Loin d'être un pseudo fantasme de femmes paranoïaques, le harcèlement de rue s'avère être un problème d'ampleur majeure qui installe un climat de peur et dicte inconsciemment la conduite des individus : 1 femme sur 2 adapte sa tenue afin de ne pas être harcelée dans les transports en commun. Cela part de la simple remarque se voulant flatteuse à l'agression sexuelle pur et simple passant par les mains baladeuses, les frotteurs, les suiveurs, les injures etc. Entre propos violents et sexualisés, gestes agressifs et insistants, tous les jours on me rappelle que je n'ai pas gagné au grand bingo des genres. On pense d'ailleurs que le phénomène d'harcèlement n'est vécu que par les jeunes et jolies filles aux tenues suggestives, ce n'est pas le cas, les femmes sont validées ou invalidées, on reçoit des commentaires de l'homme quand on ne lui plait pas, car c'est bien connu nous sommes là pour faire joli dans son champ visuel et il n'hésite pas à faire la remarque quand on ne décore pas assez son extérieur. Ainsi fut-elle voilée ou non, cheveux courts ou longs, jupe ou pantalon avec ou sans maquillage aucune n'est épargnée. Il y'a matière à penser que nous vivons dans une société névrosée ou règne frustration et haine parmi le genre masculin, que la tenue d'une femme, sa présence, son attitude dans tel lieu telle heure justifierait qu'elle puisse être agressée et ce phénomène de culpabilisation de la victime et de déculpabilisation de l'agresseur s'illustre dès l'instant de ladite agression jusqu'aux instances censés accueillir les plaintes y compris dans l'entourage ou parmi les proches quand on parle de ce qu'on a vécu. " Oui, mais toi aussi tu n'aurais pas du ... " étant l'éternelle phrase redondante, c'est ainsi que je me permets aussi de pointer du doigt les différentes strates de la société mais aussi les médias, le cinéma qui entretiennent cette idée et rejette systématiquement la faute sur la femme. Est-il nécessaire de souligner la dimension sexiste des répliques qu'on nous crache à tout va dans la rue ? Révélateur de la culture de viol,acte qui outre les séquelles psychologiques est d'une violence inouïe et est complètement dénaturé et pris à la dérision. Suivant ce raisonnement nous sommes à même de conclure finalement que certains hommes sont des bêtes incontrôlables sous l'emprise de leurs hormones incapables de réfréner leurs pulsions, mais ce point ne semble que très peu préoccuper les principaux concernés. On a tendance à associer l'harcèlement à de la drague, dire que les femmes exagèrent et qu'elles devraient s'estimer heureuses, recevoir un compliment n'est pas la plus belle chose qui peut arriver dans la journée d'une femme, c'est un mythe à déconstruire. La différence entre les deux ? Le consentement. La drague est un jeu à deux, tandis que l'harcèlement lui s'impose. Quand une personne est présente dans un espace public ce n'est pas forcément pour faire des rencontres, on peut déranger, on peut essuyer un refus et on se doit de respecter ça. Dans l'immense majorité des cas l'harcèlement est là pour infliger une supériorité obsolète et écraser l'autre pour se sentir plus fort, instaurer la peur à force de regards lubriques insistants, de propos crus et de gestes brusques. Au point de développer des stratégies au quotidien pour éviter tout ça : certaines ne sortent pas sans écouteurs afin d'afficher une sorte de fermeture, d'autre calcule la longueur de leur haut, on choisit soigneusement sa place dans le bus de préférence auprès d'autres femmes, on se fait raccompagner chez soi, on ne rentre pas au-delà d'une certaine heure. C'est là qu'on se rend compte que c'est un phénomène qui modifie et change nos choix au quotidien. Les hommes n'ont pas le monopole du sexisme, on a tous grandi dans une seule et même société. Ce qu'on doit faire ce n'est plus de laisser ces comportements se fabriquer sous nos yeux, on doit investir du temps dans : l'éducation, l'égalité sous toutes ses formes. Ne pas tolérer un comportement répressif et déconstruire les schémas discriminants qu'on se refile gaiement depuis des siècles. Camélia BOURAHLA. (Soleil HEC/Rédaction Numérique de "Liberté")