L'économiste Abderrahmane Mebtoul estime que le taux d'intérêt retenu dans le cadre de l'emprunt obligataire doit être supérieur au taux d'inflation pour éviter que les ménages ne se réfugient dans l'achat de devises. "Avec un taux d'intérêt de 5%, l'emprunt obligataire que compte lancer le gouvernement, au mois d'avril prochain, est une dette garantie par l'Etat mais supportée par les générations futures." À travers cette opération, le gouvernement veut, estime le professeur Abderrahmane Mebtoul, drainer une fraction du capital argent de la "sphère informelle qui représente 40% de la masse monétaire en circulation et qui occupe 50% de la superficie économique selon les rapports internationaux". En réalité, avoue le Dr Mebtoul, cet emprunt vise les dinars en circulation afin de combler le déficit budgétaire en cas d'épuisement du Fonds de régulation des recettes prévu, au rythme de la dépense actuelle, courant 2017, compte tenu du déficit important souligné dans la loi de finances 2016. L'économiste estime que cette mesure (emprunt) doit s'inscrire dans le cadre d'une plus grande rigueur budgétaire tout en évitant de dépenser sans compter. Pour lui, le taux d'intérêt doit être supérieur au taux d'inflation. "Sinon, les ménages se réfugieront dans l'achat de devises fortes, de l'or ou de l'immobilier, afin de préserver le pouvoir d'achat de leur épargne." Il y a lieu d'éviter le "dérapage accéléré du dinar qui a indirectement un impact à la fois sur les coûts de production des entreprises publiques et privées dont le taux d'intégration ne dépasse pas 15% et sur le pouvoir d'achat des ménages dont les besoins dépendent à 70% de l'extérieur", suggère l'expert. Un dinar dévalué de 30% du fait des taxes fiscales, argue-t-il, arrive aux consommateurs avec une augmentation de plus de 50%. Les ressources engrangées à partir de cet instrument financier doivent servir, insiste l'économiste, au financement des projets d'investissement et non pas à des rémunérations improductives ou des activités rentières. Une telle condition s'applique également pour l'endettement extérieur. Dans une économie productive, toute dévaluation du dinar aurait dû entraîner une dynamisation des exportations hors hydrocarbures. Or le "cours de notre monnaie est passé de 5 DA un dollar en 1970 à plus de 107 DA un dollar en 2015-2016, et l'Algérie est toujours mono-exportatrice à 97% d'hydrocarbures avec les dérivés, alors que le secteur privé représente moins de 1% des exportations totales", constate-t-il. Par ailleurs, Abderrahmane Mebtoul relève la nécessité de synchroniser la sphère financière avec la sphère réelle et de prendre en compte les nouvelles mutations mondiales. La création d'un grand ministère de l'Economie est, selon lui, souhaitable pour éviter tous les dysfonctionnements. Il met l'accent aussi sur le primat de l'économie de la connaissance par la mise en place d'un grand ministère de l'Education nationale et de la Recherche scientifique. B. K.