Le projet du cahier des charges régissant l'importation de la pièce de rechange pour l'automobile, récemment annoncé par le ministre de l'Industrie et des Mines, Abdeslam Bouchouareb, inquiète les professionnels du secteur. En effet, lors d'une rencontre mercredi dernier à Alger, des opérateurs activant dans le domaine de la pièce de rechange ont attiré l'attention des pouvoirs publics sur la nécessité de revoir certaines clauses du projet de loi, notamment celle obligeant les importateurs à s'approvisionner directement chez les maisons-mères des marques automobiles établies en Algérie. Aux yeux de ces opérateurs, "si cette clause est maintenue, le service après-vente en pâtira et le manque de disponibilité de la pièce de rechange se traduira par une flambée des prix et une spéculation sur le marché parallèle". Un ancien opérateur qui active dans le créneau depuis les années 1980, a indiqué à Liberté que "cette clause réduira de 70% notre activité. Il faut savoir que la moyenne d'âge des véhicules recensés au Parc national de l'automobile (PNA) est de 16 ans. Est-ce qu'il existe des concessionnaires, toutes marques confondues, qui commercialisent encore des pièces de tous les véhicules dépassant 10 et 15 ans d'âge ? Malgré les efforts que consentent les concessionnaires algériens, les automobilistes souffrent encore du manque de disponibilité de plusieurs pièces de rechange, notamment en ce qui concerne la partie mécatronique des véhicules". Evoquant les entraves que ce cahier des charges pourrait induire, il dira que le problème réside également dans la pièce de rechange adaptable. "Les maisons-mères, elles-mêmes, s'approvisionnent pour leurs propres besoins, chez des fournisseurs mondiaux très connus. Il est inconcevable d'acheter une pièce chez une marque automobile qui ne fabrique pas elle-même. Si on l'achète chez lui et on l'importe, le client final payera très cher le produit. Pourquoi alors pénaliser et l'importateur professionnel et le client algérien ?" s'interroge-t-il. Un autre professionnel qui a de longues années d'activités, lui aussi, est du même avis : "Les pièces que nous importons répondent aux standards internationaux. Nous, nous nous approvisionnons directement chez le fabricant et la pièce revient trois fois moins chère sur le marché local. Les pouvoirs publics doivent savoir qu'on défend un métier et non une filière. La pièce de rechange est un secteur difficile. La pièce adaptable, d'origine garantie, constitue un peu plus de 60% du marché. Nous importons en fonction de la demande du marché et il n'y a pas de gaspillage. Car, si gaspillage il y a, nous le payerons de notre poche." Saluant l'arsenal législatif de la lutte contre la pièce de rechange contrefaite, souvent à l'origine des accidents mortels sur nos routes, les professionnels du secteur estiment que "l'assainissement du marché et sa régulation sont plus que souhaitables. Cela va de la valeur ajoutée qu'apportent les 46 000 intervenants dans ce domaine et de l'avenir de quelque 400 000 emplois directs et indirects". Selon des statistiques récentes, 3 000 opérateurs importent la pièce de rechange pour un volume global de près de 800 millions de dollars. Répartis sur l'ensemble du territoire national, ils approvisionnent 10 000 grossistes et 20 000 détaillants, tous activant sur le marché formel. FARID BELGACEM