Dans cet entretien, le directeur général de la banque Al-Baraka d'Algérie, à capitaux mixtes, constituée en partie de fonds arabes, M. Mohamed Seddik Hafid, retrace le jeune parcours de cette banque au double statut public-privé. Ses résultats témoignent de l'importance du marché algérien et en font surtout un argument chiffré pour d'autres prétendants à l'investissement. Liberté : Pouvez-vous nous présenter la banque Al-Baraka et nous retracer succinctement son parcours en Algérie ? Mohamed Seddik Hafid : La banque Al- Baraka d'Algérie a été créée en 1990 entre le groupe privé saoudien Dallah Al-Baraka et la Banque publique algérienne Badr qui se sont réparties équitablement les actions (50/50). Il est vrai que le démarrage a été relativement lent, puisque ce n'est que vers 1994, à la faveur de l'arrivée d'une nouvelle équipe à la tête de l'établissement que la performance a commencé à gagner du terrain. Pour preuve, en 1993, nous affichions un total bilan de 1 milliard de dinars alors qu'actuellement il passe à 46 milliards de dinars… Actuellement, nous travaillons avec un réseau de 12 agences et envisageons d'en ouvrir 8 autres dont les dossiers sont à l'étude, d'ici à fin 2006. Justement, en parlant de développement, peut-on connaître vos résultats ? Pour un total bilan de 46 milliards de dinars, nous avons dégagé un résultat brut de plus de 570 millions de dinars. Ce qui nous place parmi les premières banques du groupe ABG (Al-Baraka Bank group) qui est en fait la filiale du groupe d'Al-Baraka. Donc, par rapport au groupe bancaire dont nous faisons partie, nous restons une des banques les plus rentables. Nous dégageons un ratio de retour sur fonds propres très proche de la norme internationale. Malgré ce qu'a enduré l'Algérie durant une décennie, Al-Baraka Algérie s'est pleinement engagée sur le marché algérien. Nos fonds propres, qui étaient de 375 millions de dinars, passent à plus de 2,7 milliards de dinars. Je vous apprends également que le capital de la banque, qui est de l'ordre de 500 millions de dinars, passera très prochainement à 2,5 milliards de dinars. Bien sûr, d'ici la fin du mois, nous allons organiser l'assemblée générale pour entériner les résultats de l'exercice 2004. Ce qu'il faut mentionner également et à mettre à l'actif de notre stratégie, c'est notre particularité à mettre près de 50% de nos emplois dans le financement de l'investissement. En deux mots, la banque Al- Baraka Algérie est engagée dans l'économie algérienne. Revenons un peu aux particularités de votre banque, notamment en ce qui concerne les modes de financement qui la caractérisent. Peut-on considérer votre banque comme un établissement de type universel qui fait office aussi bien de banque d'affaires que de banque de dépôt ? Ce qui nous distingue d'abord, ce sont les modes de financement qui obéissent aux principes de la charia, le banking islamique. La banque Al-Baraka reste de type universel. Les produits financiers que nous commercialisons ressemblent de très près aux produits classiques des autres banques, en ce sens où les études de dossiers font appel aux mêmes instruments d'évaluation. Nous déployons des techniques de financement spécifiques à chaque demande, c'est-à-dire que chaque client voit une réponse adaptée à ses besoins de financement, aussi bien pour les besoins de l'exploitation que ceux de l'investissement. En gros, il faut signaler que nous sommes la banque des PME. Depuis 2001, nous avons inauguré les produits de banque de détail, c'est-à-dire ceux destinés aux particuliers tels les véhicules… Bientôt nous nous lancerons dans les crédits à la consommation pour les équipements ménagers et biens immobiliers. Pour les crédits automobiles, par exemple, nous avons depuis 2001 mobilisé une enveloppe de 7 milliards de dinars pour une contrepartie en véhicules de 15 000 véhicules. Vous venez de déclarer que votre banque reste l'une des plus performantes du groupe auquel vous appartenez, en l'occurrence Al-Baraka banking group dont le capital est de 1,5 milliard de dollars ; comment expliquez-vous ces résultats et peut-on les lier à certains avantages du marché algérien ? Il n'était nullement question pour nous de nous lancer dans une concurrence avec les banques publiques de la place qui affichent une avance en termes de réseau et de clientèle déjà établie. Au niveau national, nous sommes parmi les banques qui réalisent le plus de profits également. C'est dire que le marché algérien est réellement porteur. D'ailleurs, nous avons été suivis en Algérie par 11 banques arabes qui sont venues après nous, considérant l'étendue du marché. Al-Baraka touche à tous les secteurs clés de l'économie : agroalimentaire industrie, bâtiment, pharmacie, etc. Nous participons même au financement du transport maritime. Aujourd'hui, nous avons 65 000 clients et quelque 85 000 comptes ouverts auprès de nos guichets. Pour le volet commerce extérieur, nous mobilisons annuellement plus de 650 millions de dollars. Al-Baraka Algérie gère un portefeuille relationnel au niveau international qui avoisine les 250 correspondants de premier ordre, ce qui lui permet de mobiliser des lignes de financement ou de confirmation de crédits documentaires, suivant une aisance très particulière. Notre performance a d'ailleurs été soulignée par le bureau Ernest&Young. Cela nous a incité à faire figurer notre établissement sur le classement mondial des banques les plus performantes. Au chapitre de la coopération, nous avons été derrière la création d'une compagnie d'assurance dénommée Al-Baraka Oua El-Amane dans laquelle nous détenons 20% des actions. Nous participons également à la création de la société immobilière entre Al-Baraka et l'AADL, un projet qui va démarrer dans les prochains mois. Notre politique consiste également à amener les capitaux arabes à s'investir en Algérie. Actuellement, avec des Koweitiens, nous sommes sur un projet de création en Algérie d'une société financière spécialisée dans le leasing et le financement de l'investissement. Ce projet a pour vocation d'accompagner et d'encourager les investisseurs des pays du Golfe à s'implanter en Algérie, particulièrement dans le cadre des réformes et du lancement du processus de privatisation. Ce projet a été élaboré par le cabinet Ernest&Young. La société en question, dont le capital sera à 70% souscrit par les pays du Golfe, est en bonne voie de concrétisation. A. W.