Le dernier attentat-suicide, qui a visé un bus de la sécurité présidentielle au cœur de Tunis, a donné le coup de grâce à l'économie tunisienne, fortement dépendante de l'industrie touristique. La Tunisie se dirige vers la formation d'un nouveau gouvernement, dont les membres seront drastiquement réduits, pour sortir de l'impasse sécuritaire, dans un contexte marqué par une aggravation de la crise au sein de Nidaa Tounes, le parti au pouvoir du président Béji Caïd Essebsi. Si le Premier ministre Habib Essid a évoqué un éventuel remaniement d'un gouvernement qualifié de "pléthorique", les véritables raisons de ce remue-ménage au sommet de l'Etat sont plutôt à chercher dans l'instabilité sécuritaire qui a directement affecté l'activité économique. L'attentat du musée du Bardo en mars, suivi par l'attaque contre un complexe touristique à Sousse et l'attentat-suicide contre un bus de la garde présidentielle au cœur de Tunis ont détruit tous les espoirs fondés sur la relance du secteur du tourisme qui représente plus de 7,4% du produit intérieur brut (PIB), soit l'équivalent de 2,63 milliards d'euros, selon les derniers rapports de la Banque mondiale et des organismes spécialisés dans le domaine. En 2014, il employait près d'un demi-million de personnes directement ou indirectement, soit 12% de la population active, selon les mêmes estimations. Avec l'explosion d'un bus de la sécurité présidentielle, mardi dernier, provoqué par un kamikaze qui a tué 12 gardes nationaux et blessé au moins une vingtaine de personnes, le gouvernement du président Essebsi ne sait plus quoi faire pour éviter l'aggravation d'une crise socioéconomique que le terrorisme n'a fait finalement qu'accélérer. Pis, la guerre déclarée au sein du parti au pouvoir Nidaa Tounes fragilise davantage l'autorité du président, dont l'implication a été dénoncée par de nombreux militants et cadres de son mouvement. Hier encore, un des responsables de Nidaa Tounes, Mohsen Marzouk, est revenu à la charge. Sur sa page facebook, Mohsen Marzouk a déclaré qu'"il est temps pour moi de prendre une décision douloureuse mais indispensable sur le plan politique", ajoutant que la gravité des problèmes que vit Nidaa Tounes, dont il est le secrétaire général, l'oblige à prendre une décision. Il a également annoncé la tenue d'une rencontre avec les militants et cadres du parti pour les informer de la situation. Cette crise interne qui risque de conduire à l'éclatement de Nidaa Tounes et de faire perdre la majorité au Parlement, au profit des islamistes d'Ennahdha, a eu beaucoup d'effets sur le gouvernement d'Essebsi. Aujourd'hui, le président tunisien est face à des choix cruciaux pour sortir de l'impasse politique. Mais la donne sur le terrain joue en sa défaveur, surtout après avoir réinstauré l'état d'urgence sur l'ensemble du territoire et le couvre-feu dans le Grand Tunis. Aussi, la fermeture provisoire de la frontière terrestre avec la Libye, pour empêcher toute infiltration terroriste en Tunisie, a provoqué une flambée des prix dans le sud-est et l'extrême sud du pays, sans compter le nombre important de Tunisiens qui ne peuvent plus se rendre en Libye où ils ont plus de chance de trouver un emploi, en dépit de la guerre qui ravage ce pays depuis 2011 et le risque d'enlèvement auquel ils sont exposés. L.M.