Suite au rassemblement tenu samedi devant le TRB, le directeur général de l'Onda a décidé de "parrainer" les travailleurs du théâtre. Les travailleurs du Théâtre régional de Béjaïa (TRB), soutenus par les acteurs politiques et sociaux, par les organisations de la société civile, mais aussi par des citoyens lambda, ont tenu, samedi après-midi, un sit-in. Le lendemain (hier, ndlr), l'Office national des droits d'auteur et des droits voisins (Onda) a décidé de "parrainer" les travailleurs du théâtre. Un parrainage qui ne se veut pas seulement une caution morale, mais un engagement qui se concrétise par l'octroi d'un chèque de plus de 10 millions de dinars. Un principe de solidarité qui ne s'arrête pas là, a indiqué M. Bencheikh, le DG de l'Onda à Liberté. "Je viens de remettre à l'instant (hier, ndrl) un chèque de plus de 10 millions de dinars au directeur du Théâtre de Béjaïa." Les artistes du TRB, en tant que membres de l'Office, "comptent arrêter avec le théâtre un programme de soutien qui va les aider à terme à produire". Ce que réclament, au demeurant, les travailleurs du TRB. Lesquels par leur action d'hier, la troisième à être organisée, ont dénoncé le sort que veut réserver le ministère de la Culture à leur théâtre, du moins tel qu'ils l'ont exprimé sur leurs banderoles, accrochées au fronton du théâtre. Ils se disent être déterminés à poursuivre le mouvement jusqu'à satisfaction de leurs revendications, à savoir reconduire les contrats des 25 contractuels qui font marcher le théâtre et reconduire également la dotation diminuée de 58% par rapport aux années précédentes. Outre des artistes, à leur tête Djamel Allam, l'association Ahbab Cheikh Saddek-Labdjaoui avec les élèves du conservatoire — venus soutenir symboliquement les travailleurs du théâtre — étaient présents avec les animateurs du Café littéraire et Bruits des mots. Mais aussi des élus, à l'instar du député Boukellal, des représentants de partis politiques, à l'instar du FFS, du RCD, du MDS, du PST et de Jil Jadid, des membres des organisations de la société civile dont les représentants du Centre de documentation et d'information sur les droits de l'homme, le Comité de soutien aux travailleurs de la wilaya de Béjaïa, des représentants de syndicats autonomes, etc. Cela pour dire que la société est mobilisée et que "nous sommes soutenus dans notre combat", a indiqué le SG de la section syndicale UGTA du TRB. Lequel exige le maintien des 25 contractuels dont le contrat arrive à expiration le 31 janvier prochain. Parmi eux, des comédiens, des sonoristes, des éclairagistes et des agents de sécurité. L'urgence est la reconduite des contrats, sinon c'est la mise à mort du théâtre. Le SG explique que le TRB a vu son budget de fonctionnement amputé d'abord de 8% en mars dernier. En juillet, il baisse de 50%. Conséquence : la masse salariale enregistre un déficit de 1,2 milliard de centimes ; cela fait bientôt quatre mois que les salaires n'ont pas été versés. Et de s'interroger : "Où est l'Etat ? Où est la tutelle ?" Le musicien de talent et auteur du montage poétique et musical, Akin Ilebhar (Au-delà des mers – titre emprunté à l'un des succès de Djamel Allam ; akin ilabhar, elant tmura (Au-delà des mers, il y a des pays...) regrette, pour sa part, que le ministre de la Culture décide de réagir en recevant, hier, les directeurs des théâtres régionaux. "Il veut se concerter avec les gens qu'il a lui-même nommés. Alors que le bon sens voudrait que cette rencontre, pour dénouer la crise, se tienne avec les représentants légitimes des travailleurs au niveau des théâtres régionaux. Autant se concerter avec lui-même." Nos interlocuteurs craignent que le mouvement du personnel du TRB ne se radicalise s'il n'y a pas une volonté politique pour résoudre le problème avec l'adhésion des travailleurs via leurs représentants. Ils s'interrogent aussi sur la responsabilité sociale des dirigeants. Et dans le cas du TRB, du bilan de l'ancien directeur, qui est parti à la retraite en laissant une dette jugée astronomique. "La preuve, le théâtre a eu du mal à rebondir. On était dans l'impossibilité d'assurer de nouvelles productions." Djamel Allam déclare : "Je suis là pour soutenir le personnel du théâtre. N'oubliez pas : je suis un enfant du théâtre. J'ai fait mes classes ici chez notre regretté maître Cheikh Saddek Labjaoui. C'est cet espace d'expression, diverse, qui m'a fait. C'est donc un devoir pour moi d'être là aux côtés des travailleurs du théâtre. Vous savez : il n'y a pas grand-chose qui peut sauver le pays, hormis la culture. Et on ne va pas s'arrêter là. On va organiser un concert — symbolique s'entend — pour aider le personnel du théâtre. Avec la contribution du public." Le personnel n'a pas été payé depuis bientôt quatre mois. Djamel Abdelli, directeur artistique et technique au TRB, appelle, quant à lui, à l'élaboration en urgence d'un statut de l'artiste. "Ce statut s'impose." Mohamed Yargui, comédien et réalisateur, expliquera, pour sa part, qu'à travers le soutien au travailleur, c'est beaucoup plus un soutien au théâtre, à l'institution. Si l'on met un terme aux contrats de ces 25 techniciens, comédiens, etc. la fermeture du TRB sera inévitable. Notre interlocuteur a affirmé, en outre, que le mal a commencé il y a plusieurs années. "Il n'y a pas eu de production depuis plus d'une année et demie maintenant. Le théâtre était endetté. La direction a préféré ne pas produire. On voudrait qu'il y ait de la production sinon il ne peut pas y avoir de rentrée d'argent. C'est un cercle vicieux. Il faut qu'il y ait de nouvelles productions." Les comédiens du TRB ont préféré, eux, s'exprimer artistiquement en improvisant un spectacle. Lequel spectacle est fait d'extraits de pièces, de poésie, avec un support musical. "Ils s'expriment sur cette situation avec ce qu'ils savent faire." Idem pour les élèves de l'orchestre du conservatoire, venus avec leurs instruments de musique. Réaction des travailleurs du TRB "Nous tenons à remercier l'Onda pour leur solidarité agissante. Cela fait plaisir, assurément. Mais nous sommes obligés de dire que le compte n'y est pas. Il faut bien plus d'argent pour nous sortir d'affaire." Le collectif s'attend à un geste de la tutelle pour effacer les dettes contractées par l'ancienne direction du TRB et redémarrer le théâtre sur de bonnes bases. M. Ouyougoute