RESUME : Karima s'est décidée à partir. Elle tombe sur son grand-père et lui ment, prétextant avoir un entretien d'embauche. Si elle a la chance de ne pas avoir à s'expliquer avec ses frères, elle aura à le faire avec sa mère qui vient d'entrer dans sa chambre… - Où as-tu l'intention de te rendre si tôt ? l'interroge-t-elle. - J'ai un entretien d'embauche, répond Karima. J'ignore si c'est pour le matin ou pour l'après-midi. - Oui, mais tu aurais pu nous en parler hier soir, lui reproche sa mère. Un de tes frères aurait pu t'accompagner. - Pour tout gâcher ! Non, merci, je me passerais de tes fils, rétorque Karima. Je veux décrocher ce boulot. - Tu te rends où ? - À Bouira. Une entreprise cherche des agents de saisie. Avec un peu de chance, je pourrais décrocher un poste, dit la jeune fille. Ce ne sera pas loin, et comme je serai clouée au siège du bureau, peut-être que tes fils accepteront de me laisser en paix ? Ouiza la regarde prendre ses gants et ranger son portable dans son sac à main, elle lui conseille de ne pas tarder dehors. - Tes frères le verraient mal, lui rappelle-t-elle. Rentre le plus tôt possible. Si c'est possible, appelle-moi pour me tenir au courant. Karima embrasse sa mère et passe devant elle. - Souhaite-moi bonne chance, maman ! lui dit-elle. J'en ai vraiment besoin. - Ma bénédiction t'accompagne. Mais as-tu pris au moins un peu de lait chaud ? lui demande-t-elle. - J'ai la gorge nouée par l'angoisse, répond Karima. Plus tard. Au revoir maman. Un dernier baiser sur la joue et la voilà partie. Karima ne veut pas prendre le risque de tarder. Elle craint que la discussion qu'elle a eue avec sa mère réveille ses frères. Si elle a pu avoir le dernier mot avec son grand-père et sa mère, avec ses frères Amine et Kamel, elle n'aurait même pas pu ouvrir la bouche. Toute discussion avec eux mène à une querelle. Et quand elle osait leur tenir tête, à bien des reprises, elle avait reçu un coup. Tout en marchant, la tête baissée, elle pense à eux, la rage dans le cœur. Si elle a menti, c'est à cause d'eux. Ils lui ont rendu la vie difficile depuis la mort de leur père, se croyant tout permis parce que la famille est sous leur responsabilité. Sa mère se pliait au moindre de leurs désirs. Quant à leur grand-père, vieux et souffrant d'un rhumatisme, ils l'ignoraient. Comme pour ne pas être désagréables avec lui. Après quelques minutes de marche sous le vent glacial, elle fait une halte, le souffle court. Elle se tourne au moindre vrombissement de moteur, espérant que ce soit un taxi. Elle a hâte de quitter le quartier. Si ces frères se seraient réveillés entre temps, ils iraient vite sortir pour la rattraper. Quand elle aperçoit au loin un taxi, elle s'y précipite. - Aux arrêts de bus, demande-t-elle au chauffeur, après s'être installée à l'arrière. - Vous partez loin ? l'interroge-t-il. - À Bouira. Pourquoi ? - D'après la radio, il va neiger, aujourd'hui ou demain. - Merci pour l'information, dit-elle. Mais je ne vais pas tarder. Cela fait des années qu'on n'a pas vu de la neige tomber dans la région. - Je suis d'accord avec vous. seulement, cette fois, avec un peu de chance, elle couvrira toute l'Algérie, ajoute-t-il. Elle fera la joie des petits et des grands. Vous aimez la neige ? Elle ne répond pas à sa question. Ce qu'elle aimerait, c'est être déjà en route pour Bouira et voir Yanis. Elle se rappelle ne pas l'avoir appelé et, sitôt, elle compose son numéro. Elle est bien déçue d'entendre l'opératrice lui demander de rappeler ultérieurement. (A suivre) A. K. [email protected]