À l'image de cette année 2004, qui vient de s'achever, l'équipe nationale de football a été aussi imprévisible les douze derniers mois que capricieuse, aussi passionnante que séductrice et, surtout, aussi émouvante par moments que déprimante par d'autres. Telle une météo de laquelle on attend le meilleur comme on craint le pire, notre EN a tantôt plu, beaucoup déplu, mais n'a laissé personne indifférent. Comme en cet inespéré mois de janvier, où elle a drainé les foules comme jamais une sélection africaine ne l'a fait hors de ses bases à l'occasion du célèbre tournoi continental. Dans la plus algérienne des villes tunisiennes, les “valeureux guerriers” de “l'intérimaire” Rabah Saâdane ont enchanté leurs milliers de supporters en arrachant, avec le cœur, le droit de figurer parmi le grand huit du continent en compagnie de “l'Everest” camerounais, forcé au partage des points et au détriment d'une Egypte qui, ensorcelée par un lutin magicien faiseur de miracles nommé Achiou, s'en est allée sans vraiment comprendre comment retourner aux pieds de ses légendaires pyramides, déchue, battue et éliminée par une sélection algérienne qui, soutenue comme jamais par toute une ville “algérianisée” et drapée par l'emblème tricolore, s'est sentie pousser des ailes. Des ailes coupées et un enthousiasme freiné par une formation marocaine insolente de réalisme et d'opportunisme au bout d'un combat loyal à l'issue duquel les Verts sont tombés au champ d'honneur, les armes à la main… comme cette enragée et zélée police tunisienne qui est “tombée”, avec une férocité digne des peu recommandables troupes de Gengis-Khan, sur d'infortunés inconditionnels des Verts, battus, déçus, humiliés par leurs faux frères qui garderont, et pour longtemps encore, ce sang algérien sur les… mains. La passion née en terre tunisienne autour de cette EN qui nous a fait rêver a, cela dit, vite perdu un de ses principaux artisans en la personne de Rabah Saâdane, poussé vers la sortie et (presque) obligé à l'exil du côté du lointain Yémen à cause d'une sombre affaire de prérogatives avec un Stephane Pauwels plus apte à semer la discorde et la zizanie qu'à remplir convenablement le rôle (fictif) pour lequel il a été recruté (à tort). C'était là le début de la fin pour cette jeune équipe qui, en dépit de l'éternel problème relationnel entre professionnels et locaux, a su rallumer la flamme sacrée, séduire toute un peuple footeux et forcer le respect de tout un continent. Cela avant que ce dernier ne finisse par... rire sous cape de l'incroyable (mais vrai) “blague algéro-belge” qui a fait sensation huit mois plus tard. Entre-temps, les Verts, drivés par un certain Robert Waseige recruté à coups de centaines de millions alors qu'il venait de mener Charleroi à la dérive, sont retombés dans leurs travers à l'occasion des éliminatoires jumelées de la CAN et du Mondial 2006, en subissant la loi des Angolais, Rwandais et Nigérians. Sousse-Annaba : l'axe espoir-désespoir Ces points éparpillés ça et là sur la route menant à Munich ne représentent toutefois rien devant ce qui est arrivé un soir de 5 septembre de funeste mémoire sur l'herbe bônoise du 19-Mai-1956. Ce soir-là, le coup de tonnerre était si fort, si terrible, si inattendu qu'il a fait jaser tout un pays et fait couler beaucoup d'encre, de salive et de... larmes, même à des milliers de kilomètres où il ne faisait (décidément) pas bon d'être algérien cette nuit-là. N'est-ce pas un M. Madjer ? Atomisés par un modeste Gabon par un humiliant 0-3 que l'histoire retiendra malgré elle comme la plus lourde défaite enregistrée par l'Algérie sur ses terres en compétition officielle, les Verts ont quitté précipitamment la course au billet d'or menant au pays des triples champions du monde et brisé le rêve de millions d'Algériens. Fini le Mondial, bye-bye Waseige, lequel quittera (logiquement) ses fonctions sans avoir gagné la moindre rencontre, mais après avoir coûté trop cher à une FAF apparemment encore naïve, sûrement mal conseillée et probablement mal gérée. La solution pour sauver ce qui peut l'être a eu pour nom Ali Fergani, qui sera ensuite épaulé par son ex-compagnon de route, Lakhdar Belloumi. Leur objectif : inverser une tendance plus proche du cataclysme que de la CAN égyptienne et éviter à cette EN, que Hemdani et Meriem refuseront une énième fois, de sombrer dans le désespoir après avoir pourtant soufflé un espoir fou dans le ciel tunisien. Le rappel des “anciens”, Dziri et Bourahli, la parité “arrachée” au Rwanda et la probable venue de Ahmed Réda Madouni, qui a profité de la blessure de Metzalder pour gagner ses galons de titulaire au Borussia Dortmund occupèrent ensuite bien l'actualité des Verts durant le dernier trimestre, mais c'était, cela dit, trop “maigre” pour rassasier des supporters qui espéraient que le tremplin tunisien soit assez “consistant” pour “envoyer” les Verts assez haut, de les mettre même (et pourquoi pas !) sur orbite. Ce n'était malheureusement pas le cas en 2004. Ce ne sera pas le cas non plus en 2006, l'année justement de ce Mondial. Et de la CAN. Mais avant, il nous reste encore toute une année 2005 où l'EN jouera sa présence au pays des Pharaons. Rien que pour cela, rien que pour revivre les instants magiques vécus à Sousse, on se doit d'espérer et d'attendre le meilleur de ce nouvel an, comme une qualification à la messe biannuelle du football africain. Ne serait-ce que pour l'honneur de cette EN qui nous a tant fait rêver et pour ce pays qui en a grandement besoin. A. K.