Résumé : Nawel quitte promptement le restaurant et Nabil la suit. Elle voulait rejoindre son véhicule pour éviter de se donner en spectacle. La crise la prenait de court, et de longues larmes ruisselaient sur son visage. Nabil la raccompagne et monte à côté d'elle sur le siège arrière. Elle est confuse. Elle ne voulait pas montrer sa faiblesse. Nabil la rassure. Elle secoue la tête : -Cela ne veut rien dire. Disons que je cherche plutôt refuge à mes maux. -Tu peux raconter ce que tu veux. Il faut être doté d'un sacré caractère pour faire face à ses angoisses. Quelqu'un les avait comparées à un tourbillon dans une mare profonde. Ou on s'en sort, ou on se noie, avait-il écrit. Et ce ne sera jamais ton cas, car tu t'en es déjà sortie. -Pas encore. -Si. Tu es déjà hors de danger. Ces quelques bribes sont dues plus à ta fatigue morale qu'à autre chose. Tu veux que je te raccompagne chez toi ? Tu devrais te mettre au lit sans tarder et dormir sans demander ton reste. Elle se reprend et se redresse sur son siège : -C'est bon. La crise est passée, je peux conduire. Je vais rentrer tout de suite. -Très bien. Il se penche et l'embrasse : -Je n'ai alors qu'à te souhaiter une très bonne nuit. Il descendit et elle s'installe devant le volant. Avant de démarrer, elle baisse la vitre et lance : -Nabil, tu es un homme exceptionnel. Sans lui laisser le temps de répliquer, elle enclenche la vitesse et démarre en trombe. Salima dormait dans sa chambre, mais la télévision était encore allumée au salon. Elle avait surement dû la laisser à son intention. Nawel se dit que sa sœur pensait à tout et prenait en considération toutes ses préoccupations. Elle n'aimait pas tâtonner dans le noir, et Salima n'aimait pas laisser les lumières du couloir allumées. Alors elle avait mis le téléviseur en marche pour la guider. Elle se dirige vers sa chambre et allume la lumière avant de retourner au salon pour éteindre l'écran télé. Un bruit la fit se retourner : -Tu es rentrée enfin. Jamais tu n'as veillé autant depuis des années. Salima se tenait sur le seuil du salon. Nawel sourit et s'approche d'elle : -Je voulais fêter ma reprise au boulot. -Dois-je comprendre que ta journée a été bonne ? -Très. J'ai beaucoup apprécié la nouvelle équipe. Le bureau a été repeint et relooké. Tout est neuf. -Toi aussi (elle rit). Tu es belle dans ce tailleur rose de bois. Tes cheveux sont bien coiffés. On dirait une nouvelle mariée. -Voyons Salima ! J'ai dépassé l'âge de toutes ces rêveries. Je peux toutefois t'assurer que j'aime mon travail. J'ai eu tort de m'éloigner de la rédaction aussi longtemps. -Et tu es restée dans ton bureau jusqu'à cette heure-ci ? La question la prend au dépourvu, mais comme elle ne voulait pas encore mettre sa sœur au courant de sa récente relation avec Nabil, elle se reprend pour répondre : -Non. J'ai rencontré quelques anciens collègues qui m'ont invitée à dîner. -Tiens ! Tu acceptes les invitations maintenant ? -Oui... Je me suis bien rendue au mariage de notre voisine. -Ce n'est pas pareil. Nardjesse habitait à côté. Mais de là à penser que tu allais accepter de dîner dehors, l'affaire me paraît un peu... bizarre. Nawel ébauche un sourire : -Ne penses-tu pas qu'il est grand temps pour moi de penser à sortir de ma coquille ? -À qui tu le dis ! Depuis le temps que nous sommes derrière toi, Mourad et moi et même le reste de la famille, afin que tu sortes, que tu t'amuses, que tu rencontres des gens. Ah ! Nawel comme je suis heureuse pour toi. Tu devrais continuer sur ta lancée et programmer davantage de sorties. Tu as passé une bonne partie de ton existence à te morfondre dans ta chambre. Je n'aimais pas trop ça ! Nawel prend sa sœur par les épaules : -Alors tu m'encourages à veiller tous les jours dehors ? -À veiller ? Pas seulement. J'aimerais que tu te rendes à des fêtes, que tu danses, que tu chantes. Il faut te débarrasser des spectres de ce passé qui te colle à la peau et qui te chagrine et te rend mélancolique. Tu es encore jeune Nawel. Peut-être rencontreras-tu quelqu'un qui saura t'aimer et te respecter comme tu le mérites. (À suivre) Y. H.