Droit à l'école Ce besoin de ne pas se retrouver seul, propre à la cellule familiale ou à l'association locale face à l'absence de réponses, on le perçoit aussi chez l'AAT, créée en octobre 2011, conseillée, par les praticiens de la santé, de se mettre en réseau pour une stratégie locale et nationale. Pour le professeur Zendagui, l'erreur à éviter est de ne pas s'entourer que de parents d'enfants handicapés alors qu'une association se doit d'être hétéroclite, composée de psychologues, de médecins et de managers de projet pour sortir des sentiers battus et avoir une vision extérieure, objective. Il évoque le caractère de globe-trotter des parents d'autistes et cette illusion, somme toute légitime, d'un enfant autiste sur la voie de la guérison, affirmant, pour reprendre son trésorier Hamza Cherif, "qu'il faut faire le deuil de l'enfant normal". Entamer ce voyage initiatique dans l'intimité des parents et des enfants, c'est constater qu'on fait face à plus de questions que de certitudes. "La plupart des réponses, quand on est parent d'enfant autiste, sont obtenues hors du champ médical, au contact des autres parents, des sources sur le web des chercheurs indépendants des laboratoires pharmaceutiques", reconnaît Samir, père d'un enfant trisomique de cinq ans. Son histoire avec la maladie résume malheureusement le parcours typique d'une famille concernée par un tel cas. "Les premiers symptômes apparaissent dès l'âge de deux ans. On s'interroge sur la nature du retard dans le langage et on est vite rassuré par l'entourage familial à grand renfort de cas similaires où l'enfant se met à parler un peu plus tard". Il se référera ensuite aux indices décrits par les troubles du spectre autistique qui vont du retard dans le langage à l'isolement et l'absence d'interaction sociale, en passant par les troubles d'ordre alimentaire et les stéréotypes (gestes répétitifs, tapotement dans les mains, regard fuyant). "L'enfant ne répond pas à un bruit qui ferait réagir un enfant normal", expliquera-t-il, se souvenant de sa propre expérience. "Avec le temps, les choses ne s'améliorent pas et c'est là où il faut commencer à s'inquiéter". Le besoin de rechercher de l'aide auprès des spécialistes potentiels se fait sentir et le premier refuge est de recourir à l'audit médical pour mettre un nom sur le dysfonctionnement. La suite est une succession d'avis et de visites médicales, à faire l'apprentissage élémentaire de l'enfant. Dans cette guerre perdue d'avance en Algérie, le fait même de s'entendre dire par sa femme que le petit a fait ses besoins tout seul est déjà une victoire en soi, dira Zendagui. Si le droit de ces enfants pour une scolarité est garanti par les textes, il en est autrement sur le terrain, avoue Samir, qui met en avant la complexité de la chose en face d'une inadaptation du système éducatif avec cette donne et la difficulté de disposer d'un auxiliaire de vie scolaire, indispensable au suivi des enfants handicapés en milieu scolaire ordinaire. Mais ce qui réunit nos différents interlocuteurs est cette demande adressée à l'Etat pour la mise en place d'un protocole de prise en charge de ce type de pathologie qui doit être axé sur deux volets : l'orientation des parents dans les établissements publics de proximité (leur première destination étant les dispensaires) et la réglementation relative à la vaccination des nouveaux nés qui doit être respectée à la lettre. "Beaucoup de gens ignorent ce que c'est que l'autisme et si ça se trouve, ils ont un enfant autiste et l'ignorent", dira Salim qui plaide, également, pour une normalisation des structures d'accueil qu'elles soient publiques ou privées. Tous accordent leur violon pour exhorter les pouvoirs publics de venir en aide financièrement et matériellement à ces associations qui se battent, souvent, dans un anonymat forcé, en les mettant en contact avec des spécialistes et en dégageant un personnel spécialisé (orthophonistes, psychologues) pour les accompagner. L'implication de tout le monde est plus que nécessaire : ministères de la Santé, de l'Education et de la Solidarité ainsi que de la société civile pour que tous les jours de l'année soient une journée internationale consacrée à ces enfants. Les témoignages des parents aussi poignants que troublants trahissent cette impression d'avoir été floués par les promesses non tenues d'un gouvernement qui met sur un pied d'égalité le salaire d'un auxiliaire de vie que l'importation de chewing-gum. Austérité quand tu nous tiens ! Reportage réalisé par : Saïd Oussad