L'année 2015 s'est achevée avec une situation économique caractérisée par des indicateurs macroéconomiques au rouge (déficit budgétaire, balance commerciale déséquilibrée, une chute du solde du FRR.... ) et une économie réelle peu compétitive, un marché désorganisé et dominé par l'informel. Les mauvais classements de l'économie algérienne dans les différentes publications internationales complètent ce tableau. Face à une telle a conduit le gouvernement à agir au double plans, budgétaire et institutionnel à travers les lois de finances. Mais ni la LFC 2015 ni la LFI 2016 n'ont apporté des solutions originales et innovantes aux problèmes structurels de l'économie algérienne. Le code des investissements a, beaucoup plus, mis de l'ordre dans les dispositions dispersés dans plusieurs textes en retirant certaines et en simplifiant d'autres, que de définir une nouvelle vision de l'investissement productif. Les actions des pouvoirs publics s'apparentent beaucoup plus à un traitement financier des problèmes constatés qu'à une adaptation au nouveau contexte qui sera caractérisé par un niveau de prix des hydrocarbures bas, une compétition internationale de plus en plus marquée et au niveau local par une demande sociale en croissance. L'utilisation des ressources du FRR pour combler les déficits a été le levier principal du gouvernement. Cette démarche ne pourra pas être poursuivie sur le moyen et le long termes ; c'est pourquoi une approche plus volontariste d'adaptation de l'économie nationale au nouveau contexte eut été plus indiquée. Il faut espérer que l'année 2015 clôt une période d'absence de vision économique qui dure depuis 2008 ; pour preuve la LFC (2009) a introduit des dispositions qui ont plombé l'économie nationale dans une rigidité entretenant le statu quo et l'immobilisme dont la plus médiatique est le 49/51. La LFI 2016 vient renforcer ces dogmes par le fameux article 62 qui ne fait que reprendre un article de la LFC 2009. Ces deux dispositions expriment une certaine frilosité des décideurs en ne s'affranchissant pas d'une certaine idéologie articulée à des principes de souveraineté et d'indépendance nationale. C'est le marché et les stratégies sectorielles qui décident du niveau de participation du capital privé et/ou étranger au capital d'une EPE. Y aurait-il des investisseurs privés pour prendre moins de 67% dans une EPE ? Alors que certaines EPE devraient être privatisées à 100%. Pour 2016, les dispositions annoncées pour l'amélioration du climat des affaires et la promotion de l'investissement ne sont pas suffisantes si l'on considère la structure productive de l'économie, sa compétitivité, son retard technologique et ses rigidités institutionnelles. En effet, simplifications administratives n'est qu'un aspect du climat des affaires, l'essentiel pour ce dernier est l'ensemble des mesures concrètes liées à l'accès aux ressources rares comme le foncier industriel, le financement des entreprises et la régulation des marchés. Les problèmes de l'économie algérienne sont structurels et ne peuvent être traités que par des mesures fortes dépassant le cadre d'une disposition dans une LF. Ce qui est attendu en matière de climat des affaires, c'est surtout la production de la confiance dans le système économique qui encouragera la prise de risque par les investisseurs et des engagements à long terme. La production de la confiance est l'affaire des institutions, au sens large, qui garantissent une stabilité du cadre réglementaire, qui régulent les marchés et qui rendent transparentes les décisions publiques, en particulier en matière d'allocation des ressources publiques. L'année 2016 connaîtra certainement une inflation, surtout du fait de la dépréciation du dinar que des nouvelles taxes sur certains produits introduites par la LF, comme l'énergie et les carburants. Un taux de change élevé du dinar favorise, en principe, les IDE et limite les investissements des résidents. Mais les IDE sont contraints par le 49/51. Au-delà de l'investissement proprement dit, ce sont les conditions d'exploitation qui, dans le contexte actuel, seront encore plus difficiles avec le niveau actuel du taux de change, car l'économie algérienne est faiblement intégrée ; selon une étude, 1 DA de PIB en 2000 nécessitait 0,23 DA d'importation, le même dinar nécessite 0,46 DA en 2013, soit le double. Le taux de change parallèle qui a atteint des niveaux inimaginables joue le rôle d'une variable d'ajustement et d'arbitrage entre l'investissement, l'importation et le placement dans une monnaie plus sûre. Par qui est alimenté le marché parallèle en monnaie étrangères ? Voici quelques pistes qui auraient pu amorcer la véritable transition de l'économie nationale pour sortir de sa dépendance aux hydrocarbures et son adaptation au nouveau contexte de l'économie mondiale. La diversification de l'économie est devenue le leitmotiv de la transition, mais c'est le mode opératoire qui compte le plus : 1- faire de l'économie numérique le facteur et le levier d'une transformation du système productif et de rattrapage de la compétitivité des entreprises ; 2- cibler des filières porteuses et les encadrer par un contrat-programme sur les incitations, l'innovation, l'exportation... ; 3- engager une vraie réforme de l'Etat dans ses dimensions territoriale (décentralisation), de gouvernance (institutions de planification, de concertation, de contrôle) et de modernisation (service public, transparence, accessibilité, simplification...). Le tout doit converger vers une rupture progressive avec les schémas traditionnels de gestion de l'économie : plus de liberté d'entreprendre, meilleur ciblage des incitations et plus de marché (moins d'administration) dans l'allocation des ressources publiques. M.-C. B. (*)Professeur en management et économie institutionnelle