Cette localité, après plusieurs années d'accalmie, renoue avec la violence terroriste. Avant-hier, jeudi, à 21h10, des terroristes armés, vraisemblablement affiliés aux GIA, ont investi le lieu dit «Télégraphe», et celui de Haï El-Magam sur les hauteurs de la cité Es-Salem, au sud de Khraïssia. Les terroristes armés, selon des informations recueillies auprès des citoyens, se sont scindés en deux groupes. Le premier s'est dirigé vers le groupe de jeunes qui veillaient à la lisière d'un vaste champ de pêchers à Haï El-Magam. Les six jeunes ont été trompés par l'insignifiance du groupe (trois terroristes) qui avançait vers eux. Arrivé à leur hauteur, le groupe armé tire à bout portant, à l'arme automatique, sur les six jeunes, morts sur le coup. Trois d'entre eux étaient cousins, les Bensalem, et trois autres des voisins. Simultanément, «deux ou trois minutes plus tard», soutiennent d'autres témoignages, un autre groupe investit le haï dit «Télégraphe». La première maison ciblée est celle de la famille Douadji. Le père, 35 ans, sera tué de deux balles dans la tête alors qu'il s'apprêtait à résister, à l'aide d'un bout de bois. Sa femme est exécutée sur le seuil de sa maison et leur fille de trois ans abattue dans son lit, par deux balles tirées depuis la fenêtre. Le seul rescapé de cette famille est un jeune enfant de six ans qui a pu s'échapper par la porte de derrière. Dehors, une fillette de quatre ans est abattue près de chez elle ainsi qu'un jeune qui a entendu les coups de feu et qui est venu s'enquérir de la situation. Un homme, d'environ une trentaine d'années, est le seul miraculé de cette incursion du GIA. Coincé dans une impasse, il tente de défoncer une porte qui ne veut pas s'ouvrir. Rattrapé par le groupe terroriste, il reçoit une balle dans le mollet, une autre l'effleure et trouve la porte en fer et une troisième s'écrase sur le sol. L'homme fait le mort et ne bouge pas. Le groupe armé s'en va en toute quiétude. Hier, une douzième victime, une vieille femme, a succombé à ses blessures à l'hôpital de Douèra. Les habitants de Khraïssia, encore sous le choc de ce brutal réveil sur le terrorisme, ont critiqué la distribution inéquitable des armes. Les véritables hommes, qui ont en besoin, et habitent à la lisière des oueds, se trouvent sans armes, et donc, sans défense. Douze morts dans deux carnages à Khraïssia en cinq minutes, à cent mètres l'un de l'autre. Voilà la nouvelle donne du GIA, et qui fait vraiment peur. Pour plusieurs raisons. Notez bien la logistique du groupe: il s'est scindé en deux, a «communiqué» à l'aide de fumigène pour se replier, une fois l'attentat perpétré. L'arme du crime a été, cette fois-ci, la kalachnikov, dans tous les cas. Pire, le repli des terroristes s'est effectué par voiture, par route. Khraïssia se trouvant enclavée entre cinq bourgades, à savoir Mehelma, Draria, Birtouta, Shaoula et Douèra, il serait difficile de ne pas croire que les réseaux urbains du GIA ne se sont pas constitués. Il est encore permis de dire que le pire est à venir, avec l'ouverture de la saison estivale, et les «grands déversements» terroristes vers le littoral qui se font en pareils cas. Avec près de 150 assassinats depuis l'intronisation de son nouveau chef Rachid Ouakal, le GIA (toutes tendances confondues) reste fidèle à sa ligne: «Ni dialogue, ni trêve, ni réconciliation, toujours le sang et la destruction.» On sait au moins à quoi s'en tenir. Mais quand le terrorisme troue la périphérie d'Alger comme du gruyère, il y a des raisons de s'en tenir à une analyse de la situation sécuritaire des plus circonspectes.