Les déclarations des accusés Mohamed Réda Djaâfar Al-Ismaïl et des Meghaoui père et fils n'ont pas levé le mystère sur la relation de l'ancien P-DG du CPA (1998-2005) avec le patron de Contel Algeria qui avait une autre société, la Sopit, laquelle a bénéficié des marchés d'équipement en réseaux informatiques d'environ soixante-dix agences de cette banque publique, soit près de la moitié de ses agences à l'époque. L'audition du dernier accusé des personnes concernées par les marchés attribués par Sonatrach aux Allemands de Funkwerk Plettac, à savoir Lyes Yazid Meghaoui, fils de l'ancien P-DG du Crédit populaire algérien (CPA), poursuivi pour constitution d'association de malfaiteurs, corruption, participation dans la dilapidation de deniers publics et blanchiment d'argent, n'a pas levé les zones d'ombre quant à son implication ainsi que celle de son père dans l'affaire Sonatrach. Cet ancien salarié de la filiale transport routier de l'entreprise Contel Algeria, chargé du démarchage des entreprises activant au sud du pays, notamment la SNTR, et les compagnies pétrolières, devenu actionnaire de la Holding Contel créée en 2008 pour coiffer les activités de Contel Algeria celles que les actionnaires aspiraient à développer à l'époque avant l'éclatement du scandale comme l'agriculture, la construction et l'exploitation des mines, n'a, en tout cas, pas pu justifier un virement de 27 millions de dinars effectué par Contel Algeria sur son compte domicilié à l'agence Hydra de BNP Paribas. Ni d'expliquer ses prestations dans le cadre du contrat de consulting qui le liait à l'entreprise allemande Funkwerk Plettac pour lesquelles il a reçu la somme de 230 000 euros sur son compte à Société générale à Paris à raison de 8 000 euros par mois. Les réponses de Meghaoui fils s'inscrivent donc dans la même stratégie de défense du père, l'ancien P-DG du Crédit populaire algérien (CPA) El-Hachemi Meghaoui, poursuivi, entre autres, pour constitution d'association de malfaiteurs, corruption et blanchiment d'argent et auditionné avant-hier. El-Hachemi Meghaoui, avait, pour rappel, nié toute relation antérieure à 2007, date de son engagement comme consultant avec Contel Algeria avant de devenir actionnaire dans la Holding Contel. Et il a minimisé les sommes qu'il percevait de la société Funkwerk Plettac sur ses comptes à l'étranger. Les avocats de la partie civile relancent le débat sur les infractions au change Les questions des avocats et ceux du représentant du ministère public ont poussé dans le sens de savoir s'il y a plutôt délit d'initié dans l'attribution par Sonatrach des cinq marchés à Funkwerk Plettac et si elle a été planifiée de manière à permettre aux fils de Mohamed Meziane et aux cadres de Sonatrach de toucher des commissions à travers l'entreprise Contel Algeria. Et aussi de savoir s'il y a des surfacturations visant les transferts illicites de devises à l'étranger, aussi bien par l'entreprise allemande que par son partenaire algérien. "Comment avez-vous su que Sonatrach s'apprêtait à équiper ses sites industriels par des systèmes de télésurveillance ?", a ainsi demandé le représentant de Sonatrach au patron de Contel Algeria, Mohamed Réda Djaâfar Al-Ismaïl. "Pourquoi et à quel moment avez-vous décidé de changer de partenaire et d'opter pour Funkwerk Plettac, sachant que l'offre que vous avez présentée au début avec l'aide du fils du P-DG de Sonatrach portait sur les solutions de TVI Lederer et non pas de Funkwerk ?", a interrogé un autre avocat. Me Abdelmadjid Silini, constitué également pour Sonatrach, lui, a soulevé des interrogations liées aux faveurs accordées à Funkwerk Plettac notamment en matière de gestion des retards dans l'exécution des travaux. "Ce groupement Contel Funkwerk Plettac et contrairement aux autres sociétés ayant bénéficié de marchés du même type dans le cadre de la même procédure de passation des marchés, n'ont payé aucune pénalité de retard malgré les avenants décidés pour la prorogation des délais de réalisation de l'ensemble des projets dont il avait la charge. Expliquez-nous ce deux poids deux mesures !", a-t-il asséné. Al-Ismaïl explique que "son groupement n'était pas responsable de ces retards". Dans le même contexte, le représentant du ministère public s'est étonné du "bond" réussi par la société Contel en un laps de temps très court, multipliant son chiffre d'affaires par 20 en quatre ans. Elle est passée, a-t-on indiqué, d'une Sarl au capital social de 100 000 DA louant son siège en 2004 et réalisant un chiffre d'affaires avoisinant les 100 millions de dinars en une SPA au capital social de 20 millions de dinars, et au chiffre d'affaires de l'ordre de 3 milliards de dinars en 2008 et multipliant les acquisitions immobilières. Il s'est, par ailleurs, interrogé sur les mécanismes utilisés par la société allemande pour le transfert des devises à l'étranger. "Le contrat de consulting établi au nom de la regrettée Koucem Djreroud (épouse du P-DG de Sonatrach, ndlr) dont vous dites qu'il s'agit d'un brouillon, portait dans son article 7 y compris son numéro de compte et son code swift, c'est donc un contrat en bonne et due forme qui servait à couvrir des mouvements de fonds non ? Je ne vois pas en quoi elle aurait pu conseiller Funkwerk ?", a questionné le représentant du ministère public. Il a conclu sa série de questions en s'interrogeant sur les motivations d'Al-Ismaïl l'ayant conduit à "éliminer" TVI Lederer : "Vous avez éliminé cette société pour laquelle vous avez commencé les démarches auprès de Sonatrach et que vous avez présentée comme étant détentrice du top des technologies en matière de télésurveillance parce qu'elle n'a pas accepté de payer des commissions ?". Et à Al-Ismaïl de se défendre : "Non, mais parce que ses solutions n'étaient pas adaptées aux besoins de Sonatrach." Lyas Hallas