Derrière la hausse des prix de large consommation de ce mois de janvier, des pratiques spéculatives et l'effet boule de neige provoqué par la hausse de la TVA. Contacté par Liberté sur l'impact de la loi de finances 2017, Zoheir Boudehri, expert en stratégie économique observe d'abord que ses effets sur le pouvoir d'achat des citoyens sont difficilement mesurables du fait de l'absence de statistiques dûment admissibles, recevables. Par contre, il convient de savoir, souligne-t-il que les augmentations des prix de produits de large consommation actuellement enregistrées sur nos marchés ont été largement anticipées par beaucoup de commerçants en décembre dernier. Comment ont-elles été anticipées ? Beaucoup de produits ont disparu de la circulation du fait de leur stockage. Ils réapparaissent maintenant avec des prix largement supérieurs aux droits et taxes appliqués par la loi de finances 2017. Il est vrai que cela est difficile pour les services du commerce de pouvoir maîtriser ces effets inflationnistes induits par un comportement anti-économique. On peut les qualifier d'effets spéculatifs qui sont réprimés par la loi. Comment les services du commerce peuvent-ils juguler ces pratiques ? Le principe est que le contrôle des prix doit s'effectuer a posteriori. Il faut se positionner au niveau du contrôle des prix bien avant l'application de la loi de finances et procéder à toutes les vérifications nécessaires quant à la disponibilité du produit. Autre explication à la hausse des prix de janvier : les commerçants sont aussi des consommateurs. Ils ne veulent pas que leurs revenus soient touchés. Ils font la sommation de toutes les augmentations qui s'appliquent à leur propre commerce et à leur propre personne en tant que citoyen et qu'ils répercutent au niveau des prix de leurs produits. Il y a aussi l'effet boule de neige, quand on touche aux prix des transports, à la TVA, il y a l'effet multiplicateur : de 2%, on arrive à une augmentation de 10 à 15% entre l'importateur, le grossiste et l'importateur. Sur les produits subventionnés, l'expert estime qu'il faut plutôt des aides financières aux détenteurs de bourses modestes. Des sommes colossales ont été dépensées dans les subventions sans se faire ressentir au niveau des petites bourses. Tout le monde a accès aux subventions y compris les catégories sociales plus favorisées. Les pouvoirs publics ont remis en cause ce fonctionnement. Ils ont opté pour la réduction des subventions. Ce n'est pas le bon moment. C'est pour les pouvoirs publics une position inconfortable de consentir ces aides financières du fait de la baisse des revenus pétroliers. Et encore une fois, il n'y a d'autre alternative. Ce que les Algériens attendent tout simplement, c'est de voir l'effet de redistribution de l'aide de l'Etat appliquée de façon juste, c'est-à-dire qu'il y ait une justice sociale. Quant aux solutions pour préserver le pouvoir d'achat des citoyens, il convient, suggère l'expert de clarifier la politique économique : l'Etat est il interventionniste ou applique-t-il une politique libérale? Il semble que le gouvernement ait opté pour la libre concurrence. Cette option n'est pas affichée clairement. Quant aux solutions par rapport au pouvoir d'achat, en dehors de l'effet social, on peut agir ajoute-t-il par une mesure toute simple, l'acte d'investir ne doit être qu'une simple formalité. "La meilleure manière d'arriver à des prix raisonnables et de protéger le pouvoir d'achat des citoyens, c'est la multiplicité de l'offre (plusieurs producteurs, production en quantité et avec un bon rapport qualité/prix). Alors faut-il pour autant parler de laisser-faire ? Nous n'avons pas d'autre choix que d'effectuer des contrôles a postériori en termes d'investissement, de faire disparaître les barrières administratives, financières, techniques aux investisseurs qui prennent le risque. C'est finalement l'investisseur qui contribue à la croissance et au développement économique du pays" a-t-il argué. Par : K. Remouche Le ridicule qui ne tue point Les pâtes à 51 dinars, 56 dinars ! Dans une simulation, la Direction générale des impôts calcule qu'avec l'augmentation de 2% de la TVA, le prix du paquet de pâtes doit être cédé au détail à 51 dinars. À Carrefour, on a constaté que les prix des pâtes tournaient entre 41 et 56 dinars. Dans la pratique, les pièces de 1 dinar et de 2 dinars sont rarement utilisées dans les épiceries et les superettes. Le marchand arrondit à 55 dinars pour un prix de 51 dinars et 60 dinars pour un prix de 56 dinars, au détriment du consommateur. Conclusion : la simulation de la DGI ne tient nullement compte des réalités du terrain. La dévaluation du dinar et les restrictions aux importations L'autre effet sur l'augmentation des prix L'anticipation sur une dévaluation du dinar en 2017 et les restrictions sur les importations sont les autres facteurs qui poussent à l'augmentation des prix des produits de large consommation. Autre observation : la baisse des prix des matières premières sur les marchés internationaux telles que les céréales n'a pas empêché l'augmentation des prix de la semoule, de la farine et des pâtes. Les prix des produits qui ont augmenté :
* Farine conditionnée : 75 dinars le kilo (50 dinars en décembre) ; * Riz conditionné : 115 -120 dinars (inchangé 100 dinars dans certaines supérettes et hypermarchés ; * Lentilles conditionnées : 250 dinars le kilogramme (200 à 220 dinars auparavant) ; * Pois chiches : 370 à 400 dinars, contre 260 dinars auparavant ; * Pois cassés : 250 dinars (200 dinars auparavant) ; * Haricots : 300 dinars ; * Semoule conditionnée de 2 kilos : 150 à 170 dinars, 120 à 140 dinars auparavant ; * Pâtes : 50 à 60 dinars (45 dinars à 50 dinars auparavant, prix inchangés notamment à Carrefour) ; * Bananes : 550 dinars contre 150 dinars auparavant ; * Huile, sucre : prix inchangés dans des hypermarchés et supérettes ; * Café : 170 à 200 dinars, contre 150 à 180 dinars auparavant. K. R.