La réduction de la production des pays de l'Opep devra aller au-delà du niveau de 1,8 million de barils/jour pour espérer des prix du brut élevés. Certains des acteurs les plus importants et les plus influents du marché pétrolier font des déclarations concordantes et semblent parler d'une seule voix à l'approche de la réunion de l'Opep, prévue le 25 mai à Vienne. Ainsi, le ministre de l'Energie saoudien, Khalid Al-Falih, a affirmé, lundi 8 mai, depuis Kuala Lumpur (Malaisie), que le marché pétrolier "s'équilibrait" après des années d'offre excédentaire, soulignant qu'il s'attend à "une extension" de l'accord de réduction de la production de l'organisation pétrolière au second semestre 2017 et peut-être au-delà. Son homologue koweïtien, Issam Elmerzoug, dit la même chose, estimant que les pays producteurs de pétrole devraient "renouveler" un accord sur "une extension de six mois" de la réduction de la production de pétrole. Il y a, ajoute-t-il, un "consensus presque total" sur l'importance d'étendre l'accord sur au moins six mois. Le ministre a relevé que son pays soutenait une reconduction de l'accord. Et d'expliquer que les effets de la réduction de la production vont se faire ressentir dans "les prochains mois", avec la baisse des stocks mondiaux. La Russie veut également se joindre à cet effort. La Russie est "solidaire" des efforts de nos partenaires pour "rééquilibrer" le marché et estime que l'initiative commune pour stabiliser le marché mondial est actuellement "effective", a ainsi déclaré son ministre de l'Energie, Alexandre Novak. Ces affirmations devaient faire paraître l'avenir des marchés moins sombre que ne le prévoient beaucoup d'observateurs. Rien n'est moins sûr que les marchés aient plus de chance de reprendre de la vigueur dans deux ou six mois. Pour le moment, ils restent en berne. Hier, par exemple, les cours du pétrole étaient orientés en très légère hausse en Asie après la dégringolade de la semaine passée, tout en demeurant en dessous de la barre symbolique des 50 dollars. Ainsi, le baril de light sweet crude (WTI), référence américaine du brut, pour livraison en juin, progressait de 5 cents à 46,48 dollars dans les échanges électroniques en Asie. Le baril de Brent, référence européenne, pour livraison en juillet, gagnait, lui, 7 cents à 49,41 dollars. Des indications de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole, selon lesquelles l'Opep et ses partenaires pourraient prolonger au-delà de juin les baisses de production, ont "ragaillardi" les investisseurs. Mais "l'inquiétude demeure forte" quant à la surabondance de l'offre. Ces efforts internationaux pour soutenir les prix ont été, en fait, contrecarrés, notamment par la hausse de la production américaine. Les investisseurs attendront de connaître cette semaine les chiffres des réserves américaines pour guetter des signaux positifs qui pourraient faire revenir les acheteurs sur le marché et empêcher de plus amples baisses. Qu'en pense Mohamed Saïd Beghoul, expert en énergie ? Selon lui, la situation actuelle du marché pétrolier, avec des prix du baril sous la barre des 50 dollars, est essentiellement liée à la "concomitance" de facteurs baissiers à la veille de l'arrivée à terme des 6 mois de l'accord Opep - non-Opep de décembre 2016. M. Beghoul explique que la production américaine se porte bien à 9,3 millions de barils par jour (soit 10% de plus que l'année écoulée), la chute des stocks américains, qui avoisinent les 530 millions de barils, est beaucoup moins rapide que prévu par l'Opep, le nombre d'appareils de forage en activité a doublé depuis l'an dernier avec 720 unités, l'offre semble dépasser la demande mondiale avec des stocks dans les pays consommateurs de l'ordre de 300 millions barils supérieurs à ceux d'il y a 5 ans, etc. Il est dès lors recommandé que l'Opep, qui produit actuellement près de 32 millions de barils par jour, et ses alliés reconduisent, le 25 mai, l'accord de réduction pour le reste de l'année 2017. Mais, ajoute l'expert, ils ne peuvent améliorer les prix que s'ils augmentent la réduction à plus de 1,8 million de baril par jour, auquel cas beaucoup de pays producteurs, dont l'Algérie, risquent de réduire leurs exportations et clôturer l'année 2017 avec des revenus inférieurs à ceux de 2016. M. Beghoul prédit, par ailleurs, que si le prolongement de l'accord se fait avec la même coupe (1,8 million de barils par jour), devenue obsolète, il y aura risque de voir les prix descendre vers les 40-45 dollars.