Pour sa première sortie, le nouveau président a annoncé ses priorités, le défi du développement, donc économique, et le défi diplomatique à travers une "remise sur orbite" des relations étrangères du pays. Le Burkina Faso a un nouveau président, le premier président démocratiquement élu, lundi, au premier tour d'un double scrutin présidentiel et législatif. La majorité des cinq millions d'électeurs a choisi le candidat Roch Marc Christian Kaboré du Mouvement du peuple pour le progrès (MPP) qu'il avait créé après avoir quitté le parti majoritaire, le Parti pour la démocratie et le progrès, en janvier 2014. Soit moins d'une année avant la chute du président Blaise Compaoré dont il était le compagnon pendant des années. En effet, le président Kaboré a été dans la plupart des gouvernements de Compaoré où il avait occupé plusieurs postes ministériels, y compris celui de Premier ministre, président de l'Assemblée nationale pendant 11 ans, avant de le quitter, en 2014, en sentant, certainement, venir son coup de force pour amender la Constitution, dont il était l'initiateur. Une proximité qui, logiquement, au vu de l'insurrection, du coup d'Etat, devait apporter une sanction des urnes. Et c'est l'inverse qui s'est produit avec son élection, au premier tour, avec 53,45% des voix. Est-ce pour autant le choix d'un retour à la sinistre ère Compaoré ? Ce résultat peut s'expliquer par le fait que le candidat qui a longtemps été dans les institutions de l'Etat et dans le parti majoritaire, le CDP, a pris le soin de prendre ses distances à la fois vis-à-vis du parti et du président Compaoré avec lesquels, il a passé pas moins de 26 ans. En créant son propre parti, un mouvement socio-démocrate, il s'est rapproché des partis (petits partis) socialo-sankaristes. Position qui l'intègre dans l'opposition qui a, par la suite, accompagné l'insurrection populaire d'octobre 2014, qui a conduit à la chute de Compaoré, au pouvoir pendant 27 ans. Une rupture qui a fini par payer. Il a été élu haut la main, au premier tour, parmi 14 candidats dont 2 femmes. Dès la proclamation des résultats, le nouveau président a, dans un discours improvisé, rendu hommage aux martyrs de l'insurrection qu'il a qualifiés d'ailleurs de "combattants de la liberté et de la démocratie". Un geste qui veut dire que la page Compaoré est définitivement tournée. Et de décliner sa feuille de route de "l'espoir" autour de laquelle doivent se rassembler tous les Burkinabés. Un président rassembleur même si certains émettent des réserves, comme le syndicat qui l'accuse d'être un des artisans du système Compaoré. Et donc, autant coupable que le président déchu. "Nous devons nous mettre au travail immédiatement. C'est tous ensemble que nous devons servir le pays", a annoncé le président Kaboré en affichant "aux jeunes, aux femmes et aux anciens sa détermination pour ouvrir des opportunités de lendemains meilleurs". Pour sa première sortie, le nouveau président a annoncé ses priorités, le défi du développement, donc économique, et le défi diplomatique à travers une "remise sur orbite" des relations étrangères du pays. il lui reste, cependant, le lourd héritage de l'ancien régime, sa sombre page des exécutions et le coup d'Etat contre le président Thomas Sankara dont le dossier a ressurgi, rouvert par la justice et le président de la transition, lui-même victime d'une tentative de putsch, en septembre 2015, qui a ordonné l'ouverture d'une enquête. Une phase incontournable pour tourner la page Compaoré, selon la famille Sankara. D. B.