À l'occasion de la Journée mondiale de l'eau, il convient de souligner que l'accès continu aux ressources hydriques pour l'ensemble de la population souffre de la mauvaise gestion du secteur. L'Algérie a célébré mardi dernier la Journée mondiale de l'eau. À travers des expositions et des communications, les pouvoirs publics ainsi que des universitaires ont fait le point sur la gestion de l'eau en Algérie. Il en ressort qu'en dépit d'une pluviométrie exceptionnelle qui donne un répit aux pouvoirs publics de plus d'un an, au centre et à l'est du pays, la situation reste cependant fragile. En effet, les barrages sont pleins au Centre et à l'Est. “Nous avons de quoi satisfaire les besoins de la capitale pour au moins 18 mois”, confie un responsable du secteur. Mais les difficultés de gestion des ressources en eau persistent. Pluviométrie exceptionnelle ou pas, les restrictions en matière de distribution d'eau potable persistent pour la majorité de la population. Il convient de reconnaître, cependant, que des améliorations dans la distribution de l'eau à Alger ont été enregistrées. Selon l'ADE, 70% des habitants de la capitale reçoivent l'eau h/24. Un expert nous confie qu'avec les quantités disponibles et en tenant compte d'une gestion prudente des réserves, toute la population d'Alger devrait recevoir de l'eau h/24. Les autres régions du pays connaissent également le même phénomène avec une situation plus accentuée à l'ouest du pays où des barrages sont seulement à 20% de leurs capacités de réserves. Cette situation d'accès difficile aux ressources en eau résulte des décennies de gestion catastrophique du secteur. Principales contraintes : la vétusté des réseaux et le phénomène des “usagers clandestins”. À Alger, on recense 30% de pertes du précieux liquide, entre fuites dues à des conduites défectueuses et quantités d'eau distribuées, mais non comptabilisées. Mauvaise programmation, mauvaises études, mauvais choix d'entreprises Ce que l'on dit beaucoup moins, c'est que le secteur continue de souffrir d'une mauvaise programmation des infrastructures dans les années 1990 : les principaux barrages réceptionnés ces dernières années n'ont pas encore leur adduction : Béni Haroun, Koudiat Medouar à l'Est, Taksebt au Centre, Hammam Boughrara, Bérézina à l'Ouest… Conséquence : l'eau est disponible mais ne peut arriver aux robinets parce que les travaux de transfert n'ont pas été réalisés. L'exemple le plus significatif de cet héritage de mauvaise gestion est sans doute le barrage de Taksebt. Il cumule aujourd'hui plus de 100 millions de mètres cubes d'eau, de quoi satisfaire tous les habitants de la wilaya de Tizi Ouzou h/24. Pour presque rien : des milliers de mètres cubes d'eau distribués quotidiennement seulement pour Tizi Ouzou parce que les travaux d'adduction viennent à peine d'être lancés. Au cours des deux prochaines années, deux grands barrages au moins seront réceptionnés sans que les travaux de transfert soient achevés : le barrage de Tichy Haf, situé à Béjaïa et Koudiat Acerdoune, dans la wilaya de Bouira. L'espoir repose sur le programme de dessalement d'eau de mer de 1 million de mètres cubes/jour d'eau de mer dessalée à réaliser d'ici 2009, destiné aux habitants des villes situées sur la côte. Là également, le lancement rapide des projets risque de buter sur des problèmes de financement et de terrains. Cet héritage de mauvaise gestion du secteur est reflété par les insuffisantes capacités nationales en matière d'études. D'où le recours systématique aux sociétés étrangères. L'expertise manque en raison de la déperdition en matière de ressources humaines, situation due à un statut d'ingénieur et de technicien dans l'administration guère valorisant. Effet : de mauvaises études ont été réalisées concernant particulièrement les barrages de Koudiat Acerdoune et le projet de transfert des eaux à partir de Tichy Haf. Ce qui a nécessité une réévaluation du coût du premier projet et un nouveau choix de société d'études pour le second projet. Mais la source de toutes ces difficultés, c'est que nos dirigeants, en dépit d'une volonté réelle d'améliorer la situation, n'assurent pas encore aujourd'hui un suivi efficace des opérations qui ont un fort impact sur la population. À tel point que le secteur continue de faire face à de sérieux problèmes de préservation de la ressource, de management des projets et de lenteurs bureaucratiques, entraînant des surcoûts et des risques de tensions sociales lorsque les disponibilités hydriques s'amenuisent. N. R.