Mohamed Réda Meziane, fils aîné de l'ancien P-DG de Sonatrach, Mohamed Meziane, s'est bien rendu en Allemagne à la recherche d'un contrat de consulting avec Funkwerk Plettac, mais sa demande a eu une fin de non-recevoir parce qu'il était le fils du P-DG. Les règles internes de l'entreprise interdisent l'engagement des parents des managers d'entreprises clientes. Le procès de l'affaire Sonatrach I se poursuit au tribunal criminel d'Alger qui a auditionné, hier, les représentants des entreprises poursuivies pour les délits de majoration des prix et corruption dans le cadre de cette affaire, à savoir Contel Algeria, Funkwerk Plettac, le groupement Contel Funkwerk et Saipem Contracting Algeria. Les quatre entreprises Saipem Contracting Algeria Contel Algeria, Funkwerk Plettac, le groupement Contel Funkwerk ont nié, à travers leurs représentants, toutes les accusations, fournissant au tribunal criminel, et en l'absence d'une expertise en mesure de le prouver, des explications techniques minimisant l'importance du différentiel entre leurs offres et celles des concurrents. Galli Poli, DG et représentant de Saipem Contracting Algeria, poursuivi uniquement pour majoration des prix, a été le premier auditionné. Il a affirmé que le prix contractuel pour la réalisation du troisième lot du gazoduc reliant Hassi R'mel à El-Kala allant d'Aïn Djasser à Koudiat Draouche avec une bifurcation vers Skikda (585 millions d'euros pour 356 km) était plus que raisonnable, expliquant que le tracé du troisième lot du gazoduc était des plus difficiles avec des massifs montagneux à traverser et des zones inondables à renforcer et ce, dans une région à risque d'un point de vue sécuritaire. "Nous ne pouvions pas travailler la nuit et nous avons dû renforcer les équipes qui travaillaient le jour d'autant qu'il y avait près de 600 étrangers parmi les 3 500 travailleurs engagés sur les chantiers, qu'il fallait escorter", a-t-il souligné. À la question de savoir pourquoi Saipem a accordé une réduction de 15% à Sonatrach si le prix n'était pas exagéré au départ, Galli Poli a eu cette réplique : "Nous avions supprimé le facteur risque de notre structure du prix malgré la menace ambiante juste pour ne pas altérer notre partenariat avec Sonatrach avec laquelle nous avons des intérêts stratégiques. Sinon, l'insécurité a eu un impact certain dans l'exécution des travaux et donc sur le coût". Au sujet de Mohamed Réda Meziane, Galli Poli a indiqué qu'il percevait un salaire de la part de sa compagnie. "Je confirme qu'il touchait un salaire parce qu'il y avait des traces dans la comptabilité de l'entreprise mais, je ne sais rien sur les 400 millions que lui aurait prêtés Tullio Orsi, mon prédécesseur, ni les frais de son mariage en Tunisie. Cela s'inscrirait, éventuellement, dans un cadre privé", a-t-il déclaré. Le représentant du groupement Contel Funkwerk, Thomas Thalhammer, DG du groupement, a rappelé que le groupement n'était qu'une structure administrative temporaire qui avait pour but de gérer le projet pour le compte des deux partenaires Contel Algeria et Funkwerk Plettac ; il n'a donc pas de capital pour distribuer les dividendes et être en mesure de corrompre. Et de souligner que les prix ne sont pas exagérés. "On ne peut comparer les prix des équipements utilisés avec ceux pratiqués par d'autres concurrents parce que ce ne sont pas des équipements standardisés, mais qui ont été conçus pour les besoins de Sonatrach. Certains équipements sont très sensibles et sont soumis à autorisation d'exportation par l'Etat allemand. D'autant qu'ils répondent aux normes les plus exigeantes en la matière parce que Sonatrach était dans une logique mieux disante et non pas moins disante", a-t-il indiqué. Il a dit ne rien savoir sur le résultat de ce partenariat entre les deux entreprises en termes des bénéfices réalisés : "Le groupement ne fait pas de bénéfices, il sert d'interface entre Sonatrach et les deux partenaires, il leur transfert un chiffre d'affaires en facturant les prestations de chacun. Et chacun des partenaires comptabilise ce qu'il gagne à son niveau." Le représentant Contel Algeria s'est limité à énumérer les prestations fournies par son entreprise, du génie civil notamment, essayant de convaincre le tribunal que Contel Algeria était une entreprise expérimentée. Celui de Funkwerk Plettac, Matthias Bierling, lui, a répondu aux questions quant à la relation de Mohamed Réda Meziane avec son entreprise. Il a révélé que Funkwerk Plettac s'est bien renseignée sur Sonatrach et son management, et ce, dès son engagement à équiper ses installations industrielles. "Nous connaissions les noms des fils du P-DG même si nous ne les avions jamais vus et nous ne pouvions signer de contrats avec eux parce que les règles de l'entreprise l'interdisent", a-t-il dit, en racontant sa première rencontre avec Mohamed Réda Meziane à Nuremberg lors d'un dîner en août 2008 auquel Djaâfar Al-Ismaïl était convié. "Je ne lui ai pas adressé la parole ce soir-là parce que je regardais un match. Il nous a rejoints un peu plus tard et il a eu une discussion en aparté avec un de mes collègues. J'ai su auprès de ce collègue qu'il était venu à la recherche d'un contrat de consulting et que sa demande a eu une fin de non-recevoir. Mes collègues savaient qu'il était le fils du P-DG de Sonatrach, même s'il ne s'était pas présenté comme tel", a indiqué Matthias Bierling. Dans sa confrontation avec lui, Mohamed Réda Meziane a déclaré ne jamais avoir rencontré Matthias Bierling et qu'il s'est plutôt présenté comme le fils du P-DG de Sonatrach. Quant au contact établi avec Sonatrach, Bierling a précisé que c'était par le biais de Djaâfar Al-Ismaïl. "Il est venu en Allemagne prospecter le marché à la recherche d'une entreprise en mesure de fournir des équipements de télésurveillance pour la sécurisation des installations de Sonatrach. Mais, c'était Sonatrach qui avait exigé que nous soyons une partie contractante dans le contrat et non pas un simple sous-traitant", a-t-il conclu. Lyas Hallas