Pour la première fois depuis une décennie, les émigrés ont renoué avec force avec la corniche oranaise et ses plages essaimées tout au long d'un littoral qui s'étire sur 40 kilomètres à partir du port de pêche et de l'ancien fort espagnol Lamoune. Le tronçon routier reliant Oran à la corniche oranaise ressemble à un tortueux boyau tant la circulation y est dense et lente. Pour la première fois aussi, les émigrés n'ont pas lésiné sur les moyens de tourisme et de villégiature. La mode cette année est à la caravane qui a fait son apparition à Oran. Les vacanciers venus de l'Hexagone ont, sans doute, compris la dimension pratique du tourisme ambulant. Selon des chiffres donnés par la cellule d'accueil des émigrés, plus de 200 véhicules aménagés en caravaning-car ont été enregistrés par les services compétents. “Nous avons été un peu surpris par le nombre des caravanes qui ont débarqué au port d'Oran. Nous avons toujours été habitués à l'enregistrement des véhicules de tourisme, en même temps que des passagers et des divers objets”, a indiqué un douanier de la zone voyageurs du port d'Oran comme pour expliquer cette “invasion”. Cette nouveauté réside dans la praticabilité de la caravane qui offre de multiples débouchés en matière de tourisme dit libre. “Nous avons compris tout l'avantage que nous pouvons tirer du caravaning-car. Car, en plus de la mobilité, nous pouvons cuisiner et dormir dans notre caravane tout en parcourant des milliers de kilomètres à travers l'Algérie”, a affirmé Abed, un émigré algérien vivant à Périgueux (Bordeaux) depuis plus de 25 ans. Avec sa femme et leurs trois enfants, Abed a choisi de sillonner le littoral algérien, en faisant des haltes touristiques dans les plages qu'il a minutieusement choisies avec sa petite famille. Abed n'est pas le seul émigré à avoir opté pour cette option “new wave”. Salah, lui, est venu de la ville de Clifftonville, dans le sud de l'Angleterre. Dans sa caravane haut standing qu'il nous fait visiter, tout y est : douche, toilettes, cuisine équipée, chambre à coucher et lits en gigogne pour ses deux enfants âgés de 11 et 8 ans. Originaire de Saïda, Salah nous invite à déguster un délicieux pudding préparé par son épouse Patricia qui découvre pour la première fois l'Algérie. “Salah me parle toujours de l'Algérie, mais, franchement, je vous avoue que j'ai été surprise en débarquant au port d'Oran. Les gens sont spontanés et hospitaliers. Votre pays est beau et vos plages sont magnifiques”, dira Patricia sur un ton chargé d'émotion. Seule fausse note dans ce décor de farniente, la quasi-absence des campings, une tare lourde de conséquences pour le secteur du tourisme en perpétuelle mutation à Oran. Ainsi se dessine une nouvelle “carte” touristique qui risque de prendre à revers les responsables en charge du dossier d'infrastructures liées à ce type de tourisme. Situé à El Ançor, un espace dunaire, dépourvu de structures d'accompagnement, constitue l'unique aire de stationnement pour les caravanes en mal d'espace. Bachir, un émigré de 45 ans, est un “habitué” de ces lieux. C'est la troisième année consécutive qu'il vient avec sa famille à El Ançor. “L'inexistence de l'eau courante, de l'électricité et des lieux d'aisance ne sont pas faits pour encourager le tourisme du caravaning-car ; pourtant, ce moyen de tourisme est appelé à connaître une affluence record d'ici deux ou trois ans”, se désole Bachir. Quoi qu'il en soit, la corniche oranaise continue et continuera de drainer les foules et les vacanciers en grand nombre, même si le kilo de viande coûte 1 000 DA, la pomme de terre à 50 et le kilo de crevette royale à 2 000 DA. Vive les vacances ! B. GHRISSI