Le groupe Sonatrach qui s'assimile pour l'instant à toute l'économie algérienne et qui représente 45% du PIB évalué à 172 milliards de dollars en 2015 est un groupe développé. Mais des insuffisances sont constatées du point de vue management, notamment en matière de management stratégique qui, amélioré, permettra certainement de hisser le groupe au niveau de la concurrence mondiale. Le secteur de l'énergie en Algérie qui assure à lui seul 95% des recettes externes et qui contribue à plus de 60% du budget est en train de vivre des moments difficiles. Rien qu'au premier trimestre 2016, les revenus ont chuté de près de 40% par rapport à la même période de l'année 2015, passant de 9,1 milliards de dollars à 5,5 milliards de dollars, principalement en raison de la dégringolade des prix du pétrole depuis deux ans. En analysant de plus près les chiffres de la période 2005-2015, il ressort ce qui suit : une baisse de la production primaire (de 232 MTEP en 2005 à 200 MTEP en 2015, soit 13% en moins), une baisse des exportations (de 141 MTEP en 2005 à 100 MTEP en 2015, soit 29% en moins), alors que la demande interne est en nette augmentation (de 17 MTEP en 2005 à 58 MTEP en 2015, soit une augmentation de 70%) et une hausse considérable en ce qui concerne l'importation des produits pétroliers bien qu'atténuée par la tendance baissière du marché mondial des énergies (4,1 millions de tonnes en 2015 pour un coût de 2,2 milliards de dollars), l'ensemble de ces données chiffrées montre la complexité de l'équation, ajouter à cela une absence totale de stabilité dans le management de Sonatrach, et ce, depuis 2010 avec la multiplication des scandales qui n'ont fait que ternir son image "no more no less". En matière de gestion, on constate que l'organisation actuelle n'est pas adaptée aux mutations conjoncturelles et structurelles que connaît le secteur pétrolier et gazier au niveau mondial. Il faut dire que le processus décisionnel au niveau de Sonatrach est devenu hyper centralisé, de même la politique des ressources humaines est à revoir complètement. En effet, Sonatrach ne peut plus se permettre de continuer à perdre ses compétences au profit de ses concurrents. On note aussi l'absence d'un système d'information en temps réel qui se fait sentir de plus en plus, une difficulté dans l'exécution des grands projets, notamment en matière de délais de réalisation qui est indissociable de la maîtrise des budgets. Il faut savoir que lorsqu'un projet dépasse les délais, il mobilise des ressources, grève souvent les enveloppes budgétaires initiales et résultera sur un manque à produire pouvant se chiffrer en milliards de dollars. Sonatrach devrait réagir d'une manière structurée et objective afin de s'adapter aux conditions du temps et à la réalité du marché, tout en poursuivant son objectif principal, à savoir le profit. En effet, il faut absolument instaurer un nouveau management stratégique en améliorant notamment le processus décisionnel, et ce, par la mise en place d'une organisation adaptée avec des indicateurs de gestion et une gestion rationnelle des ressources humaines. Il faut retenir et surtout recruter les compétences requises en vue d'assurer une performance élevée et viser ainsi l'excellence. Aussi, il est important de communiquer en interne avec les employés et en externe vis-à-vis de la presse spécialisée en présentant les bilans trimestriels, semestriels et annuels dans les délais. Pour rappel, le management stratégique comprend le diagnostic stratégique grâce auquel on détermine la position stratégique de l'organisation, les choix stratégiques qui consistent à formuler les options possibles et à sélectionner l'une d'entre elles et le déploiement stratégique qui concerne à la fois la mise en œuvre de la stratégie retenue et la gestion des changements que ce choix impose. Pour un nouveau management stratégique et une nouvelle gouvernance, il est fortement préconisé la mise en place d'une manière graduelle de ce qui suit : (1) Adapter l'organisation actuelle aux standards du secteur oil&gas. (2) Conduire un audit opérationnel et un audit technologique. (3) Mise en place d'indicateurs de gestion et de performance. (4) Mise en place d'une politique des ressources humaines adaptée. (5) Mise en place d'un système d'information en temps réel. (6) Mise en place des comptabilités analytiques. Dans un autre registre, il est primordial de protéger le staff dirigeant et les cadres de Sonatrach (dépénalisation de l'acte de gestion), le politique devrait laisser une certaine autonomie en matière de gestion et de décision au staff dirigeant de Sonatrach, d'autant plus que l'organisation de Sonatrach est dotée de trois organes dissociés, à savoir l'assemblée générale (AG) présidée par le ministre de l'Energie ; le conseil d'administration (CA) et le comité exécutif (CE), présidés par le PDG. Les défis à relever sont d'une extrême importance : maintenir les investissements dans l'exploration, augmenter les réserves, améliorer les taux de récupération des grands gisements, préparer l'exploitation éventuelle du gaz de schiste et conserver/conquérir de nouvelles parts de marché sur les marchés européen et asiatique du marché du gaz naturel. Donc sans un mode de gestion et une organisation aux standards du secteur oil&gas, il serait difficile de les atteindre. En conclusion, l'efficacité de la gouvernance au sein de Sonatrach passe nécessairement par une vision stratégique à long terme basée sur la crédibilité, la transparence et l'intégrité de son organisation en matière de pouvoir et de processus décisionnel, et ce, en renforçant la culture de gouvernance (notamment du top management), en s'appuyant sur un système d'information en temps réel et en stimulant les compétences et par conséquent améliorer la performance de Sonatrach et intégrer le top 10 des plus grandes compagnies pétrolières et gazières. A. H. [email protected] - Consultant oil&gas