Scepticisme Les pouvoirs publics sont optimistes. S'il n'y a pas un grand engouement pour le dépôt de l'argent informel dans les banques, c'est qu'on n'est qu'à trois mois du début de l'opération. L'action de sensibilisation menée depuis août dernier n'a pas encore porté "tous ses fruits". Différents experts contactés, eux, restent sceptiques. Techniquement, l'opération de mise en conformité fiscale volontaire ou plus simplement opération de bancarisation de l'argent de l'informel, en un mot le dépôt de cette manne dans les banques publiques ou privées contre une amnistie fiscale, a peu de chances de réussir. L'explication est claire pour ces spécialistes : d'abord l'argent déposé correspond à des ressources courtes qu'on ne peut orienter vers le financement des investissements. Ces derniers ont besoin de ressources bancaires moyen-long terme. Mais pour un responsable d'une banque locale, il existe des mécanismes pour transformer ces ressources bancaires courtes en ressources longues et donc employés dans le financement des investissements. Autre argument, les détenteurs de cet argent se portent bien en vivant cachés. Ils font de bonnes affaires dans l'informel. Ils ont besoin tout le temps d'avoir des liquidités en dehors des circuits bancaires pour saisir des opportunités qui se présentent sur le marché. Pourquoi devoir s'afficher à chaque fois, demander de grosses sommes à la banque et peut-être voir le caissier lui demander des explications sur ces retraits. Dans cette logique, le recours à la banque n'est pas pratique. À cela s'ajoute un argument en béton : le manque de confiance des détenteurs de cet argent à l'égard des institutions de l'Etat et des banques locales. Pour drainer les 30 ou 40 milliards de dollars qui circulent dans l'informel (chiffres officiels), plusieurs spécialistes penchent pour l'émission de nouveaux billets. Mais cette décision peut avoir des effets pervers : le délit d'initié, le détournement de l'opération ou la transformation de cet argent en devises sur le marché parallèle. Il convient donc de révolutionner les mentalités, de rétablir la confiance et de débureaucratiser les banques. Autant de conditions nécessaires mais insuffisantes. L'une des solutions pour tarir l'argent de l'informel est de moderniser le fonctionnement du système financier algérien. Il se caractérise par la prédominance de la monnaie fiduciaire (billets, monnaies) sur la monnaie scripturale (chèques, cartes de retrait et de paiement). Tant qu'on n'aura pas inversé la tendance, la bulle de l'argent de l'informel continuera à enfler démesurément.