Cette proposition ne date pas d'aujourd'hui, mais les pays de la rive sud de la Méditerranée et les pays de provenance des migrants attendent plus qu'un système de lutte répressif contre le phénomène de migrations. Après la Turquie, l'Allemagne compte convaincre les pays de l'Afrique du Nord à conclure un accord pour mettre fin au départ massif des migrants et des réfugiés vers le Vieux Continent. C'est ce qu'a déclaré, hier, la chancelière allemande Angela Merkel, dont le pays a accueilli près d'un million de réfugiés, en majorité des Syriens, des Irakiens et des Afghans. "Nous allons devoir conclure des accords semblables avec d'autres pays, grosso modo en Afrique du Nord, pour mieux maîtriser les routes migratoires dans le centre de la Méditerranée", déclare la dirigeante allemande au Passauer Neue Presse et au Ruhr Nachrichten. "De tels accords sont aussi dans l'intérêt des gens qui fuient", a-t-elle ajouté, au lendemain du mini-sommet qui l'a réunie avec le président français François Hollande et le Premier ministre italien Matteo Renzi en Italie, durant lequel la question de l'émigration avait été abordée. Mais avec qui Mme Merkel compte composer, sachant que le Maroc a déjà signé un accord avec l'Espagne et que la Libye ne dispose pas d'un Etat. Quant à l'Algérie et à la Tunisie, il n'y a pas un flux massif de migrants pour mettre en place un dispositif particulier, comme le souhaite la chancelière allemande. La lutte contre l'émigration illégale, qui a coûté la vie à des centaines de personnes en mer Méditerranée, passe par le règlement de la crise libyenne. Car, les gros "contingents" de migrants, mais surtout des réfugiés, passent par ce pays en guerre civile depuis cinq ans. Disloquée par l'anarchie et les violences armées, la Libye est devenue l'eldorado des passeurs. La branche libyenne du groupe terroriste autoproclamé Etat islamique (Daech) profite aussi de la détresse des candidats à ce périlleux voyage en mer pour l'Europe pour renflouer ses caisses. Pour rappel, l'Union européenne a conclu un accord avec la Turquie, afin de freiner l'afflux de réfugiés vers l'Europe. Bruxelles doit débourser au moins trois milliards d'euros pour le coup de cette opération. Mais Ankara utilise cet accord comme un moyen de chantage, notamment pour accélérer le processus de son éventuelle adhésion à l'UE. Par ailleurs, Mme Merkel a fait état de la lenteur des Européens à se répartir les 45 000 migrants coincés à la frontière gréco-macédonienne, dont seuls 3 000 ont été accueillis par d'autres Etats membres. Ce qui ne peut pourtant pas être considéré comme une lenteur, puisque la question continue de faire débat sur le Vieux Continent et certains Etats membres ont émis des réserves et des conditions sur l'accueil des réfugiés. Les récentes attaques terroristes, au couteau surtout, en Allemagne et en Belgique, ont compliqué davantage les choses et augmenté la réticence des pays concernés par cette question. C'est le cas de la République tchèque, pour ne citer que ce pays, qui a affirmé, hier, son refus qu'une forte communauté musulmane se constitue chez elle. "Nous n'avons ici aucune forte communauté musulmane. Et à vrai dire, nous ne souhaitons pas qu'une forte communauté musulmane se forme ici, vu les problèmes que nous observons", a indiqué le Premier ministre tchèque Bohuslav Sobotka au quotidien local Pravo. "Nous avons un intérêt commun avec l'Allemagne, mais nos opinions divergent quant à la façon de résoudre (la crise migratoire, ndlr)", a-t-il souligné. Lyès Menacer