Qu'est-ce qui donne de l'assurance à Madani Mezrag ? Profite-t-il de la faiblesse de l'Etat ou concrétise-t-il un deal qu'il avait passé avec l'Armée nationale et populaire (ANP) qui l'autorise à activer en vue de la structuration de ses anciens acolytes dans un parti politique ? Il devient de plus en plus clair que l'Etat accorde à Madani Mezrag et ses ouailles de l'ex-Armée islamique du salut (AIS) le privilège d'activer comme bon lui semble. Privilège qui est refusé aux partis politiques légalement constitués, ceux de l'opposition, surtout. Après en avoir fait un politique, il le laisse travailler à la structuration de l'organisation qui fut le bras armé du Front islamique du salut (FIS) dissous en un parti politique. L'ancien chef terroriste, qui ne s'est jamais vraiment repenti, revendiquant avec arrogance ses crimes sur des plateaux télévisés et qui ne juge pas utile de s'en excuser, ne voit pas l'intérêt de demander l'autorisation de l'administration pour mener des activités politiques. Voilà une situation sur laquelle le gouvernement, qui ne se gêne pas pour mobiliser les forces de l'ordre pour empêcher des activités d'organisations légalement constituées, devrait s'expliquer devant l'opinion publique. Madani Mezrag est-il au-dessus des lois de la République ? Chef de l'Armée islamique du salut (AIS), il est nécessaire de le rappeler, il est censé être un bénéficiaire des lois sur la concorde civile et celle de la réconciliation nationale. Deux lois qui, au demeurant, n'absolvent pas les membres des organisations terroristes impliquées dans des crimes de sang en même temps qu'elles interdisent leurs activités politiques. Or, il se trouve que lui, justement, se met au dessus de l'administration, promettant de tenir d'autres réunions, sans pour autant éprouver un quelconque besoin de demander des autorisations administratives. Le conclave de Mostaganem est son deuxième bivouac politique régional d'été après celui de l'année passée, organisé à Jijel dans son ancien maquis terroriste. Et, au rythme où vont les choses, le sinistrement célèbre terroriste qui n'a jamais caché son intention de ressusciter le FIS, ne tarderait pas à annoncer la création d'un parti politique. Ne l'affirme-t-il d'ailleurs pas à chaque fois qu'une tribune médiatique lui est offerte ? Dans un entretien accordé à notre confère TSA à l'issue du "bivouac" de Mostaganem, Mezrag a déclaré ne pas devoir demander l'autorisation de l'administration pour mener ses activités, mais juste de l'informer. Pis, par le biais de l'Institution militaire. Il se met ainsi dans la posture du protégé de l'Armée nationale et populaire, inscrivant ses activités sous son patronage et lui imputant, de fait, un rôle politique qu'elle s'est toujours efforcée de démentir. Des assertions assez graves qui auraient dû normalement inciter l'ANP à une réaction. Or, force est de relever que ce n'est pas le cas. L'ANP n'a pas réagi comme elle l'a fait lorsqu'un historique, Mohamed Mechati, en l'occurrence, membre du groupe des 22 ayant déclenché la guerre de Libération en 1954, l'avait interpellé afin qu'elle prenne ses responsabilités face à ce qu'il a qualifié de dérive despotique de Bouteflika. La réponse donnée par l'ANP à la lettre de Mechati s'est, en effet, voulue un démenti à toute intervention dans le débat politique de l'époque. L'institution militaire compte-elle sur Mezrag en vue d'une nouvelle configuration politique ? Même si les interférences de l'institution militaire dans la politique est un secret de Polichinelle, Mezrag, élevé au rang de "personnalité nationale" à la faveur des consultations menées par la présidence de la République sur la révision de la Constitution, lui, ne se soucie même plus des formes pour dire qu'il agit avec l'accord de l'ANP. L. H.