Depuis début janvier, les retraités de France et les veuves qui bénéficient des pensions de réversion des caisses françaises vivent une situation d'incompréhension et de panique en raison de l'indisponibilité de devises dans de nombreuses banques à Tizi Ouzou. Les pensions versées le 8 de chaque mois atterrissent entre le 18 et le 20 du même mois au niveau des banques algériennes, nous ont informés les retraités rencontrés devant la Badr d'Azazga. Si, dans le passé, les retraités retiraient leur pension sans plafonnement de la somme, aujourd'hui, ce n'est plus le cas, puisque les devises se font de plus en plus rares dans de nombreuses agences bancaires. Ainsi, à la mi-février, la pension du mois de janvier n'a pas encore été retirée. Chaque matin, des chaînes interminables se forment devant les agences de la wilaya, comme c'est le cas à Draâ Ben Khedda, Draâ El-Mizan, Larbâa Nath Iraten, Aïn El-Hammam ou Azazga. "Nous n'avons plus d'euros pour le moment. Nous attendons des transferts de la Banque centrale", nous a indiqué un banquier, sous couvert d'anonymat. Les retraités, de leur côté, s'inquiètent : "Nous ne vivons que de notre maigre pension. Si ça continue comme ça, nous n'aurons plus rien pour vivre. À moins de s'endetter en attendant de retirer notre argent", dira une veuve titulaire d'une petite pension de réversion. "Depuis trois jours, je prends le bus pour venir retirer ma pension, et à chaque fois, je reviens bredouille", nous dira une autre. De leur côté, les responsables des banques ne savent plus à quel saint se vouer. "Nous comprenons la frustration de nos clients, mais eux aussi doivent comprendre que les petites agences ne sont pas toujours alimentées en devises", nous dira un banquier. Les quotas d'argent disponibles ont été souvent plafonnés pour permettre aux nombreux retraités de disposer de la totalité ou tout au moins d'une partie de la pension car souvent, au bout de quelques heures, l'argent est épuisé au niveau des guichets. Ce manque de devises s'est répercuté sur le marché noir puisque les "cambistes" proposent des bonus alléchants pour attirer les retraités. À 190 DA pour 1 euro, le marché s'enflamme chaque jour. Les retraités préfèrent échanger des petites sommes car le marché ne cesse de grimper. Le dollar canadien affiche lui aussi un pic atteignant les 118 DA pour 1 dollar. Il faut tout de même savoir qu'au niveau de la banque d'Algérie, on reconnaît à demi-mot qu'il y a effectivement un manque de devises en raison de la forte demande constatée ces derniers jours. "Lorsqu'il y a des incertitudes à l'horizon, les gens recherchent toujours un refuge pour mettre leur argent en sécurité, ce qui accentue la tension sur le marché des devises", soulignera un banquier qui estime que cette crise risque de durer. KAMEL NATH OUKACI