tout était calme en ce mardi 28 décembre, et dès la nuit tombée, les familles habitant ces hameaux se terrent chez elles. Originaires de Souaghi, wilaya de Médéa, les Merah gardent leurs habitudes rurales ; d'ailleurs Boukhris n'est-il pas un hameau agreste ? C'est vers les coups de 22h35 que l'enfant, Merah Samah, âgée d'à peine 3 ans, est sortie de chez elle tout en sang pour aller retrouver sa mère qui dormait depuis quelques jours chez ses parents habitant la maison mitoyenne. Horrifiée par la vue du sang, la mère, née en 1967, est quelque peu rassurée par la fille qui était venue se plaindre de sa sœur aînée qui l'aurait frappée. Excédée par le comportement de sa fille aînée, la mère traverse la cour commune pour aller chez elle et gronder l'auteur descoups. Dès qu'elle franchit le seuil de la porte, un spectacle horrible et froid fait de sang et de mort s'offre à elle dans toute sa sauvagerie. Elle découvre le corps de son mari Tahar, âgé de 40 ans, gisant dans une mare de sang, à même le lit de la chambre à coucher. Les trois filles Widad, Keltoum et Manal, âgées respectivement de 19, 17 et 12 ans, gisent elles aussi dans une mare de sang dans leur chambre. La mère pousse un cri entendu à des centaines de mètres à la ronde. Les voisins accourent pour découvrir eux aussi un spectacle indescriptible et inimaginable. Lorsque les hommes s'approchent des corps, ils se rendent compte que Manal respire encore même si elle a perdu connaissance. Des voisins se rendent aussitôt à la ville de Khraïssia pour aviser les autorités et les forces de sécurité qui se rendent immédiatement sur les lieux. Ils évacuent les corps des défunts à la morgue de l'hôpital de Douéra. Manal est, quant à elle, transportée au CHU de Blida où elle a été placée dès son arrivée dans une unité de soins intensifs eu égard à la gravité des ses blessures : elle est toujours dans le coma. Les premières investigations des services de sécurité ont permis de comprendre comment Samah a pu échapper au carnage : elle dormait avec son père et vu sa petite taille d'enfant, les terroristes qui ont tué Tahar Merah en premier ignoraient la présence de la seule rescapée. Selon les premiers indices, les victimes ont été passées à l'arme blanche, à savoir des couteaux. D'autres informations crédibles elles aussi font état de l'usage par les terroristes de houes et de pioches pour accomplir leur sinistre besogne. D'ailleurs, affirment ces dernières sources, des images horribles ont été relevées par les enquêteurs qui ont recueilli des fragments de chair et de cervelle collés sur les murs des chambres où ont eu lieu les crimes. Dès les premières lueurs du matin, d'importantes forces de l'ANP ont passé au peigne fin tous les alentours à la recherche des assaillants, mais en vain. Hier, en milieu de journée, l'opération de ratissage continuait. Isolée par un cordon de sécurité, la maison des Merah était minutieusement fouillée par des éléments de la gendarmerie qui relevaient tous les indices pouvant les aider dans leur enquête. Inconsolable, le vieux Boudjemaâ, père de Tahar, ne cesse de répéter : “C'est le mektoub.” Il venait juste d'arriver de Médéa lorsque nous l'avons abordé alors qu'il était assis sur une pierre. Son regard en dit long sur l'étendue de sa tristesse même s'il tente de rester digne. C'est dans une maison voisine que se trouve l'épouse et mère des victimes. De temps à autre arrivent des voitures qui déposent des membres de la famille et c'est en pleurs et en criant leur douleur que les femmes s'engouffrent dans la maison mitoyenne. Selon des parents, l'enterrement aura lieu dès la réception des dépouilles mortelles. S. I.