Bien que soumise au consentement du juge, la polygamie est également confirmée. Avant d'énumérer les dix dispositions portant révision du code de la famille et approuvées par le Conseil des ministres, le communiqué de la présidence les a qualifiées “d'avancées les plus significatives”. Les autres modifications proposées par la commission de refonte et avalisées par le Conseil de gouvernement en août dernier sont-elles moins importantes si bien qu'elles n'ont pas trouvé place dans le communiqué officiel, ou ont-elles tout bonnement été abandonnées ? Quelques-unes pourtant, sans qu'elles soient catégoriques, laissaient entrevoir quelques progrès. Il est ainsi des conditions émises par la commission Boutern (du nom de son chef, premier président de la cour suprême) pour le divorce masculin, dans l'objectif de mettre un terme à la répudiation. A contrario, le droit de la femme au divorce, auparavant réprimé, allait être reconnu. C'est en tout cas le vœu exprimé par les initiateurs des amendements. Or, le Conseil des ministres vient d'anéantir bien des espoirs en cautionnant les changements les moins controversés. à travers cette démarche peu courageuse, le premier magistrat du pays a écorné sa crédibilité et celle de son gouvernement. Il a publiquement désavoué l'exécutif, qui avait entériné le projet d'amendement dans son intégralité, et ce, en dépit des menaces de veto exprimées par les députés islamistes du MSP. La confirmation de la tutelle matrimoniale est sans conteste le reflet de cette dénégation. Dans le communiqué du Conseil des ministres, il est clairement stipulé “le maintien du wali pour le mariage de la femme, y compris majeure, en précisant que celle-ci conclut son contrat de mariage en présence de son wali”. Selon une des rédactrices du rapport Boutern, cette version est plus nuancée que l'originale contenue dans le code de la famille du 6 juin 1984, dans le sens où la femme a le droit de choisir librement son époux. Cependant, elle a l'obligation de se faire accompagner d'un tuteur lors de la conclusion de l'acte de mariage. Sans lui, elle ne pourrait pas donc contracter d'union. Ce qui la maintient dans son statut de mineure. Cette minorité est partiellement levée après le mariage. Le présent projet d'ordonnance, tout en restant vague, reconnaît la responsabilité de la mère sur ses enfants, au même titre que le père. “Le rétablissement de l'équilibre en droits et en devoirs entre les deux époux” est la seconde disposition de l'avant-projet d'ordonnance. Toutefois, il est clairement établi par la commission de révision que l'épouse est rendue responsable seulement en cas d'absence ou d'indisponibilité de son mari. En somme, l'homme ne perd rien de son autorité. Sa puissance est consacrée grâce, notamment, au maintien de la polygamie. “La soumission de la polygamie au consentement préalable de la ou des épouses et de la future épouse et à l'autorisation du président du tribunal, qui devra vérifier le consentement ainsi que les motifs et l'aptitude de l'époux à assurer l'équité et les conditions nécessaires à la vie conjugale”, stipule le texte de loi. Certes, la conclusion de plus d'un mariage est soumise à l'approbation du juge, mais cela ne diminue en rien l'humiliation faite à la ou aux épouses antérieures. L'unique disposition susceptible de réparer une des plus grandes injustices qui a projeté sur le pavé des milliers d'Algériennes concerne la mise à la disposition de la femme divorcée qui a la garde de ses enfants d'un logement. Selon le communiqué du Conseil des ministres, cet amendement répond au souci du président de la république “d'accorder la plus grande attention à la cellule familiale et à préserver notre société des conséquences graves induites par les drames conjugaux des femmes jetées à la rue et des enfants livrés au dénuement”. Les autres changements du code de la famille retenus ont trait, pêle-mêle, à la fixation de l'âge du mariage à 19 ans pour les deux sexes, la suppression du mariage par procuration, la réhabilitation du droit du père à la garde des enfants. Désormais, il se place directement après la mère. Il est également question que les deux époux présentent des certificats de bonne santé avant la conclusion de leur union. Enfin, le juge dorénavant pourra statuer par ordonnance sur les questions relatives au droit de garde, au droit de visite, au logement et à la pension alimentaire. S. L.