Le dénouement du dossier du nucléaire iranien, avec la signature d'un accord entre Téhéran et les capitales occidentales, violemment critiquée par Israël et l'Arabie saoudite, commence à révéler la fragilité des relations égypto-saoudiennes, malgré leur "union sacrée" contre les Houthis (chiites) qu'ils combattent ensemble au Yémen. Le rapprochement opéré par le nouveau roi Salman avec les Frères musulmans égyptiens et la reprise de contact de Riyad avec le Hamas palestinien (proche de Téhéran) ont irrité Le Caire au plus haut point. Pour combattre l'influence iranienne au Proche-Orient, le nouveau roi saoudien qui a succédé au défunt roi Abdallah, depuis janvier, n'a pas trouvé mieux que de faire appel aux Frères musulmans installés en Arabie saoudite, selon le quotidien égyptien Al-Masryoun. Pour l'Arabie saoudite, il est plus urgent de "résister" à l'ennemi chiite, qu'est l'Iran, qu'au terrorisme islamiste, incarné par l'Etat islamique (EI/Daech, sunnite), et dont l'idéologie s'est pourtant nourrie du wahhabisme promu par les Al-Saoud. Le Royaume privilégie en fait ses intérêts géostratégiques sur ses relations avec une Egypte en guerre contre la mouvance des Frères musulmans (sunnites). Outre ce rapprochement avec les Frères musulmans pour contrecarrer ses propres concitoyens chiites, dont la majorité vit à l'est du Royaume, le roi Salman a renoué avec le Hamas palestinien, considéré par l'Egypte comme organisation terroriste et réputé être proche de l'Iran. Dans ce jeu géopolitique complexe, l'Arabie saoudite veut aussi jouer un rôle de premier ordre dans le conflit israélo-palestinien et les négociations de paix au Proche-Orient. Pour cela, Riyadh n'a pas hésité à inviter le leader du Hamas, Khaled Mechaâl, qui a rencontré personnellement le roi lors d'un pèlerinage à La Mecque, ont rapporté samedi les dirigeants de ce mouvement et l'agence de presse saoudienne SPA. Une rencontre très mal appréciée par les autorités égyptiennes, même s'il n'y a pas eu de réactions officielles à ce propos. Après avoir entretenu des relations très distantes avec le Hamas, opposé à la destitution par l'armée égyptienne du président Mohamed Morsi, il y a deux ans, l'Arabie saoudite songerait-elle à reprendre sa place dans les discussions, toujours à l'arrêt, entre les Palestiniens et les Israéliens ? C'est ce que pensent les autorités égyptiennes qui considèrent la question des négociations israélo-palestiniennes comme une "chasse gardée", selon toujours le quotidien égyptien. Grand financier du Hamas, l'Arabie saoudite a coupé les vivres à ce mouvement proche du Hezbollah libanais et du régime syrien de Bachar al-Assad, tous les deux proches de Téhéran. Pour rappel, Riyad a soutenu l'actuel président égyptien, Abdal-Fattah al-Sissi, dans son coup d'Etat contre Morsi. Officiellement, cette "réconciliation" entre le Hamas et l'Arabie saoudite est motivée par la relation conflictuelle opposant ce mouvement à son frère ennemi le Fatah du président palestinien, Mahmoud Abbas. Le Hamas aurait donc besoin de Riyad pour ses discussions indirectes avec Tel Aviv, dans l'espoir de lever le blocus israélien sur la bande de Gaza, en vigueur depuis sept ans. Mais ce "remue-ménage" s'inscrit dans l'éternelle guerre de leadership entre l'Arabie saoudite et l'Egypte qui se disputent le contrôle d'une Ligue arabe obsolète et l'autorité religieuse sur la communauté musulmane sunnite. L.M.