Les structures du parti ont décidé de cette action en guise de soutien au secrétaire fédéral de Ghardaïa, dont le procès se tient dimanche. À quelques jours du procès du Dr Kamel-Eddine Fekhar, secrétaire national du parti, élu et membre de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (Laddh), prévu dimanche 27 février, le Front des forces socialistes (FFS) décide de… monter au front : les quelque 800 élus que compte le parti à travers le territoire national vont observer deux jours de grève, samedi et dimanche prochains, en guise de soutien à leur collègue en prison depuis près de quatre mois à la maison d'arrêt de Ghardaïa (600 km au sud d'Alger). Selon le FFS, des délibérations dans les assemblées où le parti est majoritaire, et qui seront adressées au ministère de l'intérieur, sont également envisagées. Unique dans les annales politiques algériennes avec la démission, il est utile sans doute de le rappeler, des élus du RCD en mai 1993, cette action sera accompagnée par une autre série dont certaines sont en cours tant sur le plan national qu'international. Ainsi une pétition destinée à recueillir les signatures des militants, sympathisants, militants des droits de l'homme et des ONG, ainsi que les parlementaires et les hommes politiques est lancée depuis lundi en Europe. Le parlement européen, à travers l'ambassadeur du royaume de Belgique à Alger et le département d'Etat américain, à travers l'ambassadeur américain, seront saisis, alors que plusieurs chancelleries à l'image de la Suède, la France, l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne, le Sénégal, l'Afrique du Sud, le Canada, la Suisse et la grande-Bretagne s'apprêtent, après une réponse favorable aux demandes du parti, de recevoir les responsables du FFS dans les tout prochains jours. Par le biais de la ligue algérienne de défense des droits de l'homme, certaines ONG comme Amnesty International, la FIDH, NDI sont aussi sollicitées pour être présentes au procès du secrétaire fédéral du FFS. Au plan national, le parti s'apprête à tenir, la veille du procès à Ghardaïa même, une réunion de son secrétariat national, alors qu'une lettre à l'opinion publique nationale et internationale a été rendue publique hier. Une lettre dans laquelle la formation de Hocine Aït Ahmed exige la libération des détenus de Ghardaïa et l'arrêt des poursuites judiciaires contre tous les acteurs du mouvement de contestation pacifique à l'échelle nationale. Il appelle également l'opinion nationale et internationale “à exprimer sa solidarité agissante”, les “partis à se prononcer”, alors que les instances nationales et internationales et les ONG sont appelées à prendre des “initiatives concrètes pour la défense des algériennes et des algériens déterminés à exercer leurs droits politiques, économiques, sociaux et culturels”. Cette offensive, qui s'apparente à une véritable déclaration de guerre, n'est motivée que parce que le FFS est convaincu que “le procès est éminemment politique”. Pour preuve, selon lui, plusieurs de ses élus et de ses militants sont “persécutés”. “En vertu de l'état d'urgence, les autorités s'arrogent le droit de violer les lois qu'elles ont elles-mêmes promulguées, de bâillonner la société et de supprimer toutes les libertés fondamentales. Couvert par ce dispositif, le pouvoir érige un régime spécial à chacune des régions du pays qui consiste à museler et à immobiliser, par une répression sauvage, tout élargissement de la dissidence citoyenne, nationale et pacifique”, accuse le FFS. Convaincu qu'à travers le procès de Kamel-Eddine Fekhar, en compagnie de 16 autres détenus, se profile une volonté de “mettre au pas la société et d'empêcher l'élargissement de la dissidence citoyenne”, que “l'iniquité du procès est avérée” au regard des charges qui pèsent, notamment sur le responsable du FFS, que “la justice est instrumentalisée”, le FFS met en garde les autorités contre d'éventuelles provocations. “Nous mettons en garde les autorités contre toute décision allant dans le sens de la provocation. Ils seront responsables de tout dérapage”, a averti, hier, lors d'une conférence de presse Ali Laskri, premier secrétaire du parti. “Nous avons affaire à une dictature qui ne rougit pas. Si on ne se mobilise pas, le pouvoir va éradiquer le politique”, soutient pour sa part Karim Tabbou, chargé de communication. Cette mise en garde intervient, alors que le parti étudie la possibilité d'un rassemblement le jour du procès d'autant qu'un piquet de grève des commerçants est prévu et qu'une pétition de soutien a déjà recueilli 7 000 signatures. “Nous restons vigilants. Connaissant les techniques de la police politique des infiltrations, on refuse de s'engager dans l'aventure. Ils veulent nous entraîner dans la violence mais on refuse. Toutefois, on ne se laissera pas faire”, soutient Karim Tabbou. Arrêté le 31 octobre 2004, “enlevé”, selon le FFS, le Dr Kamel-Eddine Fekhar est depuis le 8 novembre 2004 en prison après son audition par le juge d'instruction près le tribunal de Ghardaïa. Le samedi 18 décembre, il entame une grève de la faim qu'il suspend le jeudi 23 décembre sur insistance de sa famille et de son parti. Le 6 février dernier, la chambre d'accusation “criminalise” les faits qui lui sont reprochés, entre autres, notamment, destruction de biens de l'Etat, attroupement illicite, utilisation d'arme blanche, obstruction de la voie publique et incendie volontaire. En vertu des articles 97, 98, 396 et 396 bis du code pénal, le Dr Fekhar encourt une peine allant de la réclusion à plus de 20 ans jusqu'à la condamnation à mort. Le Dr Fekhar est impliqué, aux yeux des autorités, dans les émeutes qui avaient éclaté dans la vallée du M'zab mercredi 14 octobre au lendemain d'une descente des services des douanes chez les commerçants. Le parti et “ceux qui se cachent derrière l'ENTV” Constatant la présence de l'ENTV lors de la conférence de presse hier, le premier secrétaire du FFS n'a pas manqué de lancer un message à qui de droit, entendre les décideurs ou “ceux qui se cachent derrière l'ENTV”, pour reprendre ses propos. “J'espère qu'ils ne vont pas garder l'enregistrement pour eux. Les travailleurs sont les bienvenus, mais nous disons à ceux qui sont derrière de laisser les citoyens et les partis libres de s'exprimer”. K. K.