La mort du père de l'opposition démocratique algérienne, Hocine Aït Ahmed, s'est propagée telle une traînée de poudre à Oran qui se souviendra toujours de celui qui a pris une part active aux préparatifs du braquage de la Grande-Poste d'Oran. "Les Oranais éprouvent du respect pour Si Hocine qui fut et restera un grand chef historique du mouvement de libération du pays", a affirmé Yahia, un ancien militant du MTLD. Jeunes et moins jeunes, les Oranais lient la mémoire de Hocine Aït Ahmed à l'histoire contemporaine de la ville, notamment à l'attaque de la Grande-Poste d'Oran, le 5 avril 1949, mais aussi à son long parcours d'homme politique "intègre et respectueux de ses principes". Assis sur les marches de la bibliothèque de la place de la Kahina, ils étaient nombreux à évoquer le souvenir indélébile d'un homme resté fidèle à ses idéaux depuis 1946. "Nous avons été surpris par la disparition de Si Hocine qui incarnait à nos yeux un homme d'honneur qui n'a jamais failli à l'esprit de la déclaration du 1er Novembre 1954 pour laquelle lui et des milliers d'Algériens se sont sacrifiés", observe la gorge nouée, ammi Adda, un militant de la cause nationale de la première heure. Intellectuel et homme militaire, Hocine Aït Ahmed a gagné ses lettres de noblesse dans le hold-up de la Grande-Poste d'Oran qui a été pensé par l'Organisation spéciale (OS), branche armée du Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques (MTLD). Selon le moudjahid et historien Mohamed Benaboura, l'attaque avait pour but de "réunir les fonds nécessaires afin de déclencher dans les meilleures conditions la lutte de libération armée". Ont participé à cette opération, Hocine Aït Ahmed, Ahmed Ben Bella, Hamou Boutlelis, les frères Lounès, Omar Khettab, Belhadj Bouchaïb (Si Ahmed), Mohamed Khider avec la collaboration de Djelloul Nemiche, un employé de la Grande-Poste d'Oran. Cette action d'envergure, qui s'est déroulée en plein centre-ville d'Oran, a permis à ses auteurs de s'emparer d'une somme de 3,178 millions d'anciens francs. Au cours des anniversaires commémorant chaque année cet événement marquant, des militants, des personnalités politiques, des historiens et des universitaires insistent sur la nécessité de sensibiliser les jeunes générations à s'intéresser à l'histoire de la Révolution algérienne et de ses figures remarquables, à l'image de Hocine Aït Ahmed. "Je reste attaché au combat perpétuel que le défunt a mené contre le colonialisme français et pour l'instauration d'une véritable démocratie en Algérie sur la base d'une Assemblée constituante comme il n'a cessé de le réclamer depuis l'indépendance en 1962", témoigne un jeune militant du FFS à Oran. Dans notre quête d'en savoir un peu plus sur la place qu'occupait Hocine Aït Ahmed dans le cœur des Oranais, un octogénaire bon pied, bon œil nous a fait la confidence suivante : "Je suis un ancien membre du MTLD puis du FLN, benbelliste convaincu, détenu de 1958 à 1962 à la prison d'Oran pour mes activités politiques, j'ai été exclu des rangs du FLN parce que j'ai apporté mon soutien à Hocine Aït Ahmed pour l'élection d'une Assemblée constituante." Pour de nombreux Oranais, la mort de Si Hocine dans une conjoncture particulière est synonyme de perte majeure. Depuis l'annonce du décès, mercredi, à Genève (Suisse), du leader politique algérien, de nombreux Oranais n'ont pas attendu un édit officiel pour faire le deuil d'un grand militant nationaliste. K. R.-I.