Le ministre des Affaires étrangères, Abdelkader Messahel, devrait achever, aujourd'hui, une tournée qui l'a mené dans de nombreuses capitales arabes, entre autres : Le Caire, Riyad, mais aussi Mascate, Doha, Amman et Koweït. "Sur instruction de M. le président de la République, Abdelkader Messahel, ministre des Affaires étrangères, effectuera, à compter du 30 juillet 2017, une tournée au Moyen-Orient qui le mènera en Arabie saoudite, en Egypte, à Oman, à Bahreïn, au Qatar, au Koweït, en Jordanie et en Irak. Il est porteur d'un message de M. le président de la République aux souverains et chefs d'Etat de ces pays", avait indiqué, il y a une semaine, le ministère des AE dans un communiqué rendu public. Au-delà des questions bilatérales et d'autres sujets d'ordre international, la tournée de Messahel, la plus longue depuis qu'il a pris seul les rênes de la diplomatie, semble avoir été axée, essentiellement, sur la crise du Golfe, celle qui oppose depuis quelques mois le petit émirat gazier du Qatar à ses voisins, particulièrement l'Arabie saoudite et l'Egypte qui l'accusent de soutenir le terrorisme. "Le ministre des Affaires étrangères, Abdelkader Messahel, a été reçu par l'émir du Koweït, Cheikh Sabah Al-Ahmed Al-Jaber Al-Sabah, auquel il a remis un message d'amitié, d'estime et de considération qui lui est adressé par le président de la République, Abdelaziz Bouteflika", a indiqué, hier, un communiqué du ministère des Affaires étrangères au terme de la rencontre entre Messahel et le pays médiateur dans cette crise. "Cheikh Sabah a, à son tour, chargé le ministre Messahel de transmettre au président de la République, Abdelaziz Bouteflika, ses salutations chaleureuses et fraternelles et ses sentiments de considération ainsi que ses vœux de progrès au peuple algérien", précise le communiqué. "L'audience a porté sur la situation dans la région, en particulier les développements liés à la crise du Golfe. À cet égard, M. Messahel a réitéré le soutien de l'Algérie aux efforts de la facilitation menée par l'émir du Koweït pour le règlement de cette crise", souligne la même source reprise par l'agence officielle. Parce qu'elle ne peut être réglée que par les Américains, les plus influents dans la région, de l'avis de nombreux observateurs et experts, que l'on se demande, bien sûr, les desseins sous-jacents et l'efficacité de l'action de la diplomatie algérienne dans cette crise. D'ailleurs, M. Messahel avait affirmé lors de la conférence conjointe qu'il avait animée au Caire, en compagnie de son homologue égyptien, qu'il n'était porteur "d'aucune initiative". Mieux encore, de quelle influence peut-elle se prévaloir dans une région où on ne compte pas que des amis, et lorsqu'elle est coiffée sur le poteau dans des dossiers plus près de nous, qui concernent directement le pays, comme le dossier libyen ou encore malien ? On l'a vu, au Sahel où, sous l'impulsion de la France, a été créé le groupe des "5", en court-circuitant de facto le fameux Cemoc dont on ignore en quoi il est encore utile, sept ans après sa création, alors que dans le dossier libyen, le jeune président français a réussi à arracher un accord au deux frères-ennemis, Haftar et Serradj, ce que n'a pas pu obtenir Alger. Aussi, l'accord de Skhirat au Maroc continue à constituer la base de travail pour le règlement de la crise libyenne au moment où l'Algérie déploie d'énormes efforts, mais sans que l'on perçoive encore quelques signes des résultats escomptés. Si l'on ajoute, le "raté" pour infléchir la position de certains pays africains concernant la réintégration du Maroc à l'UA, autant dire que l'efficacité, depuis quelques années, nous fait défaut. Il ne s'agit pas ici de remettre en question les compétences de nos diplomates dont certains occupent des postes prestigieux dans des organismes internationaux, ni leur bonne volonté, mais force est d'admettre que l'absence prolongée de Bouteflika pèse lourdement sur l'action de la diplomatie et sur notre politique étrangère. Dans son article 84, la Constitution stipule clairement que le chef de l'Etat qui "incarne l'unité de la Nation, est garant de la Constitution et incarne l'Etat dans le pays et à l'étranger et s'adresse directement à la Nation". Vu sous cet angle, ni le Premier ministre ni le chef de la diplomatie ne peuvent "incarner" le pays à l'étranger et leur marge de manœuvre demeure ainsi limitée s'agissant de la politique extérieure. Et s'il est établi que la force économique, la puissance militaire, la disposition de grands médias, à l'image d'Al-Djazira pour le Qatar, constituent les principaux moyens d'influence d'une diplomatie, les rapports personnels entre chefs d'Etat restent de loin les instruments les plus efficaces. On se rappelle des grands succès obtenus par la diplomatie algérienne, comme le règlement de la guerre entre l'Iran et l'Irak ou encore la libération des otages américains. En 2000, Abdelaziz Bouteflika dont le retour aux affaires était justement de faire sortir le pays de l'isolement diplomatique dans lequel il était plongé après la crise sécuritaire des années 90, avait réussi avec brio le règlement du conflit entre les deux voisins, l'Ethiopie et l'Erythrée, après deux années d'une guerre meurtrière. Mais depuis son effacement, en raison de ses soucis de santé, l'action extérieure du pays a incontestablement pâti. Et signe de cette "lacune" : depuis six mois, le pays n'a pas d'ambassadeur à Paris, une capitale pourtant stratégique pour le pays...