Le dispositif mis en œuvre pour lutter contre le phénomène de la spéculation a, encore une fois, montré ses limites, ont reconnu les deux ministres. En dépit de tous les moyens, humain et matériel mis en place et les innombrables réunions qui continuent de regrouper leurs cadres, les ministères du Commerce et de l'Agriculture n'arrivent plus à lever les dysfonctionnements qui bouleversent le marché national des denrées alimentaires. Comme à l'accoutumée, au cours de ce mois de Ramadhan, la maîtrise de la situation des prix échappe aux deux départements. Bakhti Belaïb et son collègue Abdeslam Chelghoum, fraîchement installé à la tête du ministère de l'Agriculture, reconnaissent la persistance de ces irrégularités. Le dispositif mis en œuvre pour lutter contre le phénomène de la spéculation a, encore une fois, montré ses limites. "Nous ne nions pas que ce genre de problème persiste toujours", a déclaré, hier, le ministre du Commerce qui promet, toutefois, de poursuivre les discussions avec tous les intervenants, notamment les commerçants et les mandataires, pour trouver des solutions qui arrangent à la fois les agriculteurs et les revendeurs, tout en préservant le pouvoir d'achat du citoyen. La visite vers les marchés qu'il a effectuée avec M. Chelghoum leur a permis de constater de visu la flambée des prix des produits alimentaires et ceux des fruits et légumes. La chaleur suffocante, qui s'est emparée hier de la capitale, a ciblé même la... mercuriale en ce neuvième jour du mois sacré. À la première prise de la température au traditionnel marché d'El-Harrach, le thermomètre affichait une importante hausse. Le premier indicateur de cette "fièvre haussière" des tarifs est révélé par l'abricot proposé, tenez-vous bien, à... 200 DA/kg. La pomme de terre est vendue à 50 DA/kg. Or, ces deux produits agricoles sont cédés dans d'autres espaces commerciaux respectivement à 100 DA et 35 DA... Le prix de l'haricot vert ne descend pas au-dessous des 160 DA/kg alors qu'il est plus au moins accessible ailleurs. Voilà une autre contrainte, et non des moindres, à laquelle est confronté le département de Bakhti Belaïb : des niveaux de tarifs disparates déjà d'une enceinte commerciale officielle (autorisée) à une autre. Que dire alors du marché informel où toutes les pratiques anti-réglementaires sont légion ? La règle voudrait que le marché obéisse, en principe, au mécanisme de l'offre et de la demande. Mais en vain. L'on enregistre, certes, une offre belle et alléchante de divers produits sur les marchés, mais les tarifs qu'on lui adjoint répugnent les citoyens aux petites bourses. Aussi luxuriante soit-elle, cette offre n'a pu avoir raison de la hausse des tarifs. L'offre seule ne règle pas le problème C'est compter sans l'intervention de multiples intermédiaires sur toute la chaîne de distribution qui "entretiennent" la hausse à partir du producteur jusqu'au dernier revendeur. Chaque intervenant s'offre ainsi, de manière unilatérale, une marge bénéficiaire du début jusqu'à la fin du cheminement parcouru par le produit avant d'aboutir au consommateur à des prix inaccessibles. Le ministre du Commerce veut, d'ailleurs s'attaquer à cette épineuse problématique des marges. Il n'exclut pas un recours au plafonnement de ces marges bénéficiaires pour certains produits. "Nous allons associer dans cette démarche les commerçants et les mandataires, et nous devrions dégager des solutions qui arrangeront tout le monde", promet M. Belaïb. Parfois, c'est l'offre qui fait défaut avec l'absence sur le marché des productions en provenance du sud du pays. Car, il est à préciser que cette opulente offre est le fait des producteurs des wilayas du Sud qui continuent d'"approvisionner" le Nord. Cela étant, parfois, comme c'est le cas en ce moment, les agriculteurs de cette région trouvent d'énormes difficultés à entamer la récolte compte tenu du manque flagrant de main d'œuvre. "Quel est l'ouvrier qui oserait accepter l'arrachage et un travail sous des températures qui avoisinent les 50 degrés ?", explique un des mandataires rencontrés au marché des Eucalyptus qui soulève également la contrainte du transport. "Qui est en mesure d'assurer actuellement le transport de ces marchandises des wilayas du Sud vers le Nord ?", s'interroge-t-il. Les deux ministres ont-ils en fait une marge de manœuvre pour plafonner cette... marge bénéficiaire ? B. K.