Résumé : Nabil ramène deux sandwichs et exhorte Nawel à partager son déjeuner. Cette dernière accepte et mange de bon appétit. Il tente de lui soutirer quelques renseignements sur son passé, mais elle refuse de parler d'elle. Il lui révèle qu'il était expert-comptable, et elle lui confie qu'elle allait prendre un poste de rédactrice en chef. Elle se rendit compte soudain qu'elle avait passé tout son temps à discuter avec cet homme qu'elle n'avait rencontré que brièvement lors des deux week-ends où elle était venue à la plage. Elle relève la tête et lance sans réfléchir : -Tu es marié Nabil ? Elle remarque la lueur qui passe dans son regard et se mord les lèvres. Il semblait un peu contrarié mais répondit : -Je l'ai été pendant douze ans. -Ah ! Et tu ne l'es plus ? -Non. Cela fait cinq années que nous nous sommes séparés mon ex-femme et moi. Elle s'est installée en France. Je ne l'ai plus revue. -Des enfants ? -Oui. Deux. Un garçon et une fille. Ils ont respectivement 15 et 13 ans. Elle baisse les yeux et lance d'une voix émue : -Je suis désolée Nabil d'avoir réveillé en toi de douloureux souvenirs. -Ce n'est rien. J'ai pu remonter la pente depuis longtemps. Ma mère s'occupe de mes gosses et moi je travaille et je tente de vivre le plus normalement possible. Je voyage, je rencontre beaucoup de gens, je programme des sorties avec les enfants. Moi aussi j'ai touché le fond. Mais j'ai tout de même su rebondir. -Vraiment désolée Nabil. Je ne pensais pas que tu étais aussi malheureux. -Ce n'est rien Nawel. Toi aussi tu as souffert. Cependant, tu ne veux pas extérioriser ton mal. Elle baisse les yeux : -Ce souvenir m'étouffe. -Raison de plus pour le cracher. Soudain, il se lève et ramasse les restes de leur déjeuner. Il met le tout dans un sac en papier et lance : -Je suis là à discuter comme une pie depuis mon arrivée, alors que tu dois avoir envie de faire quelque chose d'autre. -Je n'ai rien prévu. -Une lecture. Une petite sieste peut-être Elle se rendit compte que lui aussi avait peut-être prévu un autre programme : -Je vais essayer de faire un petit somme. Je t'ai assez monopolisé pour aujourd'hui. Nous sommes déjà au milieu de l'après-midi. Il sourit : -Monopolise-moi davantage alors. Tout le plaisir a été pour moi de te découvrir Nawel et d'entamer ces discussions aussi intéressantes qu'agréables. Il s'éloigne de quelques pas : -À tout à l'heure. Tente de te reposer un peu. Elle le regarde partir vers la mer. Il se met à marcher le long du rivage et taquine quelques pêcheurs qui rafistolaient leurs filets sur la plage. Elle soupire. Cela faisait bien longtemps qu'elle n'avait pas été aussi bavarde, surtout avec un inconnu. Mais elle avait l'impression qu'il ne l'était plus pour elle. Bien au contraire, on dirait qu'elle avait toujours connu cet homme. Qu'elle l'avait toujours côtoyé. Il émanait de lui quelque chose de sûr et de sincère. Des qualificatifs qu'elle avait gommés de son vocabulaire depuis des lustres, et surtout envers le sexe opposé ! Elle prend une revue dans son sac et s'allonge pour la feuilleter. Un petit vent frais se lève et elle frisonne avant de mettre une écharpe sur ses épaules. Elle ferme les yeux, et son cerveau lui renvoie des images de son passé. Pourquoi ne pouvait-elle pas affronter les spectres de son malheur et les effacer de son subconscient une fois pour toutes. Son psy lui avait dit qu'elle n'avait plus besoin de ses services. La thérapie résidait en elle. Elle devrait prendre son destin en main. Se confier, vivre le présent et oublier son passé. Lorsqu'elle ouvrit les yeux, elle constata que le jour commençait à décliner. Nabil n'était pas revenu. Elle se verse un café, avant de se mettre à ramasser ses affaires. Elle aurait voulu revoir cet homme qui savait apaiser ses craintes. Où pouvait-il être ? (À suivre) Y. H.