Abdelmadjid Tebboune est-il l'homme de la situation ? Avec une baisse drastique des revenus du pays, aura-t-il de la marge pour répondre aux attentes sociales et économiques ? Belmihoub Mohamed Cherif est expert en économie. Dans une déclaration qu'il nous a faite hier, il explique que ce n'est pas parce qu'il y n'a pas assez d'argent dans les caisses de l'Etat, que l'on arrête la machine économique. Il faut aujourd'hui, dit-il, stabiliser le cadre macroéconomique en même temps que la mise en œuvre de réformes structurelles. Certes, ajoute-t-il, les défis sont énormes pour le nouveau gouvernement, mais la partie est jouable, à condition de ne pas bloquer la machine dans le secteur économique. Evidemment, l'Exécutif doit, souligne-t-il, faire beaucoup de choses (parce qu'il y a des attentes économiques et sociales), avec peu de moyens. C'est dans cette direction qu'il devra consacrer ses efforts et ses énergies. Ainsi, poursuit-il, le gouvernement est contraint de trouver des solutions de financement de l'économie, d'améliorer le climat des affaires, d'encourager l'investissement... Car, avertit-il, s'il ne le fait pas, la croissance va perdre de l'élan, et l'activité économique se gripper d'avantage. Et de commenter que ce n'est certainement pas de cette manière que l'on peut augmenter la fiscalité ordinaire et régler les problèmes dont souffrent les entreprises notamment dans le Btph. Pour Belmihoub Mohamed Cherif, le pays ne doit pas avoir honte d'aller chercher de l'argent sur le marché international, si c'est nécessaire, à condition que cet argent serve l'investissement, l'économie. Mohamed Saïd Beghoul, expert en énergie, estime, lui, que vu la situation économique actuelle du pays et les tensions dans certains pays voisins, les priorités restent les mêmes, quel que soit le gouvernement en place. Beghoul recommande de mettre en place des mécanismes préservant la stabilité, l'unité et la sécurité nationale, d'une part, et d'asseoir un modèle économique hors hydrocarbures, d'autre part. Mais tout cela, ajoute-t-il, nécessite d'énormes ressources financières dont l'unique pourvoyeur demeure, malheureusement, le pétrole dont nous n'en connaissons que très peu sur l'avenir de son marché. Il est, néanmoins, clair qu'aucun gouvernement ne peut agir de lui-même pour remédier à la dégringolade des prix du baril, pas même l'Opep. L'expert explique, par ailleurs, que les énergies renouvelables sont un volet intéressant et important pour le pays. Mais, dit-il, il reste secondaire du fait qu'il concerne le long terme en matière de contribution, à grande échelle, à l'économie du pays dont le redressement urge. Pour sa part, Souhail Meddah, expert financier, relève que la prise de fonction du gouvernement intervient, alors qu'a été mise en œuvre la première étape du nouveau modèle économique de croissance. Cette première étape appelée phase de décollage fait appel, souligne-t-il, à plus d'engagement sur le terrain et de rigueur dans la gestion des ressources. Pour l'expert, la discipline, la rigueur budgétaire et la maîtrise de la gestion des stocks en réserves de changes doit constituer une des priorités phares de l'Exécutif. Au plan de l'engagement social, poursuit-il, la priorité sera accordée au maintien de la cadence de réalisations de logements pour faire avancer les travaux dans le secteur de la construction, mais aussi pour maintenir un rythme acceptable de l'activité de réalisation, le but étant de garantir une certaine longévité pour cet important levier de croissance. L'autre priorité, selon Souhil Meddah, est l'instauration d'une discipline ou d'une rigueur budgétaire en continu devant permettre l'élargissement de l'assiette fiscale et le recouvrement fiscal. Notre interlocuteur formule, par ailleurs, d'autres propositions, insistant, par exemple, sur la mobilisation de l'épargne et autres ressources de financement. Youcef Salami