Environ un millier de Français sont partis faire le djihad auprès de Daech en Syrie, dont de nombreux Franco-Algériens. Leur départ seuls ou en famille est très souvent une surprise pour leur entourage. Itinéraires. Encore une, une famille soupçonnée d'avoir rejoint Daech. Selon des sources policières, un couple franco-algérien et leurs quatre enfants ont profité des vacances d'été pour quitter définitivement leur lieu de résidence, au quartier du Grand Parc, à Bordeaux et aller faire le djihad en Syrie. Leurs voisins les décrivent plutôt comme des gens affables et qui ne montraient aucun signe de radicalisation religieuse. En mai dernier, deux pères de famille toulousains (pourtant fichés par la Direction générale de la sécurité intérieure-DGSI) ont fait le même voyage à bord de camping-cars où ils avaient embarqué femmes, enfants et bagages. Ils avaient vidé complètement leurs maisons avant de partir en Syrie ou ils ont été repérés. Quelques mois plutôt, une famille strasbourgeoise composée des parents et d'une fratrie de huit enfants s'est également servie d'une auto-caravane pour traverser l'Europe, la Turquie, avant de foncer tête baissée dans les territoires de l'Etat Islamique. À leur arrivée, trois des frères ont trouvé le moyen de poster une photo sur les réseaux sociaux, les montrant dans la ville de Raqaâ, joviaux et décontractés, l'index levé vers le ciel et une kalachnikov dans les mains de l'un d'eux, à peine âgé de dix ans. Ce voyage sans retour a eu lieu quelques semaines avant les attenants de Paris du 19 janvier 2015. Dans l'entourage de la famille, personne ne s'est douté du plan fomenté par le père pour enrôler sa progéniture dans les rangs de Daech. Dans ce cas aussi, on évoque l'absence de signes (pas toujours avérés d'ailleurs, d'une radicalisation comme le port du voile ou l'assiduité à la mosquée). On sait seulement que la chef de famille a fait de la prison. En Syrie, il perdra deux de ses fils, comme d'autres Français qui ont sacrifié leur vie pour Daech. Officiellement, l'Etat français compte un peu moins de 2000 individus impliqués dans les filières djihadistes à l'intérieur et à l'extérieur de l'Hexagone. Selon des informations fournies par le ministre de l'Intérieur Bernard Caseneuve devant une commission d'enquête parlementaire, environ 500 Français se trouvaient en mai dernier en Syrie, dont une moitié constituée de femmes et d'enfants. Il y a un peu plus d'un an, deux jeunes filles d'origine algérienne ont fait le voyage en Syrie. Dihia, une Grenobloise de 19 ans, a fait une fugue de plusieurs milliers de kilomètres jusqu'à Alep. Issue d'une famille sans histoires, elle est arrivée en France à l'âge de cinq ans avec sa maman et ses frères et sœurs dans le cadre du regroupement familial. Elle mène une scolarité sans accrocs jusqu'au lycée ou une mauvaise rencontre amoureuse fait basculer son destin. Son petit ami lui demande de porter le voile et la connecte avec les sites de propagande djihadiste. Il lui donne ensuite de l'argent et l'envoie avec l'un de ses acolytes chez Daech. Sarah née d'une union mixte entre un Algérien de Sétif et une Française poursuit la même voie. Son embrigadement se fait dans la cour de récréation par une camarade qui la prend sous son aile. La recruteuse exploite la fragilité de la jeune fille à la scolarité chaotique. Elle lui donne de l'assurance en la désignant pour une mission suprême de combattante du Califat. La dernière image de Sarah s'est affichée dans les écrans de surveillance de l'aéroport de Marignane à Marseille où elle a pris l'avion pour Istambul. Ses parents encore sous le choc disent n'avoir rien vu venir. Aujourd'hui, ils sont désemparés comme de nombreuses autres familles dont les enfants à peine sortis de l'adolescence prennent un allez simple pour l'enfer de Daech. Les statistiques de juin dernier confirme la mort de 126 Français en Syrie et en Irak. Parmi les rescapés, certains ont réussi à revenir en France avec l'étiquette de terroristes néanmoins collée sur le dos. Ils sont souvent mis directement en détention pour des chefs d'inculpation très graves. Karim regrette presque d'avoir foulé à nouveau le sol français. Enfermé à la prison d'Osny, dans la région parisienne, il est séparé des autres pensionnaires conformément à une mesure sur l'isolement des détenus radicaux dans des quartiers spéciaux. Considéré comme très dangereux par l'administration pénitentiaire, il est soumis à un régime de vie très éprouvant. S. L-K.