Le nouveau plan d'action du gouvernement adopté jeudi par le Conseil des ministres vise à sauvegarder et à consolider la dynamique de croissance tout en veillant à préserver et à affiner la politique de justice sociale. Cela passe, selon les concepteurs de ce plan, par des "adaptations budgétaires graduelles" et une "maîtrise" des dépenses publiques sans négliger toutefois, le caractère social de l'économie nationale. Pour amortir le choc de la crise que vit actuellement l'Algérie suite à la chute des prix du pétrole, l'Exécutif doit opter, ainsi, pour de nouveaux arbitrages budgétaires afin de permettre au pays de limiter les dépenses injustifiées et de disposer des ressources nécessaires à son développement. La rationalisation des dépenses publiques est désormais entérinée. Pour cela, le gouvernement engagera une "évaluation de l'efficacité" des dépenses publiques orientées vers les différentes subventions et exemptions fiscales dans le but de "réduire celles destinées à des activités ne générant aucune retombée positive pour l'économie ou la société", est-il expliqué dans le plan d'action. Dans sa démarche, l'Exécutif lancera une large concertation impliquant le Parlement, les partis politiques et la société civile afin d'adapter progressivement la politique des transferts sociaux. L'objectif recherché est d' "apporter plus d'efficacité et d'efficience et d'asseoir une plus grande justice et équité sociales à travers un ciblage précis", lit-on dans le document. Des politiques de "rééquilibrages tarifaires" pour les rapprocher des coûts économiques des services fournis seront également élaborées tout en "préservant des tarifs appropriés aux ménages à bas revenus". C'est dire que la stratégie qui instaurera un système de subventions ciblées, tant recommandé par les économistes, est d'ores et déjà mise en branle. Depuis des années, l'Algérie a opté pour la politique des subventions. Il s'agit de soutenir les prix de certains produits alimentaires de large consommation tels que l'huile, le sucre, le pain, le lait... Grâce à l'aisance financière générée par les hydrocarbures en voie d'épuisement du reste, le gouvernement, au nom de la paix sociale, généralise les subventions. Mais celles-ci, étant généralisées, pèsent lourdement sur le budget de l'Etat. D'où la nécessité de passer à un système de subventions ciblées. Après les experts, c'est au tour des plus hauts responsables de choisir une telle option. Rappelant la nature irrévocable des choix nationaux en matière de justice sociale et de solidarité nationale, le président de la République a chargé l'Exécutif de travailler à une plus grande rationalisation de cette politique sociale, y compris par un meilleur ciblage des subventions publiques. La mise en place de subventions ciblées, profitant en premier lieu aux plus démunis tout en limitant le gaspillage des produits subventionnés, devrait être l'une des priorités du projet de loi de finances 2018. Un système de subventions très coûteux Cette nécessité de cibler les ménages et les activités, devant être soutenus par le budget de l'Etat, est dictée par la baisse des ressources budgétaires. D'aucuns parmi les observateurs établissent un même constat : le système de subventions absorbe une part croissante des ressources de la collectivité soit près de 30% du PIB au moment où les recettes de l'Etat s'amenuisent davantage. Il favorise la surconsommation et le gaspillage des produits concernés et alimente fortement les réseaux de contrebande à travers les frontières. Ces subventions devront être orientées vers les seuls et vrais nécessiteux dont la cartographie nationale sera définie prochainement. Au lieu de soutenir les prix des produits de large consommation qui profite à la fois aux nécessiteux et aux personnes aisées, les spécialistes proposent un système de transferts monétaires directs en direction des couches les plus défavorisées. Pour eux, il est préférable de subventionner les ménages plutôt que les produits. Le ministre des Finances a annoncé, il y a quelques mois, que le gouvernement a commencé à mettre en place une "carte des ménages défavorisés" afin de passer d'une méthode de subventions généralisées à des subventions ciblées. Pour calmer un front social souvent en ébullition, les pouvoirs publics ont pris, par le biais des différentes lois de finances, des mesures qui ont eu pour conséquence le maintien de la politique de l'Etat en matière de subvention des prix des produits de large consommation avec, en sus, un impact peu perceptible au sein de la population. Outre cette disparité dans l'octroi du soutien de l'Etat, il est signalé aussi l'opacité dans la gestion de ces programmes. Une chose est certaine, cette option prise par l'Algérie a été saluée par le FMI et par de nombreux experts. Le collectif Nabni, par exemple, estime que le modèle actuel des subventions directes et indirectes est "injuste", "inefficace" et "non soutenable" financièrement. De plus en plus de pays de la région et dans le monde mettent fin aux subventions universelles de produits alimentaires et énergétiques en compensant les plus démunis. Le même avis est partagé par le Conseil national économique et social (Cnes) qui opte pour un système "d'allocations monétaires directes" aux ménages défavorisés, en s'appuyant sur le Numéro d'identification national (NIN). Ces subventions peuvent être attribuées dans le court terme et graduellement via les mécanismes des allocations familiales et des bourses en tout genre, en mettant en parallèle un système de ciblage qui soit juste et crédible. B. K.