Les éleveurs de volaille de la daïra de Lakhdaria, précisément ceux des communes de Guerrouma et Maâla, à une soixantaine de kilomètres au nord-ouest de Bouira, sont en état d'alerte depuis le 20 juillet dernier, date de l'apparition d'une étrange maladie. Ainsi, les poules pondeuses et de chair sont, selon certains aviculteurs, prises de tremblement puis refusent de se nourrir et meurent subitement des suites de ce qui s'apparente à une suffocation. "Nous ne savons plus quoi faire. J'ai fait venir des vétérinaires, ils ont fait des prélèvements et j'attends les résultats", indiquera Messaoud H., un éleveur de Guerrouma. Notre interlocuteur déclare qu'il a perdu plus 1 200 poulets en à peine 48 heures. "Tout a commencé lundi. J'ai remarqué que mes poulets sont pris de tremblements et refusaient de se nourrir (...). Je me suis inquiété et j'ai tout de suite prévenu les services sanitaires de la DSA de Lakhdaria", témoignera-t-il. L'aviculteur précisera que les services vétérinaires sont intervenus en un temps record. "Ils sont arrivés lundi après-midi et ils ont fait les analyses, mais entre-temps, j'avais plus de 250 poulets qui sont morts". Interrogé sur les résultats des analyses, notre vis-à-vis a fait part de son scepticisme. "Ils m'ont dit que c'était négatif. Cependant, mes poulets sont bien morts. Je ne comprends absolument rien à cette histoire". D'autres éleveurs de Guerrouma indiquent également que les services de la DSA ont été alertés dès l'apparition des premiers symptômes mais, selon eux, l'ensemble des prélèvements se sont avérés négatifs. "J'ai perdu 1 850 poules depuis lundi. C'est une véritable catastrophe", s'alarmera El-Hachemi Djebri, un aviculteur. Selon des informations recoupées, certains éleveurs peu scrupuleux et pris de panique ont tenté de "refourguer" leurs poulets non encore contaminés à certains revendeurs pour les revendre aux fabricants de pâté de volaille. En tout, selon des sources dignes de foi, plus de 45 000 poulets seraient morts contaminés par cette étrange maladie, laquelle s'attaque aux voies respiratoires des gallinacés. D'après certains vétérinaires (privés) de Lakhdaria (ceux du public ont refusé d'émettre leur avis), il pourrait s'agir de la maladie de Newcastle. Cette dernière, selon nos interlocuteurs, se transmet par contact direct avec des oiseaux malades ou porteurs du virus. "Les oiseaux infectés peuvent contaminer l'environnement en excrétant le virus contenu dans leurs matières fécales. Une transmission peut alors se produire par contact direct avec les déjections et les sécrétions respiratoires ou par de la nourriture", indique-t-on. Les incohérences du DSA Néanmoins, cette hypothèse a été formellement démentie par le DSA de Bouira, El-Djoudi Guenoun. Selon lui, il s'agit d'"une simple bronchite" due à la forte canicule de ces derniers jours ainsi qu'aux conditions d'élevage des poules. "La plupart des foyers touchés sont des élevages ne répondant pas aux normes d'hygiène", affirmera M. Guenoun. En outre, il a tenu à minimiser les chiffres avancés par les éleveurs. "Nous avons recensé près 3 000 poulets morts dans la localité de Guerrouma et chez trois éleveurs". Pour M. Guenoun, toute cette affaire n'est qu'"une tempête dans un verre d'eau" puisque, d'après lui, l'ensemble des analyses effectuées se sont avérées négatives à la maladie de Newcastle ou autres épidémies. Les assurances du DSA restent toutefois "relatives" et comportent certaines incohérences. D'abord, le chiffre de mortalité chez les poules contaminées ne concerne, selon lui, que trois éleveurs. C'est bien là une donnée incomplète, puisque nombre d'éleveurs de Guerrouma ne sont pas déclarés ni recensés auprès des services de la DSA. Selon les témoignages recueillis auprès de seulement deux éleveurs, on dépasse déjà les 3 500 poules décédées. Rien que pour la commune de Guerrouma, on compte plus d'une centaine d'aviculteurs, qui ne sont certes pas répertoriés par la DSA, mais qui ont été durement touchés par cette bronchite. Autre "incohérence", celle ayant trait aux analyses effectuées. Ainsi, pour M. Guenoun, cette bronchite a été décelée à partir du 14 juillet mais la réaction "officielle" de ses services ne s'est faite qu'hier. Il a fallu que le ministre de l'Agriculture déclenche une enquête, dont les résultats n'ont pas été rendus publics, pour que les services de la DSA se décident à communiquer sur cette affaire. RAMDANE BOURAHLA