Combien de fois a-t-on entendu dire ; « nous semons et c'est l'Europe qui récolte », « ce n'est tout de même pas correct, de quitter ainsi son pays après avoir effectué gratuitement ses études et bénéficié des largesses de l'Etat », « pourquoi ne restent-ils donc pas pour servir leur pays ? Au lieu de ça, ils partent égoïstement à l'étranger où les conditions de vie sont meilleures que les nôtres» ... Loin de refléter la réalité des intentions et motivations de notre élite, qui, se voient contraints de s'expatrier, ce constat n'est pour autant pas totalement dénué de sens, car l'émigration des personnes hautement qualifiée –surtout quand celle-ci est massive- constitue un véritable frein au décollage et au développement économique du pays. On recense l'année dernière pas moins de 23000 étudiants algériens migrants –la France étant de loin le premier pays d'accueil -. D'un autre côté, la situation peu reluisante de l'économie nationale, constitue l'une des principales raisons qui poussent les étudiants, les chercheurs et les professionnels à quitter l'Algérie pour vivre sous d'autres cieux plus cléments à la recherche de la stabilité et de la prospérité qu'ils méritent et qui correspondent mieux à leurs qualifications et aspirations. Qui de la situation économique du pays ou de la fuite des cerveaux est à l'origine du mal ? La question ainsi posée nous rappelle étrangement le fameux paradoxe, vieux comme le monde ; qui de l'œuf ou de la poule a engendré l'autre, si c'est la poule, d'où sont-elles et si c'est l'œuf, qui l'a pondu ? Si zoologistes et philosophes se sont donné l'éternité pour y répondre, les incidents récents dans le monde, et la situation économique algérienne nous mettent, aujourd'hui plus que jamais, dans l'obligation de trouver une solution globale et durable pour enfin mettre un terme à l'hémorragie et sortir de ce cercle vicieux où causes et conséquences se confondent et s'aggravent à mesure que nous laissons le temps passer. Une analyse, même superficielle du modèle économique algérien, permet de constater que le facteur humain n'est que secondaire dans la construction de la valeur et que le bien être – matériel- de la nation dépend en grande partie de la rente pétrolière. En effet, ne comptant que sur les recettes de l'exportation des hydrocarbures-ou presque-, les ressources humaines ont longtemps été négligée par les pouvoirs qui se sont succédés, preuve en est l'état de délabrement avancé dans lequel est plongée l'université algérienne et la quasi-inexistence du secteur industriel et productif. La devise semble bel et bien être "tant qu'il y a de la matière noire, nul besoin de matière grise." La déconsidération de la ressource humaine, génère un sentiment d'inutilité et d'impuissance chez l'individu, d'autant plus quand celui-ci est hautement qualifié, ce qui s'additionnant aux conditions économiques et sociales, finit en quelque sorte de solder la dette morale du migrant, qui s'en va sans hésitations, chercher dans d'autres pays la reconnaissance et la considération dus à son statut de scientifique et aux efforts consentis pour le devenir Le conférencier M.Abdellaoui, professeur en sociologie à l'université d'Alger, et chercheur au centre de recherche, en économie appliquée pour le développement (Cread), a recommandé ,qu'au lieu d'entretenir un « rapport patriotique », du fait que ces compétences –qui quittent le pays- sont algériennes, donc, elles sont dans l'obligation d'aider leur pays, il est préférable, selon lui d'entretenir un « rapport de compétence » et ce n'est qu'à partir de ce rapport, qu'on pourra dire que ces compétences ont la liberté d'aller ailleurs pour plus de compétences et de savoir ou de rester dans leur pays. « C'est à nous de faire en sorte qu'elles reviennent dans leur pays d'origine en réunissant un certain nombre de conditions » Nous ne pouvons de ce fait, reprocher aux étudiants et scientifique de chercher à faire valoir leurs connaissances et leurs compétences, quand celles-ci ne le sont pas suffisamment (ou pas du tout) dans leur pays, on ne peut qu'espérer qu'ils ne cèdent pas trop vite au doux chant des sirènes de l'autre rive de la méditerranée , sans avoir auparavant essayé de toutes leur forces et de tout leur cœur de changer ce qui doit l'être dans leur pays et de n'envisager le départ qu'en désespoir de cause. Lydia HARBI (Soleil HEC/Rédaction Numérique De "Liberté")