Les partis politiques donnent des appréciations contradictoires sur la décision du Conseil des ministres d'adopter le projet de révision du code de la famille sous forme d'ordonnance et de maintenir le tutorat matrimonial sur la femme majeure. Au FLN, l'ambiance est naturellement à la réjouissance. Le président du groupe parlementaire, Layachi Daâdoua, qui a eu à exprimer, dans un entretien accordé à un journal arabophone, son opposition à l'affranchissement de la femme de la tutelle d'un membre mâle de sa famille, a salué “la sagesse du Conseil des ministres qui a pris le temps qu'il fallait afin de ne pas se tromper”. Pour le chef de file de la majorité à l'Assemblée nationale, “le projet de révision du code de la famille, tel qu'avalisé avant-hier, respecte les aspirations de la société”. Le MSP est tout aussi heureux par l'issue du Conseil des ministres. “Tant mieux pour la femme, qui reste protégée par la famille et par les lois de la République”, commente Fateh Guerd, vice-président du groupe parlementaire du mouvement. Pour ce député, le chef de l'Etat a été à l'écoute des parties qui l'exhortaient de ne pas franchir la ligne rouge dans la réforme du code de la famille. “Nous avons toujours estimé nécessaire de réviser cette loi, qui a montré ses faiblesses en 21 ans d'application. Les amendements devaient, néanmoins, correspondre aux traditions de la société”. El-Islah est plutôt déçu par l'adoption de ce projet sous forme d'ordonnance, laquelle sera soumise au vote du Parlement sans débat. “Cela nous empêchera d'apporter les amendements que nous jugeons indispensables”, souligne Lakhdar Benkhalef (membre de la direction du parti). Il indique que sa formation politique a recensé, dans la loi de 1984, plus de 25 entraves à la charia et à la législation en vigueur. Il aurait donc vivement souhaité avoir l'opportunité d'y introduire les correctifs qui s'imposent, de son avis. “C'est un projet qui ne sert ni l'intérêt de la famille ni celui de la femme. Il va même poser plus de problèmes à la société que la loi originelle”, estime notre interlocuteur qui marque néanmoins sa satisfaction quant au revirement du chef de l'Etat sur la question du tutorat matrimonial. Le Parti des travailleurs, fidèle à son positionnement en faveur de la consécration de droits républicains, regrette, par la voix de son secrétaire national chargé des relations extérieures, Djelloul Djoudi, que la plus haute autorité du pays ne soit pas parvenue à réparer une injustice envers les femmes qui dure depuis 21 ans. “Il aurait fallu abroger purement et simplement la loi de 1984 et préserver les droits des femmes dans le code civil. Pour nous, c'est inacceptable, qu'on leur dénie des droits fondamentaux”. Pour le député de la formation dirigée par Louisa Hanoune, “passer le projet sous forme d'ordonnance est encore plus grave. Le président de la République prive ainsi les parlementaires d'un débat sur la révision d'une loi importante”. Très gêné par le désaveu à peine voilé fait à Ahmed Ouyahia qui a approuvé, en Conseil des ministres, toutes les propositions de la commission Boutern, le RND n'a pas voulu s'étaler sur la question. C'est sans conviction que Miloud Chorfi, porte- parole du parti, parle de victoire. “Nous avons été favorables à la révision du code de la famille. Nous maintenons notre position”. Le RCD n'a pas souhaité faire, pour l'heure, le moindre commentaire sur les décisions du Conseil des ministres, tandis que le FFS était injoignable durant toute la journée d'hier. S. H.